"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une épidémie soudaine touche des enfants d'un village en Irlande du Nord . Après des décès successifs des enfants une enquête est menée. Un très bon roman, captivant riche sur la nature humaine .La sensation de suffoquer parfois dans cette communauté.
Un roman intriguant qui tient en haleine, un roman d'un grande finesse psychologique.
Certes, l’arrière-plan du roman évoque les Troubles qui ont lieu en Irlande du Nord dans les années 90 (le récit se déroule en 1998 dans un bourg protestant : Ballilack).
Certes, la famille d’Hannah fait partie de la communauté protestante régénérée.
Mais le roman part sous de toutes autres latitudes : une épidémie touche les enfants de la classe de Hannah qui meurent les uns après les autres. Ces enfants, une fois morts, rendent visite à Hannah pour lui expliquer qu’ils forment la communauté des EM (enfants morts), qu’ils se défoulent et boivent de l’alcool (aucun adulte n’étant là pour les en empêcher.
J’ai suivi les atermoiements d’Hannah, de ses parents et des gens du village jusqu’à la moitié du livre, à peu près. Et puis j’ai trouvé que le récit n’avançait pas, et je l’ai fini en avance rapide.
Je n’ai pas trouvé de magie dans ces pages, seulement des adultes perdus et menteurs (sauf le grand-père d’Hannah).
J’ai dû relire plusieurs fois des mots comme transmogrifier – profanité – sanctimonieux. Les chercher dans le dictionnaire, trouver qu’ils existaient, et me dire que la traductrice avait dû bien se faire rire.
Le comportement des EM m’a déçu, mais fait écho à la rédaction du début du livre : comment imaginer l’avenir de leur pays ?
Une lecture décevante qui ne me restera pas en mémoire.
https://alexmotamots.fr/les-ravissements-jan-carson/
J’ai eu un peu de mal au début de ma lecture avec l’histoire qui me paraissait hachée : il était question d’un homme introverti avec un bébé sur les bras dans la mère était disparue ; des feux du Onze à Belfast en préparation qui posaient problèmes à cause de leur ampleur ; d’enfants avec des comportements hors-norme ; du quartier Est de Belfast dont je n’ai pas saisi la spécificité.
L’histoire devient intéressante passée la première partie : Sammy s’aperçoit que son fils retranché dans la sous-pente est un lanceur de révolte ; Jonathan nous raconte comment sa fille est né ; les deux hommes finissent par se rencontrer.
J’ai aimé l’histoire de la naissance de la fille de Jonathan, Sophie ; son côté merveilleux et improbable.
J’ai aimé les différents timbres de voix qu’il prend en fonction de l’urgence de la situation.
J’ai aimé sa fille Sophie qui se love toujours entre le cou et l’épaule de son père.
J’ai eu de la peine pour Sammy qui ouvre les yeux sur son fils et ne sait pas quoi faire pour l’arrêter ; ses rapports inexistants avec sa femme.
J’ai aimé que les deux protagonistes se rendent compte du caractère stéréotypé des revendications des lanceurs de feu du Onze et tout le baratin à propos des libertés civiques qui ne sont qu’un prétexte.
Un roman qui avance l’hypothèse que la nature sera toujours plus forte que la culture : malgré le verni d’éducation, un être humain suivra toujours sa nature profonde.
Une citation :
Jonathan se demande pour la centième fois cette année pourquoi ces gens parlent comme ça, à coups d’argot banal et de clichés, d’expressions récoltés à la télévision. On dirait qu’ils ont perdu leur ^propre langage. (p.315)
L’image que je retiendrai :
Celle des enfants infortunés de Belfast-Est dont chacun porte une part de magie.
https://alexmotamots.fr/les-lanceurs-de-feu-jan-carson/
Dès les premières pages, ce roman irlandais est étrange : en exergue, un extrait de dictionnaire, l'entrée « sirène », puis une citation d'un auteur anglais du XIXème ( George Eliot pour Silas Marner ) évoquant la perte d'anges, remplacés par de petits enfants pour guider les hommes loin de la destruction d'une cité, et enfin la voix d'un père inquiet qui scrute son bébé fille à la recherche de caractéristiques physiques qu'elle aurait héritées de lui ou de sa mère, s'attardant sur sa bouche en disant que « c'est là que le monde commencera ou finira. » le texte conservera son étrangeté jusqu'à la dernière ligne.
