Récompensée cette année pour "L'Ami du Prince", la romancière vous confie 10 lectures indispensables
« Les histoires que je lis sont celles de femmes accusées d'avoir passé un pacte avec le diable parce qu'un veau est tombé malade. Les histoires que je lis sont celles de femmes qui soignent alors qu'elles n'ont pas le droit d'exercer la médecine, celles de femmes soupçonnées de faire tomber la grêle ou de recracher une hostie à la sortie de la messe. Et moi, je revois le cartable que m'a acheté ma mère pour la rentrée de sixième, un beau cartable en cuir, alors que j'aurais voulu l'un de ces sacs en toile que les autres gosses portent sur une seule épaule, avec une désinvolture dont il me semble déjà que je ne serai jamais capable. Je revois mon père tenant ma mère par la taille un soir d'été, je le revois nous dire, à mon frère et à moi, ce soir, c'est le quatorze juillet, ça vous dirait d'aller voir le feu d'artifice ? Cette contraction du temps qui se met à résonner, cet afflux de souvenirs que j'avais d'abord pris pour un phénomène passager, non seulement ne s'arrête pas, mais est en train de s'amplifier. » En trois siècles, en Europe, plusieurs dizaines de milliers de femmes ont été accusées, emprisonnées ou exécutées. C'est l'empreinte psychique des chasses aux sorcières, et avec elle, celle des secrets de famille, que l'auteure explore dans ce roman envoûtant sur la transmission et nos souvenirs impensables, magiques, enfouis.
« Roman-enquête dans l'histoire et l'imagerie de la sorcellerie, récit intime d'une adolescence douloureuse. Le complexe de la sorcière se révèle d'une grande finesse. » Transfuge « Ce livre est foisonnant et passionnant. Je mets au défi chaque lectrice et lecteur de ne pas être profondément bouleversé par ce texte. » Psychologies Magazine « Un livre remarquable d'authenticité et ensorcelant de vérité dévoilée. » La règle du jeu
Récompensée cette année pour "L'Ami du Prince", la romancière vous confie 10 lectures indispensables
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Un livre difficile à classer tant il est multiple. Un peu autobiographie, un peu récit de fiction, un peu roman historique, ce qui est sûr c'est qu'il ne vous laissera pas indifférent!
Isabelle Sorente analyse une partie de ses cauchemars afin d’amorcer une quête historique sur les traces des chasses aux sorcières au Moyen âge. Et si ses cauchemars étaient les souvenirs traumatiques de l’un de ses ancêtres ? Un livre atypique et passionnant! Un peu perché néanmoins!
Le complexe de la sorcière est un ouvrage qu'on pourrait diviser en deux parties: une très documentée sur la chasse aux sorcières, depuis la nuit des temps, chasse liée aux croyances et sortilèges,Bof !. Une deuxième partie, beaucoup plus liée à la condition féminine et sa place exacte dans la société, cet aspect abordé de façon beaucoup plus personnelle puisque " l'échantillon" est l'auteur.
Qu'en dire? L'écrit est de bonne facture, l'historique est hautement sérieux, mais.... tout ça n'en fait pas un roman tel que "180 jours" que j'avais dû lire en 180 heures à peine !!
Isabelle Sorente, a sa première vision en juin 2017. Une scène d’interrogatoire inquiétante impossible à situer dans le temps ni dans l’espace qui l’a fortement marquée : une femme, dans une geôle, que l’on veut pousser à avouer qu’elle est une sorcière. S’ensuivent régulièrement des rêves étranges, à tel point qu’elle se sent « hantée », et décide d’entreprendre des recherches. Selon elle, c’est ce qu’elle doit faire. Pour comprendre, pour savoir. Les ouvrages spécialisés s’accumulent sur son bureau, sur les étagères qui se multiplient au rythme effréné de ses nouveaux achats.
