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La légende raconte que c'est afin de " tuer le temps " que Breton et Eluard se lancèrent dans l'écriture de ce recueil intitulé, avec un sens consommé de la provocation, L'Immaculée Conception. " La connaissance parfaite que nous avions l'un de l'autre nous a facilité le travail, diront-ils plus tard. Mais elle nous incita surtout à l'organiser de telle façon qu'il s'en dégageât une philosophie poétique. " Dans ce recueil en prose, on trouve réunies les deux tendances qu'incarnent Breton et Eluard au sein même du mouvement surréaliste : le premier, ardent défenseur de l'écriture automatique la plus baroque et la plus révolutionnaire, le second, plus incliné à une certaine transparence poétique, une évidence qui " désarme " le lecteur. Ici, leur volonté commune est affichée : à travers une parole radicalement nouvelle, il s'agit de livrer enfin le sens du monde et de l'existence, de partir en quête de l'extra-ordinaire.
Le recueil se compose de quatre sections distinctes : " L'Homme ", " Les Possessions ", " Les Méditations " et " Le Jugement originel ". La première trace en quelques pages l'épopée humaine, de la conception à la mort, et dessine en creux ce désir mystérieux, animal et sacré, qui sous-tend toute existence. La deuxième offre des variations autour des cinq délires recensés par la psychiatrie - la note qui figure en amorce annonce qu'il s'agit bien là de démontrer qu'il n'est pas de frontière entre le langage des prétendus fous et celui des poètes, la société fixant à elle seule les limites de sa tolérance. La troisième, " Les Méditations ", s'attarde un instant sur le quotidien dans ce qu'il connaît de plus étonnant, de plus merveilleux aussi : la surprise, l'incompréhensible, l'amour... À noter : trois pages mémorables en guise de khama-sutra littéraire. Enfin, renouant avec la forme proverbiale chère aux deux auteurs, " Le Jugement originel " délivre certaines vérités éternelles comme autant de mots d'ordre et incite à bannir toute tiédeur, dans la vie comme dans l'art.
KAMOULOX
André Breton et Paul Eluard pour L’immaculée conception. Intrigant au premier abord mais vois n’êtes pas au bout de vos surprises avec ce recueil poético-philosophique écrit en 1930. Les deux poètes surréalistes dont l’amitié s’est créé dix ans plus tôt, mettent leur plume en commun pour un objet improbable et hautement exigeant. Quoique. Est-ce de l’exigence ou l’expression même d’un subconscient totalement dénué de bon sens ? Est-ce un jeu ? Sûrement. Les editions Seghers renaissent alors en publiant leur légendaire carnet poétique à la conception admirable. Voir un quasi kamoulox entre deux grands écrivains demeure savoureux. Autant vous prévenir de suite, vous ne comprendrez pas tout même si le texte demeure en prose, Philippe Forrest qui signe la préface affirme même qu’aucun lecteur n’a encore compris le sens véritable de ce dernier. Il avait raison et même temps la poésie n’a pas besoin d’être comprise totalement. Bien entendu certains poètes en profitent et écrivent parfois sous Ecstasy pensant qu’ils ont trouvé un angle singulier. Eluard & Breton, rien qu’en prononçant ce duo, on imagine un Simon & Garfunkel aux envolées lyriques.
Il faudra prendre en compte l’époque de ce texte où la prise sur le réel ne fonctionne plus. Ils décident de fouiller dans leur subconscient tel un sursaut de survivance. En jouant avec les sonorités des mots, leur placement au sein d’une phrase et en utilisant des métaphores ou oxymores, le duo de poètes éclabousse un feu originel. Entre plagiat poétique et laisser aller sur le papier, on prend acte du génie de cette écriture dont on a du mal à imaginer qu’elle soit à quatre mains. Vous serez désarçonné, perturbé, voire saisi ou déçu mais vous aurez une émotion. Peu importe laquelle vois en aurez une. Arriver à déclencher cela en si peu de pages, en si peu de mots est une sorte d’exploit littéraire. Il déclenchera chez vous une réaction. Devant la production littéraire indécente des dernières années, rares sont ceux qui sortent d’une zone de confort bien souvent trop établie.
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