Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Désastre sociologique et écologique en cours... ne plus se voiler la face, mais entreprendre pour non pas éviter la catastrophe (elle est déjà là) mais en limiter les dégâts, les conséquences.
Accepter d'agir, s'investir à bras le corps pour éliminer tout ce qui ne fait pas sens à la vie bonne universelle, rejeter les codes imposés qui oeuvrent dans la démesure. Une révolution de nos habitudes - faire, habiter l'espace, penser - s'impose.
Ce livre d'Aurélien Barrau nous oblige à l'action... dès à présent car :
"Si le génie humain existe, c'est ici et maintenant qu'il doit se manifester". (page 212).
NB : superbe conclusion, "épilogue presque philosophique", où la poésie, dans le sens de la création, est le remède à un monde transformé à venir...
La fiche indique la publication en livre de poche à venir en octobre 2024 mais la publication en grand format (en 2023) est accessible.
Aurélien Barrau (AB) reprend et développe des thématiques notamment déjà abordées dans son précédent texte « Il faut une révolution politique, poétique et philosophique » chez Zulma qui n’était pas d’un accès très aisé (densité et formulations).
Ce nouvel essai de l’astrophysicien grenoblois reste dense et court, mais plus accessible.
Si on condense on pourrait dire que ce qu’AB appelle « l’hypothèse K » est en fait une forme de laisser faire se soldant par des développements techniques non maitrisés et exponentiels (le K renvoyant au grec ancien karkinos qui désigne le crabe … et donc au cancer et ces cellules malignes qui « ont évidemment besoin de l'hôte pour exister mais elles n'en dépendent plus que marginalement, jusqu'à son trépas ».
En dénonçant les croyances dans les solutions techniques sans vision du monde et les pertes de sens et en diagnostiquant les limites actuelles des sciences, il propose de réouvrir la pensée scientifique particulièrement dans les fondamentaux et références en prenant notamment en compte le vivant.
Il frappe fort pour à la fois alerter, mais aussi proposer des pistes, des pas de côté, pour éviter la « catastrophe civilisationnelle », ouvrir les sciences vers d’autres paradigmes (en toute lucidité) et redonner leurs places et leurs sens aux mots :
« Ni un drame écologique, ni une crise climatique, ni un délitement social : une catastrophe civilisationnelle. Voilà où nous en sommes. Un effondrement de la vie et une perte de sens. Le premier étant, en partie, une conséquence de la seconde.
Le rôle que la science peut et doit jouer dans cette situation sans précédent est immense. A la démesure de sa responsabilité. … » p 15
Et … « quand on est la science à la recherche de « solutions », c'est manquer à la fois d'imagination et d'ambition. C'est non seulement rater sa véritable singularité mais aussi oublier que le prétendu « problème » auquel nous faisons face n'est à ce jour ni compris ni pensé. Sans questionner les implicites, les valeurs, les désirs et les symboles, aucun espoir sérieux n'est évidemment permis. » p 17
« … la science permet aussi de découvrir que le réchauffement climatique n'est qu'une (petite) partie du problème. … d'autres processus, tout aussi inquiétant, se dévoilent simultanément : acidification des océans, pollution, interruption des cycles biogéochimiques, stérilisation des sols, atrophie des espaces de vie, introduction d'espèces invasives … ce sur focaliser sur le réchauffement n'est qu'une manière de se rassurer en choisissant le problème le plus simple à contrecarrer. » p 22
…
« il serait bien trop simple d'opposer la « bonne science », fondamentale, pure, désintéressée, à la « mauvaise science », appliquée, ingénériérique, technologique. … la ligne de démarcation n'est pas à chercher ici. Elle se dessinerait plutôt entre la science qui sur-affirme le déjà su ou le déjà cru et celle qui fait vaciller les construits et les édifiés. L'essentiel est ici. » p 104
« … l'attitude dont il est maintenant question ne relève pas des conditions pratiques de l'exercice mais de l'intentionnalité ou de la visée. De la vision. De la représentation de la perspective. En science la modalité est une finalité.
Pour être parfaitement clair : la proposition de cet essai ne concerne ni exclusivement les objectifs ni seulement les moyens. Réinventer les seuls buts de la recherche scientifique …, ou ses seules modalités ... n'aurait aucun intérêt… cela se révélerait même largement nuisible.
Poétiser la science pour la refonder consiste plutôt à déplacer nos expectatives pour infléchir la pratique, renouveler la réception et potentiellement transformer la direction. Il faut d'abord travailler les attentes. Apprendre à aimer l’onto-poéto-logie oubliée ou effacée. Tout en découlera, suivant une contre mécanique imprévisible. » pp 105-106
Aurélien Barraud ne se résume pas à ses recherches en astrophysique. C’est un intellectuel engagé, connu pour une radicalité certaine au regard des périls et de la situation de notre monde. Ce texte d’entretien est court, mais il est guidé par l’objectif de « produire du réel » en mettant l’accent sur l’importance de l’imagination pour ouvrir de nouveaux possibles.
Si le temps n’est plus aux diagnostics (établis) mais à l’action créative, l’échange avec Carole Guilbaud est aussi quand même l’occasion de rappeler (on ne résiste pas à aux citations) :
• qu’il faut être vigilent aux termes et mots et donc « … utiliser (quand il est approprié) le terme de « réfugiés » plutôt que de « migrants ». D'utiliser celui de « racisme systémique » plutôt que d’ « inclusivité insuffisante ». D'utiliser, en effet, celui de « catastrophe » plutôt que de « crise » pour référer à l'effondrement de la vie sur terre. » p 4
• et « … il est tout aussi important de ne jamais nier la spécificité et l'unicité de chaque événement majeur. Auschwitz est unique. Absolument unique. Et il y aurait une scélérate indécence à le nier. Le crime colonial est unique. L'acceptation implicite d'un système (le nôtre) dans lequel un enfant meurt de faim toutes les 5 secondes tandis que les pays riches gaspillent près d'un tiers de la production alimentaire est unique. Chaque abomination est sans équivalent, incomparable : un relativisme laxiste et nivelant serait obscène. Peut-être la barbarie est-elle universelle mais ces manifestations sont toujours spécifiques. » p 5
Et parmi les préconisations, outre les assemblées citoyennes, le besoin, plus que jamais, d’entraide et de solidarités, il en est une qui illustre le pas de côté, le changement d’angle : « Travailler la beauté est plus urgent et plus radical qu’équilibrer son bilan carbone. » p 29
Et une conclusion sur « Une question (qui) reste ouverte : un système peut-il permettre sa propre fondation en autorisant la révolution qui le récuserait ? Rien n'est moins sûr. » p31
Un livre fabuleux sur les sujets fascinants des trous noirs et de l'espace temps. Quelques certitudes, beaucoup de doutes et une grande humilité chez cet homme de savoir qu'est Aurélien Barrau. Ce qui compte c'est" l'étonnement, une interrogation envers les choses. méme si elles paraissent simples.""Ce que nous cherchons en science n'est pas la vérité absolue. Nous cherchons la meilleure explication possible à un moment donné. ". Passionnant...
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