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En 1760, Diderot s'inquiétait de la santé de Sophie Volland: « Vous vous portez donc bien ? Point de mal au sein ? » Il redemandait peu après : « Il y a longtemps que vous ne m'avez rien dit du bobo. Avez-vous entendu parler des pilules de ciguë ? On leur attribue des prodiges dans toutes les maladies d'obstruction: loupes, glandes engorgées, tumeurs cancéreuses, etc. » Le Viennois Anton Storck venait en effet de publier en latin une Dissertation sur l'usage de la ciguë, remède très-utile dans plusieurs maladies dont la guérison a paru jusqu'à présent impossible.
De France parvinrent au Journal de médecine des dizaines d'observations relatant des essais de traitement par le nouveau remède. On les inscrit dans les conceptions générales de la maladie, en relation avec les débats sur l'opportunité de l'extirpation et sur les causes possibles de la maladie : contusion, contamination, hérédité, facteurs psychologiques. Les « pilules de ciguë » donneront l'image d'un médicament miracle et peu coûteux approprié au marché moderne du collectif, dont l'histoire participe à la « genèse de la clinique » décrite par Michel Foucault.
Par la lutte désespérée ou obstinée que mènent patients et praticiens contre la maladie, la chronique d'une illusion et de son déclin n'en offre pas moins un singulier livre de vie.
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