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« Luxée », l’excellence littéraire. Un roman qui explore le paysage intime d’une mère et de sa fille.
Contemporain, existentiel, extrêmement attachant, connecté avec force aux destinées singulières.
« Luxée » est un lever de voile délicat et d’une rare intelligence sur les généalogies tourmentées.
Les territoires informulés, les non-dits et les faux-semblants.
Comment se construire une identité si les correspondances sont faussées ?
Ici, tout est manichéen, de dualité, dans une orée subtile, sans pathos, et dévorée par les psychologies tragiques. Cruciales, elles rassemblent les pièces d’un puzzle que l’on observe avec la plus grande attention.
Cléopâtre est une jeune fille de treize ans. Sa mère ne veut pour elle que l’excellence, la perfection. Un avenir brillant, source d’indépendance. Elle lui donne toutes les clefs possibles pour affronter le monde extérieur et pour se réaliser dans sa vie future.
Marie projette sur cet enfant tout ce qui lui manque. Elle bâtit autour de Cléopâtre une citadelle, un antre où l’enfant grandissante se forge aux belles manières, à l’éducation tirée au cordeau.
Cléopâtre est ici. Dans cette vie qui dépose sur l’enfant un masque.
Ne jamais corrompre ce que Marie (jamais appelée sa mère ou maman de part et d’autre du roman) désire pour sa fille.
Mais Cléopâtre pressent en elle une double personnalité. Serait-t-elle bipolaire ou si intuitive que ses pensées naviguent loin de la réalité ? Elle est comme Alice au Pays des merveilles, dans cette transposition symbolique et dévorée de pressentiments.
Cléopâtre se surprend à dire « Chantal » tout haut. Le prénom de sa naissance, celui d’avant, avant que Marie s’éloigne de Murielle et de Jean-Pierre. « Accessoirement, le père de Marie ». Qu’elle coupe les ponts avec tous, jusqu’à sa propre sœur et son grand-père adoré. Maman solo qui vit dans la même ville qu’eux mais si loin dans ses désirs de rédemption, qu’une frontière s’est construite immanquablement.
Cléopâtre ignore tout d’eux. Jusqu’au prénom de son père. Marie s’emmure, jusqu’au jour où.
C’est ici le passage du gué, dans cet entendement où les secrets vont percer au grand jour.
L’heure des retrouvailles avec Henri, le grand-père de Marie. À l’instar d’une aube nouvelle, d’un lâcher de ballons en plein ciel. On aime alors ce côté Amélie Poulain, cette ère des petites riens qui vont raccrocher les étoiles dans le ciel.
« ...l’insubmersible Henri est secoué de sanglots. C’est la première fois que Marie le voit dans cet état, et elle espère que ça ne durera pas trop longtemps. Puis il la prend dans ses bras avec tant de force que Marie a, à cet instant, deux certitudes : Henri lève encore des haltères, et il ne la laissera plus jamais disparaître. »
Mais pour le reste, ce grand tout, cette fenêtre ouverte sur l’advenir, sans fausses-pistes ni déroutes, sera t-elle possible ?
Ici, s’entrelacent les exaucements et les recensements, les choix d’une réponse au passé.
Taire ou composer avec ? Renier ou usurper le jour présent ?
Faire éclater la bulle à l’instar d’une réponse à cette sublime écriture si intuitive de Laurence Provencher.
Dans cette lignée des romans d’importance.
« Luxée » est dans sa lucidité, un immense roman d’amour d’une mère pour sa fille.
Fascinant de justesse, il est l’orchestre des choses informulées.
La traversée du miroir jusqu’au désir de réalité.
Comment se forger une identité sans trahir la vérité ?
Ce premier roman qui dépasse largement ses grands frères est une analyse fine et perfectionniste des filiations tourmentées.
La prodigalité. Le génie d’un roman de maître. Publié par les majeures Éditions Québec Amérique.
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