Michèle et Anne ont lu "Celle que vous croyez" de Camille Laurens (Gallimard)
C'est l'histoire de Claire Millecam, une femme de 48 ans, professeur, divorcée, qui crée un faux profil sur Facebook : celui d'une jeune femme de 24 ans, nommée Claire Antunès, qu'elle accompagne de la photo d'une jolie brune qui n'est évidemment pas la sienne. Pourquoi fait-elle cela ? A l'origine, pour tenter d'avoir accès aux informations de Jo, son amant épisodique, fuyant et inconstant. Comme Jo n'accepte que des gens qu'il connaît personnellement, Claire, sous sa fausse identité, fait une demande d'amitié à son plus proche ami, Chris, 36 ans, espérant glaner ainsi des renseignements sur Jo. Chris l'accepte tout de suite comme amie, et commence alors un échange de messages qui se transforme peu à peu en liaison amoureuse. Liaison virtuelle, évidemment, puisque la belle Claire Antunès est une invention, un fake. Mais Claire, elle, a cessé de s'intéresser à Jo, elle est maintenant amoureuse de Chris, et lui d'elle - enfin, de la belle inconnue dont il admire la photo de profil. Ils tchattent presque tous les jours, se téléphonent longuement, et elle ne sait plus comment faire pour éluder les demandes pressantes de Chris qui voudrait la rencontrer « en vrai », IRL, in real life. Elle s'invente un métier prenant, des voyages professionnels, des empêchements divers et même un compagnon jaloux. Ils sont de plus en plus amoureux, la situation devient intenable. Claire est déchirée entre l'impossibilité de cet amour (elle ne peut se résoudre à lui avouer qu'elle a 12 ans de plus que lui et non 12 de moins) et la douleur de devoir y renoncer. Il lui faut donc trouver un moyen pour que l'histoire d'amour virtuelle devienne malgré tout réalité.
Celle que vous croyez interroge la question du désir féminin en lien avec le temps qui passe, et dresse, plus généralement, un panorama de l'amour au temps des réseaux sociaux. Facebook permet en apparence de s'exposer publiquement, de se livrer à des confidences, mais surtout de mentir, de s'inventer une autre vie, entraînant une fictionnalisation de soi-même, mélange de naïveté sentimentale et de perversité manipulatrice qui n'a rien à envier aux nouvelles et romans libertins du XVIIIe siècle.
Michèle et Anne ont lu "Celle que vous croyez" de Camille Laurens (Gallimard)
Camille Laurens publie "Celle que vous croyez" (Gallimard) un grand roman sur la passion à l’heure de Facebook
Avis issu de : https://hanaebookreviews.wordpress.com/2019/05/09/celle-que-vous-croyez-camille-lorens/
Une femme passée la cinquantaine est-elle une denrée périmée ? Doit-elle renoncer au désir et à la séduction ?
A l’aube de la cinquantaine, le doute assaille Claire Millecam, divorcée, agrégée et maitre de conférences : doutes sur son pouvoir d’attraction, doutes sur son droit au désir et doutes sur la fidélité de son amant, Jo.
« Va Mourir », ordre qu’on lui aboie au téléphone un soir où elle s’enquiert des nouvelles de son amant, tonne dès la première partie. Outre les injustices faites aux femmes du monde (excision, lapidation, immolation forcée), Claire s’insurge sur les diktats d’une société où les désirs masculins imposent à la Femme de dépendre du regard des hommes et la désinhibent de toute sexualité passé cinquante ans ; elle devient indésirable, maudite, pestiférée, seule et esseulée de désir jugé écœurant.
C’est ce doute oppressant et cette violence sociétale qui poussent Camille à passer à l’acte.
Internée dans un hôpital psychiatrique, elle confie à son psy le bouleversement amoureux et identitaire qui a découlé de Facebook. A travers ce réseau, Claire Millecam devient Claire Antunès, brunette de 24 ans à la jeunesse désirable et à l’âme artiste.
Souhaitant se renseigner sur son amant pervers qui l’use et l’abandonne quand ça lui chante, elle ajoute Chris, le copain de Jo, pour ami. Mais voulant surveiller l’amant, Claire Antunès séduit l’ami.
Ce jeu de miroirs grisant se brouille, l’ombre de Claire M. se reflète dans Claire A. et la séduisante brunette se fond dans la femme mûre.
Internet est le théâtre d’un jeu de rôles où les amants se perdent dans leur imaginaire jusqu’à oublier leur réelle identité.