Au cours de ses lectures, elle découvre le traitement réservé à celle que l’on accusait de sorcellerie et de nombreux éléments font écho en elle, jusqu’à l’obsession. Elle se pose alors la question d’un éventuel héritage, une empreinte psychologique laissée par les chasses aux sorcières et qui serait aujourd’hui commune à toutes les femmes…
Entre autobiographie et document, l’auteur expose et développe une thèse qui n’a pas su capter mon intérêt. Le propos est intéressant – et a déjà fait couler beaucoup d’encre – et l’approche d’Isabelle Sorente m’a semblé pertinente en quatrième de couverture, mais une fois plongée dans le texte, je n’ai pas trouvé ma place. Beaucoup d’éléments utilisés pour appuyer ses dires relèvent de l’expérience personnelle de l’auteur dans laquelle je ne me suis pas retrouvée. Trop d’introspection, peut-être, d’égocentrisme, qui à la longue, peuvent susciter un certain agacement. Ce livre ne m’a pas « parlé », la sorcellerie m’est finalement apparue comme un biais, un prétexte pour s’exprimer sur un passé douloureux, et la transposition de l’image de la sorcière au XXIe siècle ne m’a absolument pas convaincue.
Le récit s'ouvre sur une vision apparue à l'auteure, une scène terrible, l'interrogatoire d'une femme accusée de sorcellerie, des instruments de torture en métal chauffés en blanc, un inquisiteur menaçant. Un autre siècle. Quoi que ... Cette vision tourne à l'obsession et lance l'enquête d'Isabelle Sorente sur les chasses aux sorcières des XVI-XVIIème siècles. Jusqu'à un télescopage temporel.
Si la figure de la sorcière dans l'historiographie féministe est classique et largement abordée ces dernières années, la thèse du complexe de la sorcière est très neuve et audacieuse.
« Le complexe de la sorcière serait ce soupçon permanent de soi instillée aux femmes torturées, ou aux femmes témoins de la torture d'autres femmes de leur famille ou de leur entourage. L'interdir portant sur la vérité, qu'elles ne peuvent ni chercher ni dire, sous peine de torture. (...) Comment l'Inquisiteur, avec une majuscule, l'Inquisiteur a pu être assimilé, intériorisé, enfoncé à coups de marteau, imprimé au fer rouge, puis oublié mais conservé à l'intérieur de la psyché comme un corps étranger après une opération chirurgicale, transmis de mère en fille et de grand-mère en petite fille, comme un juge toujours en exercice, toujours prêt à mettre en doute, à haïr et à condamner la conscience d'une femme ».
L'idée du empreinte psychologique transgénérationnelle, des chasses aux sorcières ayant laissé une empreinte occulte dans la psyché des femmes, d'un inquisiteur intérieur « hérité » depuis des siècles est séduisante sur le papier.
La difficulté avec les romans à thèse, c'est que pour les apprécier totalement, il faut adhérer à leur postulat de départ. Et dans ce cas-là, je n'ai jamais été convaincue par les aller-retours, les parallèles entre la sorcière d'hier et la femme d'aujourd'hui qui en subirait l'empreinte.
Bien sûr que les femmes du XXIème doivent lutter contre leur inquisiteur intérieur, mais les passerelles entre leurs difficultés actuelles ( injonction à la minceur, mépris des femmes seules, peur des vieilles femmes, autocensure, peur de dire son ressenti profond ) et les sorcières m'ont semblé calquées un peu artificiellement.
Là où j'ai été convaincue, c'est lorsque Isabelle Sorente évoque son adolescence douloureuse en oubliant ses sorcières. Ses mots, tout en retenue et dignité, sont justes et vibrant d'émotions pour dire le harcèlement scolaire très violent qu'elle a subi durant tout le collège. L'éclairage genré sur la réaction des parents est très pertinent : le fils qui s'est fait attaqué une fois dans la cour se voit offrir par le père un cours de self-défense, là où elle, la fille, reçoit de la mère « oui, ça m'est déjà arrivé » et puis c'est tout.
Certes je n'ai pas adhéré à la thèse de l'auteure mais cette dernière fait montre d'une belle réflexion, on sent derrière chaque page une pensée vive qui fouillent les failles de notre société en livrant son expérience personnelle avec une grande sincérité.
Lu dans le cadre de Cercle livresque. Merci Lecteurs.com et les éditions JCLattès
Dans «Le complexe de la sorcière», Isabelle Sorente raconte comment elle s’est passionnée pour ces femmes victimes d’une chasse sans merci, pour leur histoire et leur statut. Des recherches qui vont heurter sa propre histoire et la pousser à dévoiler des secrets de famille.
