"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quand Anne-Catherine, bourgeoise genevoise récemment divorcée, se rend chez Guido, un professeur d'histoire de l'art, retraité depuis déjà quelques années, pour y faire expertiser un tableau, que peut-il advenir ?
Selon l'auteur, deux imprévisibles : une improbable histoire d'amour entre deux êtres que presque tout oppose, notamment l'âge et l'origine sociale ; la découverte inattendue d'un chef-d'œuvre quasi inestimable...
Metin Arditi s'est mis dans la peau de Guido pour rédiger ce roman. "Je" est omniprésent. D'autant plus que si "elle" parvient à exposer ses failles, "je" les gardera longtemps au fond de lui, qu'il s'agisse de sa jeunesse ou des conséquences de la vieillesse... Deux êtres que tout oppose, l'éducation et la condition sociale notamment, et qui pourtant se trouvent. Il faudra un catalyseur pour que la rencontre fonctionne totalement : le personnage d'Alain, le fils de l'un qui a soigné l'autre...
Outre la plongée dans l'histoire de l'art florentin (hasard ? Immersion récemment vécue avec "Perspective(s)" de Laurent Binet), ce roman ne tient que par l'ambigüité des relations entre les trois personnages.
Je ne sais pas s'il y a une forme d'écriture propre aux auteurs francophones qui écrivent dans une langue qui n'est pas maternelle, mais j'ai trouvé des similitudes entre celles de Metin Arditi et d'Aki Shimazaki : simplicité et délicatesse (de l'écriture) sont les deux mots qui me viennent à l'esprit pour l'un et l'autre.
Un roman acheté lors d'un lointain Salon du livre de Paris et retrouvé récemment au bas de ma bibliothèque, dans le rayon des livres pas encore lus. Comme les bons vins, les bons livres ne se dégradent pas au fil des ans...
Chronique illustrée : http://michelgiraud.fr/2024/11/18/limprevisible-de-metin-arditi-chez-babelactes-sud-poesie-de-la-vieillesse/
Un Metin Arditi au sommet de sa passion, celle de sa ville, de son pays, de son peuple, de ses racines.
Dès le prologue j’ai été happée par la passion de l’auteur pour cette ville, pour la tradition qu’elle pérennise, pour la beauté qu’elle dégage, pour l’humanité qui émane d’elle.
Elle est peut-être la ville où les passions de tant de peuples se sont croisées mais elle est surtout un livre d’architecture à ciel ouvert. Et ça Metin Arditi l’a déchiffré pour nous. Il a su le transposer en mots simples et beaux. La préciosité des lieux est restituée. La vie des habitants est palpable jusque dans mon canapé. Je n’ai pas que lu ce dictionnaire amoureux, je l’ai vécu. J’ai été prise d’une soudaine envie de faire mes fonds de tiroirs pour trouver au plus vite le financement pour y aller :-)
Metin Arditi est un conteur né mais c’est aussi un homme d’une extreme sensibilité. Ce dictionnaire le prouve. On le picore, mot après mot. On se promène à ses côtés. On voit ce qu’il veut nous montrer, nous faire renifler, nous faire ressentir : une ville qui vit de toutes ses tripes. Comme dans toute grande ville on y trouve certes une part de danger, d’ombre et de ténébreux, mais tout ceci est vite balayé par l’art et la beauté croisés au coin des rues.
Comme le dit Arditi en introduction à la culture turque, « La réalité se définit par l’irréalité ». Tout est dit, rien n’est dit, serais-je tentée d’ajouter. Il dit aussi que « Seuls les candides éprouveront le sentiment d’avoir saisi cette ville. Les autres courront derrière elle, cherchant à la comprendre. Ce sont eux qui en retireront les plaisirs les plus délicats. »
Byzance? Constantinople? Istanbul? quel nom donner à cette ville puisqu’elle est toutes celles-là à la fois ? Où sommes nous lorsque nous entrons dans une église ? En milieu orthodoxe? juif? musulman? Ne serait-ce pas tout à la fois ?
« Ô Ville ! Ville de toutes les villes !