Comme le suggère le titre qui rappelle l’illusion, la duperie et l’usurpation d’identité, l’issue que l’on croit être n’est jamais « celle que l’on croit » et, comme Claire se perd à travers la toile, le lecteur est balloté entre réalité et fiction.
A la première partie se succèdent d’autres scénarii aux points de vue différents et aux modes de narrations propres à chaque personnage.
La deuxième partie, «Une histoire personnelle», introduit Camille Morand, auteur de Va mourir !, écrivaine en quête d’inspiration perpétuelle qui anime un atelier d’écriture en clinique psychiatrique.
A travers ce personnage, C. Laurens fournit une réflexion sur l’écriture et établit un parallèle entre le personnage fictif crée par Claire pour subsister et la nécessité d’écrire pour survivre.
Le psy, l’ex-mari de Claire, Camille Morand ; l’auteur brouille les pistes en introduisant différentes perspectives et le cerveau du lecteur est en totale ébullition.
Ne craignez pas de vous perdre dans cet échiquier car la maitrise parfaite de l’auteur vous entrainera. La construction est ingénieuse, les récits s’enchainent avec souplesse, les phrases sont éclatantes de beauté et chaque partie du livre utilise son propre style.
Si Claire est lâchée par les hommes, l’auteur s’attache à ce que le lecteur ne la lâche jamais : le roman ne m’a pas quittée et j’en ai savouré chaque mot.
Si la fiction autorise certains termes provocateurs, les faits ressentis, la rage des femmes et l’injustice qui leur est faite sont réels.
Il y a de l’humour, de la drôlerie, du grave et de la douleur dans le roman.
Comme pour un essai, les références culturelles sont nombreuses et pertinentes. J’ai reconnu Laclos, Margueritte Duras ou Flaubert et ai découvert Michelangelo Antonioni (« L’amour c’est vivre dans l’imagination de quelqu’un »).
En convoquant ces grands noms, C. Laurens adapte les thèmes du désir, de la séduction et de la manipulation à l’ère de son temps et, alors que les lettres servaient de média aux Liaisons Dangereuses de Laclos, le virtuel des réseaux autorise aujourd’hui le flirt et la manipulation.
Laissez-vous prendre au piège de la toile que l’auteur tisse habilement et pénétrez ce théâtre virtuel où les personnages sont « tantôt l’araignée, tantôt le moucheron« .
Qu’il m’est difficile de ne sélectionner qu’UN extrait :
« Nous sommes tous dans les fictions continues de nos vies, dans nos mensonges, dans nos accommodements avec la réalité, dans notre désir de possession, de domination, de maîtrise de l’autre, nous sommes tous les romanciers en puissance. Nous inventons tous notre vie. La différence, c’est que moi, cette vie que j’invente, je la vis. Et que, comme toute créature, elle » échappe à son créateur. Tu vas dire, si tu es mal luné, que je ne la vis que pour pouvoir l’écrire, que la vie n’est qu’un prétexte à l’écriture. Mais c’est tout le contraire. La vie m’échappe, elle me détruit, écrire n’est qu’une manière d’y survivre – la seule manière. Je ne vis pas pour écrire, j’écris pour survivre à la vie.
Je me sauve. Se faire un roman, c’est se bâtir un asile. »
Claire, 48 ans, après avoir créé le faux profil d’une jeune femme de 24 ans sur facebook et être tombée folle amoureuse d’un homme de 36 ans, se retrouve devant un psychologue pour raconter son histoire et jusqu’où cela l’a amené.
L’histoire nous dit vite qu’elle est internée dans un hôpital psychiatrique. Que s’est-il passé ? Qu’a-t-elle fait ?
Doutant de ce qu’elle lui raconte, le psychologue qui la suit, va creuser un peu et croyant bien faire va commettre l’erreur de lui révéler des choses qu’il n’aurait pas dû.
***
J’ai aimé ce livre mais je n’ai pas saisi si il y avait 1 ou 2 histoires… je n’ai pas compris le lien ou pas entre la partie 1 et la partie 2… Entre les 2 parties ce n’est pas la même histoire, la base est la même mais pas la suite… Bon, si je prends ces 2 parties de façon indépendante, j’ai aimé les 2 versions.
