"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quand l'amour est comme le mien, juste un rêve solitaire infini, une insulte au malheur, un crachat à la face du destin, alors il élève ses flammes jusqu'aux cieux, il brûle et purifie tout et ne s'éteint jamais, ne se réduit jamais à un feu dans une cheminée qui réchauffe et apaise, qui illumine une maison bienheureuse.
Une femme, la soixantaine, dont on ne connaîtra pas le nom, raconte sa rencontre 40 ans auparavant avec Mateo Romoli, un jeune professeur de lettres et écrivain au succès limité, dans le lycée où elle officiait comme concierge. Elle lui voue depuis, un amour non déclaré, non partagé ; sa vie ou plutôt l'absence de vie s'est construite autour de cet amour obsessionnel.
Ce roman très court et très singulier, intense et puissant, est un roman sur l'amour absolu, sur l'addiction à l'idée fantasmée de l'amour; c'est le refus du réel, d'une vie terne et grise que cet amour impossible teinte de couleurs, la rendant ainsi supportable. Un amour non avoué par peur du rejet de la part de celle qui se trouve inférieure socialement, intellectuellement. Un amour entre réalité et imagination qui sublime la solitude, l'ennui, le vide. Un amour qui permet d'accepter son sort, celui d'invisible, de laissée pour compte.
Le personnage de Matteo est antipathique : égoïste, prétentieux, centré sur lui-même (tous les écrivains sont-ils ainsi???) ce qui donne une dimension tragique à l'amour que lui porte la narratrice.
Dommage que soit apparu plusieurs fois dans le roman un nain, dont on ne sait s'il est réel, totalement hors de propos et dont je n'ai pas compris l'intérêt.
Roman singulier et prenant.
À Torre Mauro, quartier de la périphérie de Rome, la concierge d'un lycée s'éprend de Matteo, un professeur qui aura à peine un regard pour celle dont le cœur battra pour lui pendant près de quarante ans.
Ce sont ces quatre décennies que nous raconte Marco Lodoli à la première personne et en remontant le temps.
Abnégation, dévotion, sacrifice, sacerdoce, aucun vocable n'est assez fort pour décrire la vie de cette nonne laïque envoûtée par l'allure adolescente, le sourire juvénile, les cheveux en bataille et l'air un peu perdu du jeune homme qui vieillit en même temps qu'elle sans que les signes de flétrissement ne freine son adoration à distance.
Et c'est précisément cette distance, on pourrait dire plus trivialement cette non-consommation, entre la femme et l'objet de son idolâtrie qui explique la persistance d'une passion suffisante à nourrir une existence et à lui donner un sens.
Celle qui n'a pas de prénom se transforme en un ange gardien et en un être éthéré et pur.
Ce qui ressemble à une mission apparaîtrait vaine pour le commun des mortels. C'est ce que lui dit une « amie » qui lit dans les lignes de la main : « Il n'y a pas de vie dans ta paume, elle est absolument vide ».
En à peine cent cinquante pages, avec des mots ordinaires pour mieux exprimer les états d'âme de ce cœur simple qui n'attend rien de Matteo, sans fioritures, avec un art habile de l'ellipse et une grande finesse psychologique, Marco Lodoli évoque une facette du sentiment amoureux, cellle qui vise l'absolu.
Au-delà de la description de cette ferveur secrète quasi fanatique, l'écrivain italien souligne le poids des différences sociales qui interdit à une modeste employée de déclarer sa flamme à un homme lettré.
C'est à la fois effrayant et fascinant.
EXTRAITS
Il n'y a que la pureté qui peut préserver la vie de la misère des hommes et des femmes, la protéger de l'ordure du monde.
J'étais heureuse comme j'étais, sans espoir, parce que tout espoir est prétention.
Personne ne peut me dire le contraire, que j'ai vécu en vain.
http://papivore.net/litterature-italienne/critique-si-peu-marco-lodoli-p-o-l/
Sélection 2024 du roman étranger Prix Médicis et du Prix roman Fnac !
Un court roman à la première personne qui fait entendre la voix d'une femme qui aura passé sa vie dans une dévotion d'une passion amoureuse à sens unique, une concierge invisible et anonyme. Un amour fou mélancolique, obsessionnel, sombre, des pulsions violentes et hallucinatoires, la narratrice devient l'emblème de ce "Si peu".
Une écriture lente, un personnages vivant en dehors de la marge, un amour silencieux et de l'empathie. Des sentiment entre enfer et paradis. Mon bémol s'est qu'il manque de la sensibilité, de la délicatesse et de la profondeur. Une lecture qui se fait rapidement par la fluidité de l'écriture.
" Plus j’avance, plus tout ça ressemble à un rêve, et j’ai peur de me réveiller et de le voir se dissoudre dans le néant, de ne plus m’en souvenir. Je veux continuer à aimer Matteo, même si je ne sais plus bien qui je suis et qui est Matteo, mais je sais que ce sentiment est fort et nécessaire, que je veux aimer jusqu’à la fin, et aussi après. "
"Mais quand l'amour est comme le mien, juste un rêve solitaire infini, une insulte au malheur, un crachat à la face du destin, alors il élève ses flammes jusqu'aux cieux, il brûle et purifie tout et ne s'éteint jamais."
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