"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un autre petit bijou noir écrit par la plume acérée, cruelle et tendre de Pascal Garnier qui va chercher le quotidien de personnages ordinaires et les faire déraper jusqu’au bord du gouffre avec un plein de rebondissements rocambolesques et une écriture graphique très imagée.
Pascal Garnier va faire un croche-pied à Fabien, son personnage assez mesquin, emprisonné dans une vie étroite et sans saveur.
Fabien est un homme jeune sans ambition, porté par le train-train quotidien d’un citadin chômeur professionnel marié avec Sylvie avec qui il entretient une relation qui tient plus de l’habitude et de la commodité que de l’amour jusqu’à ce que la police l’appelle pour lui annoncer la mort de sa femme, trouvée dans une voiture accidentée en province, en compagnie de son amant lui aussi tué sur le coup.
Ça ne va pas vraiment émouvoir Fabien qui se trouve soudainement libéré et libre de retrouver une vie de vieil ado avec son copain chez qui il va habiter, boire, fumer des joints et construire des jeux LEGO toute la sainte journée.
Le copain est divorcé, a un enfant en garde alternée et reçoit souvent la visite de son épouse qui ne cesse de le rappeler à ses responsabilités.
Dans l’esprit étroit de Fabien, soudainement naît l’idée de changer de vie mais aussi de se venger de son épouse et son amant. Il va retrouver la veuve de ce dernier et ce sera un délire issu de l’imagination vaste et talentueuse d’un Garnier pur jus à découvrir car la suite réserve moult surprises et il serait dommage de les dévoiler ici.
Étonnamment visuelle, l’écriture est proche du croquis et de la caricature avec toute l’intelligence du cœur mis au service d’une observation humaine sans faille au ton caustique qui ne laisse rien passer à ces personnages qu’on peut parfois rencontrer autour de nous ou qui peuvent faire l’objet de faits divers dans les journaux.
A chaque livre, je me fais embarquer dans l’univers très spécifique de cet auteur talentueux au style si particulier dont l’œuvre abondante a été saluée par l’ensemble de la critique littéraire.
Roman court et serré comme un café fort où les âmes se perdent au fond du filtre.
Un autre petit bijou noir et ciselé signé Pascal Garnier.
Avec une plume acérée, l’auteur décrit Éliette, jeune retraitée et jeune veuve, comme une femme qui refuse le repli sur elle-même. Elle vend son logement parisien et va s’installer dans sa maison secondaire en Ardèche, loin de ses enfants étouffants.
Au bout d’un moment, malgré la pseudo-amitié que le couple de la ferme voisine lui porte, entre jardinage, cuisine et lecture, la solitude lui pèse et elle pense qu’après tout, un compagnon serait bienvenu.
Le hasard fait bien les choses. Alors que sous une pluie battante, elle tombe en panne avec sa voiturette en revenant de ses courses à l’hypermarché de Montélimar, elle croise un quadragénaire, portant une mallette à bout de bras, marchant à pied sur la route et qui l’aide à changer son pneu crevé en rase campagne. Il lui raconte qu’il est lui-même tombé en panne et après présentations, Éliette invite chez elle Étienne pour appeler un garagiste, se sécher et boire un café.
En quelques mots si simples, l’image du bonheur surgit.
Mais voilà… L’homme a menti. La voiture volée est tombée en panne sèche et de plus, ce très sympathique Étienne a 2 kilos de coke dans sa mallette.
Les événements vont s’enchainer en s’emballant les uns derrière les autres, plus forcés que dans d’autres romans de l’écrivain, et qui m’ont donné l’impression d’une succession d’images pour une aventure en accélérée.
Toujours est-il qu’un furieux polar va débuter sur les chapeaux de roues sans oublier les thèmes chers à Pascal Garnier quand il s’agit du quotidien de gens naïfs et ordinaires pris dans les rets du hasard en traitant ici magistralement bien le sujet des femmes seules au seuil du grand âge, les campagnes désertifiées, les jeunes paumés et l’homme voyou qui évolue avec le souhait de changer de vie en se rachetant une conduite mais c’est sans compter avec l’encre noire de l’auteur qui sait rayer d’un coup de plume la perspective de ce bonheur en le poussant trop près du bord…
De nouveau, l’écriture remarquable de Garnier sonde talentueusement l’âme humaine jusqu’à son point de bascule avec un plein de tendresse, de causticité et de cynisme.
Bijou d'humour noir
Un concentré d'humour pour ce petit joyau où le noir persiste... dans l'humour bien sûr, et dans la vie des protagonistes, qui semblait rose aux premières pages et qui s'obscurcit au fur et à mesure.