Le personnage de Chris, homme de 36 ans est plus détestable dans la 2ème version que dans la 1ère. Celui de Claire, héroïne de l’histoire est plus agréable et touchante dans la 1ère partie. Dans la 2ème elle est carrément idiote de se faire autant prendre pour une imbécile…
Je ne sais pas quelle version le film qui sort au cinéma aura développé (des différences semblent déjà concerner l’âge de l’homme dont Claire tombe amoureuse puisqu’il a l’air très jeune alors que dans le livre il a 36 ans. De même, le séduisant psychologue du livre est devenu une femme dans le film...).
Un livre plaisant sur 2 thèmes principaux, les femmes en mal d'amour et les réseaux sociaux et leurs éventuelles dérives
Roman intelligent , brillant, incisif, surprenant et original ; avec une belle écriture captivante.
Tout débute sur le doute , à l'aube de la cinquantaine, Claire, divorcée doute de son pouvoir de séduction, le doute déferle en elle et elle se met à douter de la fidélité de son amant. Pour le tester, elle décide de s'inventer un profil Facebook,objet de ses fantasmes . Et Claire devient Claire , 24 ans brune et désirable ; prise à son propre piège, en surveillant son amant , elle tombe amoureuse de Chris le meilleur ami de celui ci. Jeux de miroirs , Claire prend le pas sur Claire et devient l'idéale féminin parfait de Chris dont Claire est tombée amoureuse, tout en sachant que lui c'est de son double virtuel dont il est lui amoureux.
Le roman enfourche les diktats sur la séduction, le désir passé un certain âge. Il aborde la fuite du temps, les sentiments amoureux, le désir absolu d'une femme de vivre dans un monde où l'injustice lié au sexe existe. Il ouvre une réflexion sur les relations réelles/virtuelles qu'on peut entretenir sur le net
Ce récit très original d'une femme de 50 ans en prise avec son age et sa volonté d etre encore aimée ou simplement désirée est proposé par l'auteur avec plusieurs options Quelle est l'option à retenir ? ou est la réalité ? c'est ce qui rend ce livre très interessant et agréable à lire.
Dans la catégorie roman qui vous retourne l’esprit et qui prend à malin plaisir à vous dérouter, je voudrais « Celle que vous croyez ». Dans le but de nous égarer, Camille Laurens utilise plusieurs profondeurs de plans dans cette histoire de relations amoureuses compliquées. Elle alterne entre différents modes de narration, différents points de vue qui apportent leurs lots de révélations. Elle adapte le style de son écriture selon qu’il s’agisse d’un entretien avec un psychologue, d’une version romancée des faits ou d’une lettre à un éditeur. On est alors balloté entre fiction, fiction dans la fiction et réalité. On ne sait plus où donner la tête. Au fil des informations que l’on récolte, les personnages prennent des identités diverses, les scènes s’inspirent les unes des autres et la vérité se dessine progressivement.
Vous devez vous dire que tout ce méli-mélo doit être déstabilisant et difficile à appréhender. Ce serait vrai s’il n’était parfaitement maîtrisé. Même si le cerveau est mis à rude épreuve, les récits s’emboîtent à merveille. Je suis resté en perpétuel équilibre, dans le flou jusqu’au dénouement final, sans jamais perdre le fil. C’est très bien construit et d’une grande efficacité.
En plus de nous offrir une histoire troublante, Camille Laurens en profite pour passer des messages subliminaux. La condition de la femme est au centre de son drame. Elle nous parle de ses désirs et de ses ambitions mais aussi du regard que l’on porte sur elles à partir d’un certain âge. Leur place dans la société change et le jugement des autres devient moins indulgent.
Vous avez donc compris que j’ai pris beaucoup de plaisir à me perdre dans ce labyrinthe de personnalités. Ce livre se lit rapidement malgré sa complexité et c’est parfois agréable de se creuser les méninges, en toute simplicité. Belle première rencontre avec cette auteure !
L’entrée en matière du roman vous fait tout de suite entrer dans le bain. Un prologue sans ponctuation où la voix d’une femme s’élève. Pourquoi une femme, une fois dépassée la cinquantaine, est-elle considérée comme périmée, transparente ?
« les hommes mûrissent les femmes vieillissent »
C’est à partir de ce cri d’alarme que commence l’histoire de Claire. En conséquence des faits mentionnés dans la quatrième de couverture, Claire est en hôpital psychiatrique. À la manière d’un monologue, elle raconte son histoire au docteur Marc. Comment elle s’est faite passée pour une autre, comment elle a manipulé cet homme plus jeune qu’elle, comment elle a perdu pied.