Il n’est pas rare, en parlant avec les écrivains, de voir combien ils restent habités de leur histoire, combien ils continuent à cheminer avec leurs personnages, même bien après la parution de leur roman. C’est un semblable cheminement que raconte Isabelle Sorente, qui va littéralement être happée par son sujet au point de n’en plus dormir la nuit, au point qu’il va occuper toutes ses journées jusqu’à tourner à l’obsession. Tout commence par la vision d’une femme qui subit un interrogatoire et qu’elle a envie d’écrire. Une vision qui va réapparaître après une conversation avec son amie Sarah. Dès lors, le sujet ne va plus la lâcher, même s’il semble aussi la fuir: «J’ai commencé à me documenter, commandé des livres d’histoire. Pourtant rien ne se passe comme pour la construction d’un personnage. Je n’imagine rien d’elle, rien d’autre que ses yeux ouverts dans l’ombre, je n’ai toujours aucun nom ni aucun lieu, même si l’époque se précise un peu. Les seules scènes qui m’apparaissent sont des souvenirs. Souvenirs d’enfance, d’adolescence, de jeunesse, souvenirs que la sorcière semble évoquer, les rappelant à ma mémoire bien qu’ils n’aient rien à voir avec le destin de ces femmes accusées par leurs voisins, ces femmes questionnées avant d’être bannies, noyées ou brûlées vives».
Le roman qui se construit sous nos yeux va dès lors prendre trois directions, toutes aussi passionnantes les unes que les autres. Il y a d’abord le sujet en lui-même, qui intrigue autant qu’il fascine et dont on va découvrir, au fil des lectures d’Isabelle Sorente, toutes les facettes, à commencer par son aspect presque exclusivement féminin, même si des hommes furent aussi brûlés comme sorciers. «C’est cette réalité que traduit l’expression chasse aux sorcières. On ne dit pas chasse aux sorciers. Il existe une expression dans la langue française où le masculin ne l’emporte pas, c’est la chasse aux sorcières. C’est étrange, quand on y pense.» Une chasse qui va s’industrialiser avec le développement de l’imprimerie. En 1487 paraît le Malleus Maleficarum de Heinrich Krämer et Jakob Sprenger «premier best-seller de l’époque moderne» et véritable appel au crime largement diffusé. Durant les siècles qui suivent des dizaines de milliers de femmes vont été arrêtées, accusées, torturées et exécutées. Le panorama proposé et les affaires retracées en montrent le côté systématique ainsi que le cruauté.
Il n’est dès lors pas étonnant que ces recherches finissent par la hanter. Et c’est là le second aspect du roman, l’implication personnelle de la romancière qui veut comprendre pourquoi elle est si sensible à cette question, pourquoi elle sent dans son propre corps les souffrances et la douleur de ces femmes. Elle va alors se confier à ses amies proches Sarah et Claire, avec lesquelles elle partage ce sentiment que ce qu’elle vit fait partie intégrante de son travail: «L’intégrité, l’éveil, l’amour, les mots peuvent varier mais ce qui ne varie pas, c’est l’importance centrale de cette recherche dans nos vies». Les séances d’analyse avec le Docteur Georges constituent le second volet de cette introspection qui nourrit le roman. Les souvenirs d’enfance, l’histoire familiale, les relations avec ses père et mère s’éclairent au moment où elle croise le chemin des sorcières, «Toutes celles qui cherchaient la vérité. Et même les femmes ordinaires qui voulaient juste la dire».
Autrement dit, Isabelle Sorente prend conscience qu’elle est une sorcière d’aujourd’hui. Et c’est peut-être cette troisième direction prise par ce roman très riche qui est la plus fascinante. Car elle permet de comprendre combien ces femmes restent dangereuses parce que différentes, combien leur combat reste actuel face aux mâles dominants et pourquoi elles restent victimes d’un ostracisme violent. Et à l’inverse d’intégrer une communauté, d’agréger toutes celles qui entendent s’émanciper des règles officielles. Doris Lessing, Christa Wolf, Ingeborg Bachmann vont ainsi cheminer avec Isabelle Sorente. Avec elles, la peur va peut-être pouvoir changer de camp et ouvrir le champ des possibles…
https://urlz.fr/dy78
« On ne dit pas chasse aux sorciers. Il existe une expression dans la langue française où le masculin ne l'emporte pas, c'est la chasse aux sorcières. C'est étrange, quand on y pense. »
Cette citation, tirée du début du livre, résume parfaitement à mon sens l'essence même de ce roman. Mais est-ce bien un roman quand on y regarde de plus près ? Certes, la couverture indique bien ce terme mais après l'avoir lu, et déjà en cours de lecture, je me dis que ce n'est pas totalement approprié, le terme d'autofiction se révélant bien plus juste, ce livre se trouvant à mi-chemin entre la fiction et l'essai, en sus d'une bonne dose d'autobiographie.