La construction en trois arcs narratifs est extrêmement lisible : la voix du père, le docteur Jonathan Murray à la première personne ; la voix d'un autre père, Sammy Agnew, un ancien paramilitaire loyaliste ; des intermèdes présentant de courtes histoires d'enfants aux pouvoirs très spéciaux. le décor est lui aussi très lisible : 2014, seize ans après la guerre civile surnommée les Troubles, Belfast en flamme est en proie au chaos depuis qu'un Lanceur de feu exhorte la population à allumer de gigantesques brasiers urbains.
Cette lisibilité est cependant brouillée par le manque de connexion immédiatement évident entre tous ses éléments disparates. Brouillé aussi par le recours à un réalisme magique qui pourrait provenir d'un autre livre avec ces enfants particuliers qu'on verrait bien accompagner Miss Peregrine. Jan Carson peine à trouver un équilibre intellectuellement satisfaisant, et pourtant ça marche ! J'ai été totalement captivée par la puissance du récit.
Sammy et Jonathan, bien que très dissemblables du point de vue de la personnalité et de l'origine sociale, sont remarquablement caractérisés. Deux êtres profondément seuls, tourmentés, terrifiés par leur progéniture, chacun persuadé que leur enfant est porteur de malheur : Sammy voit en son fils Mark le Lanceur de feu à l'origine du tumulte pyromane qui s'abat sur Belfast ; Jonathan pense que son bébé Sophie est une sirène - comme sa mère qui s'est envolée à sa naissance – et sa voix une redoutable menace pour l'humanité, au point de songer à lui couper la langue.
Les thèmes de la paternité rejoint celui de la culpabilité et de la transmission de la violence avec une profondeur très impressionnante qui raconte l'Irlande du Nord d'aujourd'hui et Belfast, ville dans laquelle « la vérité est un cercle vu d'un côté et un carré vu de l'autre. On risque la cécité à force d'en regarder fixement la forme. » Ayant opposé républicains nationalistes catholiques et loyalistes unionistes protestants, la guerre civile a beau être terminé depuis les accords du Vendredi saint de 1998, elle est toujours présente dans les os, dans la chair, dans les esprits au point que la violence semble inextirpable, « une chose qui se transmet, comme les maladies cardiaques ou le cancer » , une maladie que les parents ont transmis à la génération suivante. Sammy pense l'avoir transmise à son fils, lui qui durant les Troubles a commis des atrocités contre des catholiques sans prétexte idéologique, juste mu par la satisfaction d'une pulsion criminelle.
On est en pleine tragédie antique ou shakespearienne avec des pères en proie à des dilemmes existentiels. Dans cette quête des origines du Mal, comment stopper l'engrenage de la violence ? Faut-il protéger l'enfant ou la société ? le lecteur est perturbé par l'exposition des instincts des personnages prêts à commettre des actes d'autant plus terrifiants qu'on doute de leur santé mentale et de leur capacité à bien juger la menace que constituerait leur enfant. Mark, le fils de Sammy, n'est peut-être pas le Lanceur de feu ; Sophie, la fille de Jonathan, n'est peut-être pas une sirène ; les pères juste paranoïaques, rendus fous par la résurgence possible de la violence.
Porté par une plume brillante, la fois énergique et poétique, ce roman incarne avec beaucoup de force et d'originalité le bouillonnement souterrain d'une Irlande du Nord qui pourrait exploser à nouveau avec le Brexit et la question de ses frontières.
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