"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Roman de l'enfance et de l'adolescence, histoire d'une éducation, aventure psychologique et morale de portée universelle, Les Grandes Espérances, avant-dernière oeuvre achevée de Dickens, surprend par sa fraîcheur, le renouvellement constant de l'invention, le comique. Le héros-narrateur, Pip, passe de l'enfance dans un village, où il est apprenti-forgeron, à une adolescence fastueuse et dissipée à Londres. Les moments pathétiques alternent avec les instants cocasses. L'histoire du forçat enrichi et condamné à mort est digne de Victor Hugo. La présence des rêves, ou de certaines scènes fantastiques, comme la vue soudaine des gibets à l'entrée de la ville, donne au roman sa dimension poétique.
Classique et monumental: voilà les principaux adjectifs que m’inspire la lecture de ce roman, retraduit dernièrement par Jean-Jacques Greif pour les éditions Tristram. Il y a tout ce que l’on peut attendre d’une œuvre romanesque : l’histoire d’amour, l’aventure, le mystère, les rebondissements, la comédie sociale, la nostalgie et des ambiances très marquées.
Dickens, avec le talent qui le distingue dans l’écriture et la caractérisation des personnages, raconte l’histoire de Pip, un jeune orphelin qui vit avec sa sœur et son mari Joe dans un village du Kent. Elevé à la dure, destiné à devenir forgeron, le jeune Pip devient garçon de compagnie d’une vieille aristocrate, capricieuse et étrange, habitant au village. Abandonnée autrefois le jour de ses noces, sa vie s’est figée tout comme sa maison qui n’est que poussière et toiles d’araignée. Elle a adopté la jeune Estella pour en faire l’instrument de sa vengeance contre les hommes. Pip tombe amoureux d’Estella mais se rend bien compte du fossé social et culturel qui les sépare. Il rêve de devenir un gentleman, un lettré, lui dont les manières sont celles d’un rustre.
Le miracle se produit lorsqu’un mystérieux bienfaiteur finance l’installation de Pip à Londres et son ascension sociale. Et alors que l’ombre d’un forçat évadé plane sur son destin, Pip court vers des mirages.
C’est l’exemple même du roman d’apprentissage. On suit le cheminement de Pip vers l’âge adulte alors qu’il fait l'expérience des grands événements de l'existence. De son enfance où il rêve de s'élever socialement, en passant par sa jeunesse insouciante à Londres, jusqu’à la désillusion quand il découvre la source de sa fortune et sa lente prise de conscience sur sa vanité et ses fausses valeurs.
L’auteur brasse une multitude de thèmes universels: l’exclusion, les inégalités, le désir, la culpabilité, la jalousie, l’argent et c’est bien ce qui fait de ce roman une œuvre intemporelle. Il s’en dégage une profonde humanité car Dickens ne juge jamais les grandeurs et les faiblesses de l’Homme.
L’écriture est bien sûr irréprochable et la traduction restitue à merveille la diversité des langages selon les classes sociales ainsi que les touches d’humour qui parsème ce roman pourtant bien sombre.
« De Grandes Espérances » est le roman des illusions perdues et des espoirs envolés mais c’est surtout un roman inoubliable avec des scènes d’anthologie. L’occasion de redécouvrir en quoi consiste l’art de l’intrigue et l’art de la narration.
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