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« J'avais seize ans quand je me suis sentie attirée par lui pour la première fois, par l'image de son visage et par ses poèmes qui me déconcertaient et me séduisaient à la fois. Plongée dans leur charme enivrant, j'en ressortais tremblante, sans vraiment me souvenir de ce que je venais de lire. Pourtant, ses mots se gravaient dans mon cerveau, s'enroulaient comme un cordage sur le pont d'un navire fantôme naviguant dans une brume mortelle. Une saison en enfer a été pour moi une drogue de jeunesse, comme un concentré de haschisch, ou une bonne dose d'alcool. » P.S.
Dans cet ouvrage illustré qu'elle a entièrement conçu, Patti Smith a choisi de mettre en regard les poèmes d'Une saison en enfer avec des moments de sa propre histoire, grâce à des dessins, photos, documents, textes inédits... Se dessine ainsi la relation très particulière qu'elle entretient avec le poète depuis toujours.
J'imaginais une balade de résonances entre le parcours atypique de Patti Smith, icône rebelle, et Arthur Rimbaud, indiscipliné, ayant des fulgurances poétiques ; un fracas même entre deux personnalités anticonformistes ; des allers-retours entre leurs deux mondes. Et...c'est pauvre, très pauvre.
Patti Smith n'écrit pas toujours toute seule, les styles sont saccadés. Elle a finalement peu de choses à dire si ce n'est qu'elle se dit détentrice de la mémoire de Rimbaud (n'a-t-elle pas été en Europe sur sa tombe pour son 100e anniversaire là où tout le monde avait oublié le génie enseveli ?) et comme lui, elle a "les poches crevées" dans ses déambulations géographiques. Les quelques photos personnelles de Patti Smith sont quelques peu glauques, celles du revolver de Rimbaud rappelle la technique de Warhol (blanc, vert, rouge...) et ses 2-3 dessins personnels reproduisant Rimbaud (à partir de photos ?) sont banals. Seule la page 83, où le texte présenté est dit être le sien, a une profondeur de cette balade et de ce fracas évoqués ci-dessus.
Il reste ces 2 belles photos de Patti Smith par Pierre Liabaert, photographe professionnel, qui sont peut-être ce qu'il y a de plus beau dans ce livre.
Quant à Rimbaud, je découvre, outre ses poèmes très beaux et très connus (le dormeur du val, Ophélie, etc.), d'autres textes en prose qui se veulent poétiques (Délires, etc.) mais qui sont dignes d'adolescents que nous avons pu être : maladroits dans les mots, utilisant des superlatifs, des mots semi-gothiques, des mots pour faire intello. Il ne sait pas parler des femmes mais des fois on sent bien qu'il essaie (par convenance ?), l'Eglise en prend pour son grade sur la pédophilie à mots très peu couverts (ex. p.112, II) et c'est peut-être le plus intéressant (et questionnant : ce silence collectif).
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