Tout commence gentiment pour ce petit couple de retraités qui emménagent dans une nouvelle résidence avec grilles, caméra et gardien, où le calme est de rigueur. Ils sont au comble de la joie lorsque d'autres résidents finissent par s'installer aussi, un autre couple et aussi une femme seule. Tout ce beau monde copine autour de la piscine et demande l'intervention d'une animatrice pour les occuper. Nadine investi alors le "club-house" pour concocter des petites après-midi calmes.
Un épisode singulier commence à gripper la machinerie bien huilée ? C'est le gardien qui tue à coups de pelle un chat qui avait réussi à s'introduire dans l'enceinte de la résidence. À partir de là, tout le monde dysfonctionne ! Et le beau petit monde éclate en neutrons indisciplinés...
Les pages se tournent toutes seules, c'est drôle, c'est morbide, c'est formidable et c'est français Madame !
Je ne connaissais pas cet auteur mais faisait plutôt confiance à la maison d'édition Zulma dont j'adore les couvertures géométriques (qui me rappellent les papiers peints de mon enfance) et les choix éditoriaux.
Et puis le titre est à la fois intriguant est superbe...
Seul bémol, un peu court, mais ça peut aussi être un avantage.
D’un simple déménagement de la capitale des Gaules à la campagne lyonnaise, Pascal Garnier va, de sa plume singulière, écrire un roman noir dont il avait le secret en mettant en scène des personnages modestes et cabossés dans leurs quotidiens sans faste avec une atmosphère dérangeante se tendant au fil des pages nourrie d’absurdité, de tendresse et de la fragilité de l’humain dont la vie oscille comme un funambule sur son fil et qu’on a peur de voir chuter.
Tout le monde s’y retrouve dans ce roman que ce soit dans l’activité d’un déménagement, dans une vie citadine trépidante, dans un nouvel environnement rural inconnu et désertifié, dans la solitude d’une maison vide face à la démesure des travaux et du rangement, face au choc d’un être cher disparu, soit dans le contexte de nouvelles rencontres ne serait-ce que celle d’un chat errant qui s’invite au foyer.
En souvenir des projets qu’avait formulés son épouse de créer une cuisine américaine, Brice cassera le mur mitoyen entre cuisine et salon, une ouverture somme toute fonctionnelle, laissée comme une blessure béante faite à la maison qui restera sans aménagement. Il éventrera des cartons anarchiquement sans rien ranger, se laissera aller face à sa soudaine solitude rongé par la déprime due à la disparition soudaine de sa femme journaliste lors d’un reportage en Égypte. Il refuse de croire qu’elle est morte.
A la pharmacie, un des rares commerces du village, il rencontrera Blanche, une étrange petite femme esseulée, héritière de la maison paternelle. Entre eux, va se lier une amitié toute relative. Ils vont conjuguer un monde de solitude et de souvenirs mêlés à l’élan d’une vie qui doit se poursuivre chaleureuse, tranquille et joyeuse avec son lot d’espoirs à combler.
Voyant en lui le sosie de son défunt paternel, Blanche va s’occuper de Brice comme la fille d’un père ressuscité jusqu’au jour où Brice, dans un sursaut d’ ultime discernement, décide de reprendre contact avec son éditeur lyonnais en lui promettant de combler son retard à livrer les planches d’illustrations promises et fort attendues pour publication pressante.
Ceci est sans compter avec la plume magistrale de Pascal Garnier qui va jouer avec l’encre noire du destin derrière un écran de fumée.
« La lettre de l’éditeur atterrit sur une pile d’enveloppes qu’il avait eu la flemme de décacheter. Il s’étira sur son lit de camp en se disant que c’était un beau jour pour mourir. »
Quand on sait que Cartons est le dernier roman qu’a écrit Pascal Garnier et qui fut édité après son décès, on peut lire dans ces lignes un élégant adieu au monde qui m’a serré la gorge car cet écrivain d’exception manque cruellement à l’appel de ceux qui savent choisir les mots pour livrer au lecteur des bijoux d’orfèvres littéraires.
« Le ciel ressemblait à un couvercle de bonbonnière, le vent soufflait une haleine de bébé. C’est vrai que c’était joli le printemps quoiqu’un peu collant. Tout ce qu’on touchait dégoulinait de sève, les bourgeons, les pousses d’herbe verte, même les insectes qui se débarrassaient en peinant de leur chrysalide. La nature dégoulinait de liquide amniotique, ruisselait de bave luisante que les premiers rayons du soleil vernissaient. Chacun sortait de sa coquille, ébouriffé, étonné, vorace, grisé de cette insolente jeunesse qui rendait prêt à en découdre avec la mort. »
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