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Dans la philosophie ancienne, qu'elle soit grecque ou romaine, la distinction entre le droit et le juste n'existe pas : dikaion, ius, c'est à la fois le droit et le juste, ce qui résulte de l'exercice de la vertu de justice, dikaiosune, iustitia. Le droit est donc l'objet de la justice, c'est-à-dire d'une vertu morale qui se définit comme une disposition libre et constante de la volonté à faire le bien, en instituant l'équité, en attribuant à chacun ce qui lui appartient. Le droit est ainsi indissociable de la morale, dont il constitue la réalisation concrète à travers la manière dont il instaure ou restaure des rapports équitables entre les hommes.
Dans la philosophie moderne, le droit et la morale ont progressivement été séparés, jusqu'à l'émergence du positivisme juridique, qui repose sur l'affirmation que « La validité du droit positif est indépendante de son rapport avec une norme de justice1 ». Le droit vaut indépendamment de son rapport avec la morale, qui n'est donc plus considérée comme le fondement de la validité du droit. Hans Kelsen souligne que cette affirmation constitue la « différence essentielle2 » entre positivisme juridique et théorie du droit naturel au-delà des nombreuses expressions historiques de ces deux paradigmes philosophiques.
Cette différence essentielle entre philosophie ancienne et philosophie moderne, entre théorie du droit naturel et positivisme juridique, fait encore aujourd'hui débat. L'objectif de cette conférence n'est cependant pas de restituer ces discussions : il est de défendre que la morale et le droit ne peuvent pas être séparés ni confondus, mais doivent être distingués et articulés. Je procéderai en trois temps : je résumerai d'abord les arguments du positivisme juridique, les confronterai ensuite à la théorie du droit naturel et montrerai enfin que cette théorie elle-même reconnaît un écart, une tension légitime entre morale et droit.
Émilie Tardivel, diplômée de Sciences Po Paris et docteur en philosophie de l'Université Paris 1, est professeur extraordinaire à la Faculté de philosophie de l'Institut catholique de Paris et titulaire de la Chaire ICP-ESSEC Entreprises et Bien Commun. Elle vit à Paris.
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