Isabelle Sorente, sous couvert d'une enquête historique sur les chasses aux sorcières ayant eu lieu dans nos contrées au cours des siècles derniers – à la Renaissance pour être plus précis – se raconte. Elle ou sa narratrice, un mix des deux certainement. Ouvrage empreint de féminisme, on ne va pas se mentir, la narratrice nous parle des brimades infligées aux femmes, exemples à l'appui, au cours des siècles, ayant pour conséquence d'être profondément ancrées dans la mémoire collective et d'influencer, de fait, les réactions et comportements des femmes à travers le temps. Comment des années de persécution à une époque si lointaine peuvent-elles encore avoir autant de répercussions chez la femme moderne d'aujourd'hui? A bien des égards, quoique dans une forme différente, ce livre m'a fait penser à celui de Clarissa Pinkola Estés, « Femmes qui courent avec les loups », qui trône sur ma table de chevet depuis plusieurs années et que je feuillette à l'occasion.
Car il s'agit bien ici de redonner sa nature première à la femme, soit lui permettre de (re)devenir une femme forte, indépendante et confiante.
Si vous cherchez une histoire de sorcières avec un début, un milieu et une fin, vous feriez mieux de passer votre chemin car c'est à un travail fourni et minutieux, fruit de nombreuses heures de recherches et de sueur, auquel vous aurez affaire ici. Car Isabelle Sorente, même si elle s’intéresse au genre humain au sens large, particulièrement aux femmes, s'adresse aussi avant tout à elle-même et à toutes les filles qu'elle a été, ainsi qu'aux femmes de sa famille. Un livre que l'on pourrait qualifier d'universel, certes, mais qui est aussi terriblement personnel. Elle parle de sa vie, de ses enfance et adolescence, des brimades subies, du harcèlement scolaire dont elle a fait l'objet, du travail psychanalytique de longue haleine débuté au début de sa vie active et poursuivi depuis. Une catharsis sous forme de témoignage(s)
J'ai trouvé le livre globalement très intéressant et riche en enseignements, même si j'ai pu le trouver parfois quelque peu confus voire fouillis, mon intérêt ayant légèrement décliné vers sa moitié, pour être ensuite reboosté par une dernière partie qui m'a beaucoup plu. Ce que je retiendrai avant tout ce sont les questionnements qu'il m'a obligée à me poser, je sentais alors comme une sorte de tiraillement au creux du ventre comme s'il avait – peut-être – touché un point sensible chez moi, en moi.
C'est un livre que beaucoup pourraient qualifier de « bavard », estimant que les tourments passés d'une adolescente devenue une adulte de presque 50 ans n'avaient plus lieu d'être. Pour ma part, j'estime que si elle a pu trouver des réponses à un mal-être récurrent, et ainsi pouvoir aider aussi d'autres personnes, c'est que son pari est gagné.
L'écriture est soignée mais reste abordable. Pour ceux qui auraient peur de se lancer dans ce genre d'ouvrage, vous pouvez le lire comme le récit d'une personne qui vous rapporterait un témoignage. La compréhension reste fluide malgré les quelques digressions.
En résumé, un livre qui fait réfléchir, riche en recherches historiques, et qui amène une réflexion intéressante et intelligente sur la sorcière qui se trouve en chacun de nous. Un livre sur la mémoire familiale, les secrets que nous portons en nous, parfois de manière intergénérationnelle sans en avoir conscience. Plusieurs courants de pensée (psych)analytiques sont représentées, libre à chacun d'approfondir le sujet, ou pas. Pour ma part, je ne sors pas totalement indemne de cet ouvrage, la réflexion demeure après avoir tourné la dernière page. Et une question me hante : chaque femme n'est-elle pas, après tout, une sorcière comme les autres ?
Voilà un inclassable qui tient plus de l’essai et de l’autobiographie que du roman dans lequel il a été catégorisé. Il faisait partie de la sélection pour le Prix Orange du livre de lecteurs.com.
