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Ce livre d'art, qui comprend l'intégralité de l'oeuvre poétique des Fleurs du Mal dans la deuxième édition (1861), augmentée des Epaves (1866) et de l'édition posthume (1868), soit 164 poèmes, s'annonce comme un nouvel événement culturel d'exception. Dernier des romantiques et premier des modernes, Charles Baudelaire s'attache à déchiffrer, à travers sa poésie, le mystère de la création. Le poète se fait le chantre d'une nouvelle génération artistique, en amorçant, dans une Europe en pleine industrialisation, un processus de sacralisation de l'art comme refuge spirituel. " Il s'agit, nous dit Diane de Selliers, de dérouler pour le lecteur un fil d'Ariane, qui entraîne celui-ci à travers l'oeuvre poétique la plus marquante, féconde et novatrice du XIXe siècle, et d'en approfondir avec lui le sens, au prisme d'une confrontation avec cent quatre-vingt-cinq oeuvres picturales appartenant à l'esthétique symboliste et décadente. " De Félicien Rops à James Ensor, en passant par Edvard Munch, Alfred Kubin, Gustave Moreau, Odilon Redon, Arnold Böcklin et Vladyslav Slewinski, c'est un " Musée imaginaire " qui s'organise, se construit et prend ici sa pleine et entière signification.
Quelle esthétique, mieux que celle du Symbolisme et de la Décadence, exprime pleinement cette tension permanente, entre spleen et idéal, qui nourrit Les Fleurs du Mal ?
Aussi les oeuvres proposées dans cet ouvrage singulier s'apparentent-elles à des révélateurs chimiques. Elles accusent les éléments de désespoir, d'angoisse, de pessimisme radical qui hantent un recueil marqué du sceau du conflit majeur entre bien et mal, beauté et laideur, bonheur rêvé et souffrance absolue, aspiration à la vie et pulsion de mort. Les choix d'oeuvres de Diane de Selliers soulignent les " correspondances ", terme éminemment baudelairien, entre deux univers, le poétique et le pictural, qui se renvoient l'un à l'autre dans un jeu complexe et subtil de miroirs réfractés au reflet infini. Cette inédite confrontation exacerbe chaque poème. Elle le dégage de la gangue des interprétations souvent convenues et lui restitue un pouvoir souverain. Diane de Selliers n'a pas hésité à prendre " à bras le corps " chacun des 164 poèmes, pour les mettre en abyme et en résonance harmonique avec les oeuvres picturales symbolistes et décadentes les plus significatives. Mais le Symbolisme n'est pas seulement ici affaire de courants picturaux. Il affirme une philosophie tragique de la modernité qui traverse Les Fleurs du Mal, comme elle rythme d'autres oeuvres antérieures emblématiques, présentées dans l'ouvrage, notamment cinq tableaux de Goya, le peintre qui, par excellence, sait fouiller et mettre à nu les tréfonds de l'âme humaine.
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