On évitera de mettre la journée à se disputer sur l’intitulé : La journée internationale des femmes (International women’s day) a été initiée par L’Onu il y a exactement 40 ans, en l’honneur des suffragettes. La « Journée de la femme » n’existe que dans le cœur impur de ceux qui aiment essentialiser (Ah l’éternel féminin de tous les fantasmes masculins !), la « journée des droits des femmes » est une spécificité gouvernementale française. En résumé, on garde le pluriel et on déborde les frontières pour vivre cette journée dans le sens qui lui a été donné.
Les femmes ne sont donc pas une espèce protégée, et le 8 mars n’est pas un complot monté par les fleuristes et les chocolatiers. On peut donc s’abstenir d’offrir des chocolats à sa secrétaire mais on a le droit de l’augmenter, elle le mérite forcément, eu égard aux disparités salariales scandaleusement boiteuses entre hommes et femmes.
Marronnier ou pas, il est toujours bon de rappeler quelques fondamentaux. Lecteurs.com vous propose donc son choix de lectures spécial « 8 mars ». Deux romans, trois essais : des romancières qui imposent leur genre en tête de gondole, où habituellement la littérature ne se conjuguait qu’au masculin. Des auteurs qui font avancer la conscience du féminin à travers leur œuvre, des rebelles trash qui ramènent la question du rapport de force au cœur du débat.
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Pour rappeler quelques fondamentaux
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Valet de pique de Joyce Carol Oates
Voici l’écrivain total, à la fois romancière, poétesse, nouvelliste, dramaturge, essayiste et prolifique comme un Balzac américain. Son premier livre est un recueil de poèmes repéré et édité par… une femme. Elle publie en France Valet de Pique, paru aux Etats-Unis en 2015. L’histoire d’un romancier à succès qui laisse s’exprimer son double maléfique dans des romans violents et inquiétants. Un dr Jeckyll & M. Hyde dans le monde de la création littéraire. Un thriller mais aussi une réflexion fractale sur le Je qui écrit et ses motivations pas si claires.
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Un été sans les hommes de Siri Hustvedt
Féministe ? Oui, l’écrivaine et poétesse Siri Hustvedt l’est, et plutôt deux fois qu’une. Le féminisme de l’écrivaine Siri Hustvedt est élégant et construit, lucide et drôle. Son œuvre littéraire en porte la trace, de son dernier roman, Un Monde flamboyant (Actes Sud, 2014) consacré à une plasticienne new-yorkaise, Harriet Burden, à Un été sans les hommes, publié en 2011 et qu’on trouve facilement en poche. L’héroïne de ce roman au titre explicite est une poétesse de 55 ans à qui son mari Boris, neuroscientifique, demande de faire « une pause ». La pause est française, forcément plus jeune et évidemment très avenante. Pourtant, Un été sans les hommes n’est pas un roman sur les couples : aucun homme dans ce texte où les femmes parlent vrai pendant que Mia se reconstruit, le temps d’un été, enseignant la poésie à des adolescentes et fréquentant les petites veuves de la maison de retraite de sa mère. Sous couvert d’une histoire attachante, Un été sans les hommes est bel et bien une tentative de définir le féminin sans pour autant l’opposer au masculin.
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La domination masculine n'existe pas de Peggy Sastre
Et boum, le titre écorche d’emblée l’œil des féministes de certains courants traditionnels et radicaux qui nagent à l’aise dans le bain tiède de l’identité par l’opposition dogmatique, plutôt que dans la remise à plat des idées toutes faites ou défraichies. Peggy Sastre évacue la question du genre du champ identitaire et ramène un peu la biologie et l’anthropologie au cœur du sujet. Descriptive et analytique, cette essayiste féministe qui ébouriffe les raies trop sages, ne se place jamais du côté du jugement moral, et ça fait un bien fou. Alors, qu’on partage ou non ses analyses, elles ont le mérite d’agiter le landerneau féministe, dynamiter les chapelles et donner un coup de frais à la réflexion féministe. Depuis sa publication en 2015, le livre n’a pas pris une ride ni un gramme de poussière. Poil à gratter garanti.
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King Kong théorie de Virginie Despentes
Ce n’est ni un roman, ni un essai, c’est un classique. Ecrit en 2006, porté au théâtre depuis, ce livre inclassable est la base de tout questionnement sur le féminin, à la sauce cash et brutale. Avec la fermeté de ton qu’une vie bringuebalante et violente lui confère, Despentes ne parle pas depuis les gradins mais de l’arène dont elle a gardé plaies et cicatrices. » Je suis furieuse contre une société qui m'a éduquée sans jamais m'apprendre à blesser un homme s'il m'écarte les cuisses de force, alors que cette même société m'a inculqué l'idée que c'était un crime dont je ne devais jamais me remettre ». Le ton est donné, mais les nuances permises aussi : « Ça vaut le coup de porter des tenues inconfortables, des chaussures qui entravent la marche, de se faire péter le nez ou gonfler la poitrine, de s'affamer. Jamais aucune société n'a exigé autant de preuves de soumissions aux diktats esthétiques, autant de modifications corporelles pour féminiser un corps. En même temps que jamais aucune société n'a autant permis la libre circulation corporelle et intellectuelle des femmes ». Le texte se passe de commentaires, on lit.
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Anatomie de l'oppression de Pauline Hillier - Inna Shevchenko
Elles savent montrer leurs seins et désormais prendre la plume : dans ce livre qui vaut manifeste, deux des protagonistes du mouvement Femen dénoncent le rôle des trois religions monothéistes dans le harcèlement dont les femmes font l’objet depuis des millénaires. Constitué comme un corps humain, avec des chapitres « tête », « Mains », « Seins », « ventres », « Cœur », etc., les deux auteurs de 26 et 30 ans avancent « à contre Coran et contre Bible ». Au chevet de la femme, elles livrent là un diagnostic qui sonne comme une mobilisation générale, un peu plus subtile que les images jugées souvent agaçantes ou outrancières de leurs happenings peuvent le laisser penser.
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Ces livres que nos lectrices nous conseillent
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Du domaine des murmures de Carole Martinez
Pour Bénédicte, lectrice : parce que son personnage Esclarmonde, qui choisit d'être emmurée vivante plutôt que d'épouser un seigneur qu'elle n'a pas choisi, a décidé de prendre son destin en main en refusant d'être considérée comme une marchandise, comme c'était le cas au moyen âge et comme cela l'est aujourd'hui hélas aussi dans le monde.
Et forcément on est d'accord avec cette analyse ! -
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Le goût du bonheur Tome 1 ; Gabrielle de Marie Laberge
Pour Chantal Lafon, notre lectrice : personnage inspiré par la belle-mère de l'auteur qui n'attendait pas d'avoir des droits pour s'engager et prendre la vie à bras le corps un magnifique portrait de femme.
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Elles le disent aussi à leur façon, les femmes sont culottées !
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Olympe de Gouges de Jose-Louis Bocquet - Catel
Parce qu'Olympe de Gouges est le précurseur de la reconnaissance des droits des femmes, on aime ce roman graphique qui permet de faire connaitre le personnage au plus grand nombre.
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Culottées ; des femmes qui ne font que ce qu'elles veulent Tome 2 de Penelope Bagieu
Parce qu’elles ont osé, parce que différentes elles auraient pu échouer, parce que courageuses elles sont réussi, Pénélope Baguieu rend un bel hommage à ces femmes qui en ont, du culot !
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Nous aurions pu en suggérer davantage, dans le pour aller plus loin!