Alors qu’elle emménage avec son conjoint, l’auteure commence à avoir des visions : une sorcière dans une prison. Elle entame alors des recherches sur ce thème et tente de répondre à la question suivante : que reste-t-il reste de la chasse aux sorcières dans l’inconscient collectif ? Isabelle Sorente s’appuie pour cela sur la théorie sur la transmission transgénérationnelle des traumatismes et de la souffrance non-dite d’Anne Ancelin. C’est passionnant !
Dans le reste du livre, elle revient sur son adolescence de souffre-douleur et explore la notion du complexe de la sorcière. Quel rapport entre la sorcière torturée et la jeune fille harcelée ? Je vous laisse le soin de le découvrir. Isabelle Sorente aborde aussi les rapports amoureux sous l’angle de la relation sorcière/inquisiteur…
Dans la première partie j’ai appris pas mal de choses sur le thème très en vogue de la sorcière (note pour plus tard : lire l’essai de Mona Chollet) mais le lecteur peut être dérouté par le tournant autobiographique. Pour ma part, j’ai trouvé ce témoignage nécessaire et en tant que parent je veillerai le moment venu à ce que ma fille ne fasse partie ni des victimes ni des bourreaux du harcèlement scolaire.
La narratrice, la quarantaine, est poursuivie par la vision d’une sorcière. Intriguée, elle se lance dans une recherche documentaire sur les persécutions dont furent victimes quantité de femmes en Europe au prétexte de sorcellerie. Simultanément, lui reviennent en mémoire de douloureux souvenirs de son adolescence, traumatisée par plusieurs années de harcèlement scolaire.
Dès les premières lignes s’installe le sentiment de parcourir un récit autobiographique, mêlé à une réflexion sur l’hypothèse d’un lien entre une expérience de harcèlement vécue par la narratrice, et les traces qu’aurait laissées la persécution des sorcières, autrement dit des femmes, dans nos esprits modernes.
J’aurais bien aimé profiter davantage des investigations de l’auteur sur le thème des chasses aux sorcières, et trouver dans ce livre une analyse plus aboutie et mieux argumentée de ce qui a les a motivées. Sur ce point, j’avais trouvé bien plus intéressant l’épilogue de la trilogie des Dames de Brières de Catherine Hermary-Vieille : alors oui, les sorcières ont été inventées par peur de la différence et par volonté de soumettre les femmes trop indépendantes au pouvoir masculin et religieux.
Et oui, peut-être peut-on, à la rigueur, y voir une vague similarité avec les processus actuels de rejet de la différence au travers du racisme, de l’homophobie, de la misogynie, du harcèlement : la différence n’est toujours pas comprise ni acceptée de tous, elle génère encore des comportements violents et de la persécution.
Mais de là à affirmer, sans autre argument qu’une vision persistante, que nos comportements actuels sont inconsciemment influencés par les chasses aux sorcières vieilles de quatre siècles, qu’au travers de l’épigénétique nous en avons tous hérité un traumatisme qui impacte nos comportements, qu’en l’homme sévit un inquisiteur en puissance et que les femmes sont désormais conditionnées au rôle de victimes brisées psychologiquement, ce qui expliquerait le harcèlement subi par la narratrice adolescente, il y a un raccourci qui prête presque à rire.
Les souffrances et les séquelles psychologiques de la protagoniste du livre, son douloureux parcours vers la reconstruction au travers d’une longue psychanalyse, ne peuvent qu’émouvoir et éclairer la nécessité de rompre le silence qui entoure encore souvent les drames du harcèlement, aujourd’hui démultipliés par les réseaux sociaux. L’on comprend le mal-être de l’adulte qui a dû se construire sur cette blessure, mais l’on s’inquiète de le voir s’accrocher à ce qu’on pourrait qualifier d’élucubrations, pour tenter de parvenir à l’équilibre. La narratrice s’intéresse à toutes les théories d’analyse psychologique, dont notamment les très récentes épigénétique et psychogénéalogie, et à toutes les pratiques de développement personnel à la mode, dont la méditation et les retraites sous la férule d’un maître zen. Elle semble avoir tiré de sa quête un étrange salmigondis de convictions parfois fantaisistes qui, à défaut de réalisme, l’aideront peut-être à vivre mieux.
En tous les cas, ce livre singulier construit sur des raccourcis hasardeux me paraît avoir pour principal intérêt le sujet du harcèlement et des durables blessures psychologiques qu’il occasionne, bien plus que les histoires de sorcières abordées sous un angle à mes yeux trop fantaisiste.
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