Découvrez les auteurs, autrices et libraires qui accompagneront le président du jury Jean-Christophe Rufin !
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Le jury de la 16e édition, présidé par Jean-Christophe Rufin, a délibéré
J’aurais pu, c’était pas malin faire avec lui un bout de chemin
Un concertiste apprend le décès de son père, il revient à Trappes et se souvient.
Enfant lorsqu’il a préféré faire ses gammes alors que les autres enfants allaient jouer au foot, son père la soutenu et fait des heures supplémentaires pour les cours et le piano.
« Il a fallu qu’il meure pour que je revienne. »
Rachid Benzine nous entraîne dans un voyage pudique et lumineux, qui nous interroge tous sur ce que nous savons de nos parents.
À toutes les étapes de notre vie ils sont là comme une évidence, immuables, mais pas immortels.
Plus de vingt ans que le fils et le père ne s’étaient pas vus à la suite d’un drame et au silence du père incompréhensible.
En vidant l’appartement le fils va trouver des cassettes audio qui vont révéler qui était cet homme.
Le fils part sur les traces du père.
Au fur et à mesure que le voile se lève le lecteur comprend pourquoi cet homme était taiseux.
« Parce que les vieux comme ton père ils ont voulu que les souffrances, tout ce qu’ils ont subi, s’arrêtent avec eux. Ils voulaient vous en préserver. Pour que vous soyez libres de réussir votre vie, sans rancœur, sans amertume. »
La narration sera un fil tendu entre « le dégoût pour le silence de l’immigré qui ne veut pas faire de vagues » et la compréhension de ce taiseux. Un portrait se dessine le taiseux était un homme délicat, digne, courageux qui a toujours assumé sa vie sans nuire aux autres. Il a toujours aidé les plus faibles les moins bien lotis, sans se mettre en scène encore moins devant ses enfants.
Ahmed Chehlaoui a toujours le meilleur pour tout le monde.
« J’aimerai bien qu’il soit près de moi papa. »
Une plume délicate qui donne de la voix.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2024/09/30/les-silences-des-peres/
Rachid Benzine conte remarquablement l’histoire d’un fils qui revient, à la mort de son père, et refait le parcours de vie de cet homme, un taiseux, ouvrier marocain recruté par les Charbonnages de France, au début des années 1960.
Ce fils, Amine, le narrateur, est un fameux pianiste qui n’a plus entretenu de liens avec son père depuis qu’il mène une carrière internationale. Lorsqu’il vide l’appartement familial, à Trappes, il découvre par hasard, caché sous la baignoire, une grosse enveloppe contenant des cassettes audio. Son père, pour communiquer avec le grand-père d’Amine resté au Maroc, enregistrait son message puis le postait. Ces lettres audio débutent toutes par « Mon cher père »…
Ce sont ces lettres audio, une quarantaine, qui servent de trame à la quête émouvante du fils. Le magnétophone faisant partie du lot, commence alors un retour en arrière que je trouve haletant, d’abord à Lens où Algériens, Tunisiens, Yougoslaves, Polonais, Africains et Marocains descendaient à mille mètres sous terre pour extraire la houille, ce fameux charbon pour l’industrie et principal source de chauffage à l’époque.
Passage très fort, le recrutement, dans le sud marocain par un certain Félix Mora : c’est un véritable marché aux esclaves. Ceux qui sont recrutés ne le savent pas mais ils vont remplacer les grévistes, connaître des conditions de vie indignes et s’astreindre à un travail de forçat.
Ainsi, les rencontres s’enchaînent. Driss d’abord puis Boualem, dit le Rouge car militant à la CGT. C’est un extraordinaire hommage à son père qu’entend Amine et cela continue à la cimenterie d’Aubervilliers où la seule amélioration consiste en une douche chaude !
Placé en prologue et en épilogue, le narrateur parle de Keith Jarrett et de son fameux concert « raté » donné à l’opéra de Cologne pour une heure d’improvisation en solo, après un rappel des mille cinq cents spectateurs. Enregistré par un technicien, la performance se vendit à quatre millions d’exemplaires et une cassette avait été acquise par le père d’Amine.
