"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Deux mots sur ce recueil de nouvelles qui est un modèle du genre.
Chris Offutt nous amène dans son Kentucky à travers huit tranches de vies. En quelques pages, il dit tout de ceux qui ont quitté les collines, sont sortis du bois et n’aspirent qu’à y revenir, de ceux qui voudraient en partir mais n’y parviennent pas. Huit histoires sur le lien ambigu qui uni habitants et territoire, une relation d’amour-haine qui façonne les hommes.
Ce sont des histoires banales de gens lambda, chauffeurs de camion, joueurs, vagabonds, aussi rudes que la nature dans laquelle ils sont nés.
Ce sont des éclats de vie magnifiés par l’infini talent de Chris Offutt pour sonder les âmes.
Chris Offut a été particulièrement remarqué pour ces précédents romans appalachiens « Nuits Appalaches » et « Le Bon frère », et adoubé par ses illustres aînés, aujourd’hui disparus, Jim Harrison, James Salter ou encore Larry Brown.
« Les Gens des collines » est le premier volume d’une trilogie policière qui se déroule au cœur du Kentucky et de ses collines, dont le deuxième opus « Les Fils de Shifty » vient tout juste de paraître aux éditions Gallmeister.
Le corps d’une femme a été retrouvé dans les bois par le vieux Tucker. Vêtue d’une robe élégante, dans une position disgracieuse, une chaussure manquante.
Linda Hardin, la shérif du comté, a besoin, pour résoudre cette enquête, de son frère. En poste depuis peu, tous ou presque veulent la voir déguerpir : que ce soit le maire qui veut que la police de Morehead prenne le relais, l’administrateur du comté qui, détestant leur famille, veut refiler l’enquête à la police d’État, ou encore un grand manitou du charbon qui va, d’ailleurs, lui coller un agent spécial du FBI pour l’assister. En somme, avoir une femme shérif ne plaît guère à la gente masculine.
Linda va chercher l’appui de son frère, Mick, de la division des enquêtes criminelles de l’armée, actuellement en permission, le plus à même de recueillir des confidences, d’autant qu’il connaît les collines comme sa poche. Un service qu’il ne peut lui refuser même si l’objet de sa permission n’avait qu’un unique but : tenter de sauver son mariage avec Peggy...
« Les Gens des Collines » est un titre approprié à ce roman dans lequel Chris parle finalement principalement de ces « gens », car l’enquête de Mick reste classique dans sa résolution – sans coup d’éclat – et ne sert que de prétexte à raconter cette communauté rurale, où tout le monde connaît les petits secrets ou les traumatismes de chacun, l’écho lointain du monde se fait entendre.
Chris Ottuff chronique avec beaucoup de justesse cette Amérique profonde qui semble figée dans le passé et gangrénée par la petite criminalité, celle des trafics de drogue et d'armes, la petite délinquance des jeunes déshérités de cette région.
Cela offre des dialogues savoureux où les silences pèsent aussi lourd que les paroles et l'auteur sait parfaitement gérer les deux avec efficacité. Néanmoins, l'ennui risquera de vite gagner le lecteur à cause de répétitions ou encore des atermoiements successifs des protagonistes. On ne compte plus les mentions du personnage principal qui monte dans son pick-up, et on regrettera l'absence quasi totale de la nature sauvage qu’on imagine pourtant dans cette région reculée des Etats-Unis.
Avec une impressionnante économie de moyens - chaque mot pesé avec soin - l’auteur fait sentir le désarroi de cet homme blessé qui n’est plus chez lui nulle part, ni dans sa maison, ni dans la vieille cabane de son enfance. Cela pose les bases d’un personnage dont l’évolution sera intéressante à suivre dans la suite de la trilogie.
Ne vous y meprenez pas, cette fiction policière avec meurtre, flic et enquête, ne trouve d’intérêt que dans sa chronique sociale d’une Amérique profonde en proie au déclassement et à une criminalité endémique. Un début de trilogie qui pose des bases solides, sans pour autant convaincre pleinement.
Rocksalt, Kentucky. Un corps est découvert abandonné dans un parking, celui d'un trafiquant d'héroïne. La police locale semblant peu diligente à vouloir trouver le coupable, la mère convainc Mick Hardin, membre de la CID ( Division des enquêtes criminelles au sein de l'armée américaine ) qui se remet d'une blessure chez sa soeur shérif du comté, de mener officieusement une enquête afin de découvrir qui a assassiné son fils.
Ceux qui ont aimé Les Gens des collines retrouveront avec grand plaisir Mick, les autres auront plaisir à découvrir un enquêteur affûté et décontracté, à l'ordre moral taillé dans le roc des collines des Appalaches, doté de la capacité à faire parler les plus taiseux, maniant l'autodérision à merveille tout en portant un regard humaniste sur ses semblables. Sa rectitude morale le porte à accorder la priorité à la justice légitime plus que légale, faut pas le chauffer ...
L'enquête en elle-même est extrêmement bien conduite, le meurtre initial révélant tout un réseau d'interactions insoupçonnés qui enclenchent un cycle de violence et de vengeance dont on ne peut deviner jusqu'où il va aller … si ce n'est un final brillant et pétaradant en mode western contemporain. Intrigue efficacement tracée resserrée sur 250 pages à l'écriture discrète mais grandement évocatrice avec la pudeur de son regard et sa lucidité tranchante.
Ce qui distingue ce polar rural noir d'un autre, c'est la maîtrise et l'affection de Chris Offutt pour le décor et les gens qui y vivent. Il sait comme personne dire la beauté des paysages heurtés des Appalaches, tout comme la rudesse et la générosité des autochtones. Les personnages secondaires sont mémorables, à la fois bruts et avisés, de vraies gueules décrites en quelques lignes. Se déploie ainsi une ambiance qui suinte l'authenticité de partout, à commencer par ses dialogues vifs, rapides et drôles.
Et puis il y a la capacité de l'auteur à manier des sensations oxymoriques jusqu'à les faire fusionner : la tendresse côtoie la rudesse, le pessimisme le plus profond quant aux capacités de nuisance des hommes ( cupidité, destruction environnementale, trafic de stupéfiants ) n'empêche pas la lumière de percer. Derrière l'explosion des sentiments primaires, le poids émotionnel qui semblait fort enfoui remonte à la surface dans des ultimes pages étonnamment apaisantes étant donné ce qui a précédé.
Le Kentucky straight de Chris Offut c’est neuf nouvelles qui nous amènent dans un coin cartographiée nulle part. Collines, bois, chemins de terre, lieux peuplés d'animaux sauvages et d’hommes tout aussi sauvages, marqués par la dureté de la terre et par l'isolement.
Ce sont des tranches de vie d’anciens mineurs, de joueurs, de sorciers, de cultivateurs. Neuf histoires habitées par des losers, des alcooliques, des ultra-religieux, des paresseux, et aussi des personnes terriblement banales. On les croise à un moment précis dans des instantanés qui disent tout de leur vie et de leur géographie.
Du rural, du direct, du précis.
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