Toi dont on parle dans tout l’univers !
Spectacle supérieur au monde !
Nicétas Choniate (XIIe siècle). »
De l’Orient-Express à Pierre Loti, du saucisson turc au Palais de France, des chapelles russes aux derviches tourneurs, de Sainte-Sophie aux Sept collines d’Istanbul, des mendiants au bruit des rues, des marchés aux épices jusqu’au Bosphore, tout est exposé avec passion, jamais idolâtré, toujours décrit avec une grande lucidité.
L’équipe éditoriale de Grasset choisit décidément très bien les auteurs pour sa collection des Dictionnaires Amoureux. Grâce à cette collection on peut très sympathiquement se faire une idée d’un lieu, d’une culture, d’un art, ou d’une grande oeuvre. Les auteurs y distillent avec justesse une connaissance et surtout une passion pour le thème évoqué.
A picorer plutôt qu’à avaler d’une traite.
Eliot Peters, citoyen américain d’une soixantaine d’années, revient en Grèce, son pays natal, au décès accidentel de sa fille. Dans l’île de Kalahari il va côtoyer Yannis, un petit garçon muré dans son silence qui mesure, calculé, comparé, et Maraki sa mère qui gagne courageusement sa vie en pêchant.
Je me suis laissée emporter dans ce récit comme Yannis lorsqu’il écoute les histoires et légendes de la Grèce Antique que lui raconte Eliot.
Dans ce pays à l’économie dévastée demeure la beauté, celle de la mer, des îles, la beauté de l’amour inconditionnel d’un parent pour son enfant.
Yannis mesure le monde, « Il porte en lui toute la douleur des hommes, l’immense solitude et l’impossibilité désespérante de s’ouvrir à l’autre ».
C’est d’une écriture intime et pudique que Metin Arditi nous emporte dans cette quête du nombre d’or, de l’ordre du monde.
Deux disparitions sur une île grecque, la photographie en noir et blanc au féminin, la domination et la soumission religieuse, et des dizaines de vies racontées par Metin Arditi.
Le style est efficace, bien rythmé et épluché de telle manière à ce que ne persiste qu’un court roman de 220 pages.
On est Saint-Spyridon, une île grecque située entre Turquie et Kos ; l’essentiel se jouant dans un monastère de femmes. Nous sommes à la fin des années 1950, dans une société appauvrie par plusieurs guerres successives et qui a laissé nombre d’habitants dans la misère et les privations.
« Oui, Dieu les avait oubliés. Ils vivaient dans la pauvreté, le deuil, et très souvent, le désespoir. Mais y avait-il au monde plus bel endroit ? »
Dans un tel contexte, l’arrivée d’Odile, photographe parisienne, ne peut qu’éveiller la curiosité, d’autant plus que Clio qui l’aidait pour le ménage de sa maison et qui, après avoir été initiée à la photo par Odile, entrera au monastère, va disparaitre. Puis ce sera au tour de Pénélope, la fille d’Odile, de disparaître.
Metin Arditi met en scène le suspense de cette situation ainsi que toute l’authenticité des vies sur cette île.
Il convoque détresse et espoir, deuil et renaissance, corps et foi, fatalité et reconstruction, art et paysages, misère et instants fugaces de plaisir.
Par contre, il fait du religieux un élément omniprésent mais sans que cela n’apporte un avantage. Le thème de la soumission religieuse ayant été depuis fort longtemps présenté sous son vrai jour, je n’y ai rien trouvé de nouveau, de palpitant.
« Le Christ était-il mort sur la Croix pour qu'elles oublient le don qu'Il leur avait fait de Sa vie ? Pour qu'elles méprisent leur corps et le malmènent, dans l'illusion que cela les rapprocherait de Lui, alors qu'elles ne faisaient que singer sa Passion à peu de frais ? »
Dommage car l’écriture de Metin Arditi est présente. Je l’admire pour sa simplicité, pour la structuration ainsi que la finesse et l’empathie de cet auteur pour les grecs.
Je vais relire ’Le Turquetto’’ qui me semblait plus abouti, plus captivant du fait de la peinture du Titien.
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