"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Il s'appelle Peter March. Il est anglais et c'est un bon marin, mais surtout un inventeur de systèmes électroniques pour voiliers. En 1969, une occasion se présente à lui, à la fois de vivre la grande aventure et de prouver l'excellence de ses inventions : la première course autour du monde en solitaire et sans escale est organisée. Pour satisfaire des concurrents disparates, la règle prévoit la liberté de départ des côtes anglaises, entre le 1er juin et le 30 septembre. Deux prix très bien dotés seront donc attribués : l'un au premier qui reviendra, l'autre au plus rapide sur le parcours.
L'angoisse saisit Peter lorsqu'il découvre une avarie grave dans la structure des flotteurs du trimaran révolutionnaire. Une escale est inévitable qui est synonyme d'abandon. Parallèlement, ce rêveur se laisse aller à penser un monde idéal, obéissant aux lois qui lui conviennent et qui lui permettrait de gagner quand même. Seul en mer, sans personne pour l'arrêter, il triche de plus en plus entre sa vraie position et la fausse. La seule issue qu'il entrevoit est de simuler une panne de radio et d'aller faire une escale secrète à Bahia Desolada en Argentine. Il repart et erre dans l'Atlantique sud en proie à un délire croissant. Pendant ce temps, trois rescapés de la course passent le cap Horn. March décide alors de refaire surface et de se positionner derrière eux, comme s'il avait réellement couru. Knox Johnston va gagner le prix du premier arrivé, Bernard Moitessier abandonne pour " raisons philosophiques ". Tetley qui se sent talonné par March, force trop et casse. March se retrouve donc en position de vainqueur. Mais le face à face avec la mer, la solitude, l'angoisse d'affronter cet énorme mensonge, le font glisser peu à peu dans la folie. Alors qu'on l'attend en héros, il se jette à l'eau, laissant deux livres de bord, le vrai et le faux...
Eva a quatorze ans lorsque son père Peter March embarque le 31 octobre 1968 à bord de son trimaran révolutionnaire « Sailahead » pour participer à la première course autour du monde en solitaire et sans escale. Mais ce n'est que quinze ans plus tard qu'elle lit les carnets écrits par son père pendant son périple, et qu'elle ressort le journal qu'elle tenait à l'époque.
Le récit se construit à deux voix, à travers les souvenirs d'Eva et le texte de son père pour nous faire vivre une superbe et terrible histoire de mer directement inspirée de faits réels.
Eva raconte son père, qu'elle présente comme quelqu'un de gai, avec qui la vie paraissait facile et joyeuse. Quelqu'un d'entreprenant, d'imaginatif, fourmillant d'idées au point de créer sa société d'électronique de mer. C'est par sa voix que se dessine le projet de Peter de se lancer dans cette aventure inédite, persuadé de pouvoir construire le navire performant capable de boucler le tour du globe le plus rapide, et confiant dans ses compétences de navigateur. Il attend de ce futur exploit la renommée pour « Sailahead Ltd » et les retombées financières qui ne manqueront pas.
Une grande partie du récit est basée sur la transcription fidèle des carnets de Peter relatant au fil des jours le déroulement de sa navigation, faisant rapidement apparaître de multiples problèmes dus à la sous-estimation de l'envergure du projet par un navigateur pas aussi expérimenté et solide psychologiquement qu'il le pensait, et à la réalisation d'un bateau dans la précipitation, révolutionnaire dans l'intention seulement, et finalement mal conçu et pas assez testé.
Ce qui est le plus impressionnant, c'est la lente dégradation psychique de Peter March, des phases par lesquelles il passe dans sa longue dérive océanique, seul face à un destin qu'il ne maîtrise plus et une mer qu'il n'a jamais maîtrisée, en proie aux doutes et à la peur de l'échec qui vont l'emmener loin dans l'errance.
Isabelle Autissier, en grande dame de la mer qu'elle est, et grâce à une superbe écriture, m'a tenu littéralement scotché jusqu'à la toute fin de l'histoire de cet homme qui avait oublié l'essentiel : « on ne ment pas à la mer, jamais ».
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