Ainsi, la musique est très présente dans ce roman car le père du narrateur collabore un temps avec Noureddine, producteur de musique orientale. Le concert d’Oum Kalthoum, à l’Olympia, en 1967, reste aussi un grand moment dans la vie de cet homme qui se retrouve ensuite chez Lip, à Besançon, puis dans le Gard comme ouvrier agricole. Juste avant de quitter le Doubs, Louis Martin, Grand Martin, lui parle de Paulette, le grand amour…
Toujours très respectueux vis-à-vis de son père, le père d’Amine essuie un terrible refus. Cela donne quelques passages mêlant franchise et émotion jusqu’au bout du roman. Dans le Gard, c’est la rencontre avec les Harkis, ces Algériens ayant servi dans l’armée française, qui apporte un autre élément important dans la vie d’un homme toujours au service des plus faibles. C’est là qu’il acquiert une mobylette Peugeot 103 rouge qui … mais je n’en dis pas plus avant que Saint-Malo ne précède le retour à Trappes.
Les silences des pères que ce soit celui resté au Maroc ou celui travaillant dur en France, est un roman nécessaire que Rachid Benzine dédie d’ailleurs au sien, Hadj Driss Benzine. C’est l’occasion de ne jamais oublier une époque pas si lointaine et de relier tout cela à ce que nous vivons aujourd’hui avec ces travailleurs venus de loin pallier les manques de notre société et que certaines lois décident, sans vergogne, de renvoyer d’où ils viennent.
Les silences des pères fait partie des huit livres retenus pour Le Prix des Lecteurs des 2 Rives 2024.
Chronique illustrée à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2024/01/rachid-benzine-les-silences-des-peres-4.html
Un roman que j'ai découvert lors de la rentrée littéraire 2023.
Amine notre protagoniste après s'être éloigné de son père depuis bien longtemps va découvrir beaucoup de chose après le décès de ce dernier. Grâce au enregistrement que son père a fait Amine découvre les non dits, le passé, le quotidien , une quête entre le Maroc et la France.
Une plume sensible, émouvante qui parle d'immigration, de filiation, de la société française lors des trente glorieuse avec une France ouverte à la main d'oeuvre étrangère.
Une intrigue à la fois lumineuse, triste, qui parle de culpabilité, de sacrifice, d'amour, d'intégration, un récit poignant, percutant, juste et sensible. Un bon moment de lecture.
Qu’est-ce qui peut expliquer un tel silence, justifier toutes ces années de mutisme qui mettaient tellement en colère Amine ?
Ne trouvant pas de réponse à cette question, le jeune homme quitte sa famille plein d’amertume pour voler de ses propres ailes, entre au conservatoire, part faire des études de musique aux Etats-Unis et devient un grand pianiste.
Mais quand, 22 ans plus tard, son père décède, il laisse de côté ses concerts pour partir sur les traces de cet homme dont il ne sait rien.
Au fil des rencontres avec ses complices d’autrefois, il reconstitue sa vie depuis son arrivée du Maroc jusqu’à sa mort à Trappes. Et avec le parcours de cet immigré arabe, c’est toute l’histoire de l’immigration des Trente Glorieuses que retrace Rachid Benzine dans ce beau roman social.
Il nous dévoile un parcours tortueux qui le conduisit à travers toute la France au fil des emplois. Gueule noire dans les mines de charbons, gueule grise dans les cimenteries, travailleur à la chaîne en usine ou ouvrier agricole dans des fermes, cet homme mélomane et syndicaliste, a vécu mille vies de misère mais a aussi connu l’amitié et l’amour.
Lorsqu’il fonda finalement une famille, le silence fut son choix. Celui de ne pas raconter, de ne pas faire porter à ses enfants un fardeau de rancœur qui aurait entravé leur vie et les aurait entraînés dans une révolte destructrice. Car si son exil fut une malédiction, il se refusa de parler du sacrifice qu’il fit en toute conscience, afin de préserver leurs chances de réussite.
Avec ce voyage de mémoire, Amine comprend que ce qu’il prenait pour de la lâcheté, du renoncement, était un cadeau que ce père leur faisait à eux, les enfants de la deuxième génération.
Dans son roman, Rachid Benzine, comme Milan Kundera, raconte sans juger, sans analyser, juste pour dire : voilà, cela s’est passé comme ça, faites-vous votre propre idée, il n’y a pas de morale autre que la votre. Tout ce que j’aime.
Je ne peux que recommander ce roman sensible et tout à fait passionnant.
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