"Tout à la fois roman biographique et méditation sur les mystères du génie créateur, La Splendeur est le récit de la vie de Girolamo Cardano, célèbre médecin, astrologue, savant, mathématicien et inventeur qui évolua aux côtés des plus grands, de Charles Quint à Ambroise Paré. Féru de rêves et...
Voir plus
"Tout à la fois roman biographique et méditation sur les mystères du génie créateur, La Splendeur est le récit de la vie de Girolamo Cardano, célèbre médecin, astrologue, savant, mathématicien et inventeur qui évolua aux côtés des plus grands, de Charles Quint à Ambroise Paré. Féru de rêves et de songes prophétiques, Cardano (Jérôme Cardan en France) prétendait posséder son propre “démon” personnel, lequel nourrissait amoureusement son esprit de traités mathématiques et de prédictions astrologiques. C’est à ce malicieux génie tutélaire, incarnant l’étrangeté et le mystère qui entourent la fulgurance de l’inspiration, que Régine Detambel, bousculant ainsi les codes du genre biographique, a choisi de confier le récit de la difficile ascension et de la chute d’un homme hors du commun."
Girolamo Cardano est sans contexte un personnage éminemment romanesque, archétype de l'humanisme et incarnation de l'esprit libre. Il inspira les libertins du 17ème siècle, intrigua les encyclopédistes, Pascal et Rousseau, et suscita l'intérêt de Nerval, Balzac ou encore Paul Valéry. C'est à lui aussi que l'on doit la résolution des équations du troisième degré (même si cela fut réalisé de façon pour le moins aventureuse, quelque part entre "la mystification et le plagiat", comme un certain nombre de grandes découvertes...). Et pourtant, qui se souvient aujourd'hui de Girolamo Cardano ? Il faut bien reconnaître que le savant et astrologue célèbre de la Renaissance était totalement tombé dans l'oubli, l'un de ces maux terribles de l'existence que le romancier aime à combattre. Régine Detambel ressuscite donc dans son roman cet esprit libre, cette incarnation quasi parfaite de l'homme de la Renaissance, fait de paradoxes et de mystères, tout à la fois médecin-mathématicien converti aux lumière de la raison et astrologue adepte de l'occultisme capable de funestes prédictions... Bien qu'éminent savant, Cardano était aussi fantasque et imprévisible, le symbole même de cette étrange confusion de rigueur scientifique et de fantasmagorie, si répandue dans les milieux intellectuels européens de la Renaissance. L'auteur s'applique d'ailleurs à poser parfaitement ce contexte historique où coexistent les extrêmes. C'est à la fois l'époque des découvertes, des observations scientifiques, médicales, astronomiques, géographiques et celui des massacres, des pillages, de l'Inquisition et de l'obscurantisme. L'époque aussi où science et magie s'accordent sans difficulté, paradoxe qu'illustre parfaitement Cardano.
Pour écrire cette biographie – qui n'en est pas vraiment une – d'un personnage aussi extravagant, Régine Detambel a choisi de l'installer au cœur d'une fiction baroque et singulière, et surtout de donner la parole au "démon" familier qui l'habite, sorte de (mauvais ?) ange gardien qui influe sur ses décisions, ses actions, ses pensées. Cardano le définit ainsi : "Il fait une sorte d'île de mon esprit, il me donne une sensibilité incroyable, mon cerveau fourmille, mon démon est en quelque sorte une zone de mon cerveau qui sait tout et comprend tout, il peut saisir une pensée dans tous ses échos à la fois, toutes ses ramifications..." Il se pourrait bien aussi qu'il soit le visage de l'inspiration, "cet étranger en nous, si changeant, tour à tour candide et ténébreux, parfois lumineux et parfois dépravé. On sent bien qu’il existe et alors on n’est plus maître de ses chemins d’écriture"…
Redécouverte et réhabilitation de Girolamo Cardano, La Splendeur est aussi un hommage enthousiaste aux fulgurances de la pensée en mouvement – dans sa fécondité comme dans sa folie fantasmagorique...
"Ces explosions de pensée, Girolamo les nomme splendeur. La splendeur est ce travail hallucinant, ces fulgurances, comme des navettes qui vont et viennent à chaque poussée du front, on noue par milliers les fils du raisonnement. En même temps chaque fois nouveau, intense, un sentiment de supériorité comme une preuve d'élection. Splendeur, félicité suprême..."