Derrière l’histoire de Claire, une romancière intervient. Camille.
En ouvrant ce livre, j’ai fait la connaissance d’une femme de quarante-huit ans, qui refuse de renoncer au désir parce que la société l’aurait décidé à sa place. À l’ère des réseaux sociaux, elle tente le tout pour le tout, faire naitre le désir d’un homme alors qu’il ne l’a jamais vu. Mais ce n’est pas qu’une histoire de flirt, puisque Camille Laurens ne cesse de nous manipuler. D’un chapitre à l’autre, les points de vue diffèrent, les événements se modifient, on ne sait plus qui est le maître du jeu. Et alors quand l’écrivain prend la parole, on ne sait plus ce qui tient pour vrai.
L’architecture de ce roman est addictive. Chaque page tournée et l’envie de connaître l’issue de cette histoire m’a envahie. J’ai adoré être ballottée de certitudes en certitudes et voir le château de cartes s’effondrer. Les réflexions de l’auteure sur l’amour et le désir, quoique parfois ardues à comprendre pour ma part, ont été tellement intéressantes que je pouvais rester plusieurs minutes sur une même page.
Celle que vous croyez est un roman prenant. Malgré une différence d’âge importante entre le personnage principal et moi-même, le constat fait sur le devenir des femmes après un certain âge ne peut laisser indifférent.
C'est l’histoire de Claire Millecame, une femme délaissée qui bientôt tombera dans la cinquantaine et qui n'en a pas terminé avec le désir et la séduction, malgré ses rides et ses angoisses existentielles.
Le récit est remarquablement bien construit, sur fond de réseaux sociaux, qui à la fois,dévoilent de façon impudique la vie de Claire, tout en en cachant l'essentiel, sa difficulté à garder le cap coûte que coûte.
Par tous ces aspects, le livre est vertigineux et nous entraine dans une addiction de lecture que, souvent, seuls les romans policiers sont capables de nous provoquer.
S'ajoute à toutes ces raisons, la nervosité de l'écriture, le kaléidoscope des émotions qui se déchainent et cette soif d'absolu maitrisée, pour faire de "Celle que vous croyez" de Camille Laurens l'un des meilleurs romans 2016, sur la difficulté toujours plus âpre, d'accepter d'être une femme mûre dans un monde où l'image est omniprésente et érigée comme valeur absolue.
Pour surveiller son jeune amant Jo qui la mène en bateau, Claire Millecam, la cinquantaine crée un profil fictif sur facebook, elle garde son prénom, s’invente des origines portugaises, et allège le poids de ses années. Ainsi Claire Antunès, 24 ans, approche KissChris, un copain de Jo chez qui il vit. Photographe, amateur de jolies filles, Christophe craque vite pour Claire la douce qui se prend au jeu jusqu’à en oublier les raisons de cette imposture. Lui, très amoureux, veut la rencontrer mais Claire réussit à le maintenir à distance en s’inventant des déplacements professionnels puis un petit ami envahissant et jaloux. Mais KissChris insiste, il le sait, ils sont faits l’un pour l’autre. Claire hésite, le quitter, lui avouer la vérité au risque de le perdre, la situation est inextricable, cet amour impossible.
Ça c’est la première partie racontée par Claire Millecam à Marc, le psy de l’hôpital où elle est internée, et pour moi, ça commence plutôt bien, avec une histoire intrigante dans l’air du temps même si j’ai trouvé un peu trop caricaturales les réflexions féministes sur les femmes de 50 ans « périmées », perdues pour l’amour (j’en connais plein qui, loin d’être perdues, l’ont enfin trouvé !)
Puis vient l’audition du fameux docteur Marc qui nous donne lecture d’un texte intitulé Les fausses confidences de Claire Millecam, la même histoire ou presque, dont la fin très différente aurait été écrite par on ne sait qui.
Et enfin, le brouillon d’une lettre dans laquelle l’auteur, prénommée Camille, explique à son éditeur pourquoi elle a écrit cette histoire, qui encore une fois diffère des précédentes, tout en restant suffisamment proche pour nous embrouiller.
Je vous épargne l’épilogue où il est question de Paul Millecam, le mari et de Katia, la nièce supposée suicidée dans la première fin puis ressuscitée dans la deuxième, qui a ajouté à ma grande confusion. Malheureusement à trop vouloir brouiller les pistes, Camille Laurens m’a perdue en route.
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