Je ne sais pas si l'on doit ce phénomène à l'essor du livre électronique ou à la dématérialisation galopante, mais depuis quelque temps, je ne cesse de récupérer des livres. Anciens, récents, livres de poche, éditions brochées, romans, documentaires, essais, ma bibliothèque personnelle grossit...
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Je ne sais pas si l'on doit ce phénomène à l'essor du livre électronique ou à la dématérialisation galopante, mais depuis quelque temps, je ne cesse de récupérer des livres. Anciens, récents, livres de poche, éditions brochées, romans, documentaires, essais, ma bibliothèque personnelle grossit beaucoup en ce moment. Parmi les derniers arrivés figure "Le zèbre" d'Alexandre Jardin, un auteur que je n'avais jamais lu jusqu'à présent même si je connaissais l'homme bien avant qu'il n'envisage de se présenter aux élections présidentielles.
Je connaissais également "Le zèbre" pour avoir vu il y a bien longtemps l'adaptation cinématographique dans laquelle Thierry Lhermitte jouait le rôle de Gaspard. J'en garde le souvenir assez vague d'un film original et surtout d'un personnage un brin iconoclaste. C'est donc avec à l'esprit les grandes lignes de l'histoire que je me suis lancé dans mon premier Alexandre Jardin et force est d'avouer que j'ai plutôt apprécié l'expérience.
La plume de l'auteur m'a plu immédiatement. Le roman a un peu moins de trente ans, mais l'approche narrative a gardé toute sa fraîcheur. Le début du "Zèbre" a un côté cinématographique façon voix off avec un narrateur qui refuse de rester à bonne distance de ses personnages et se plaît plutôt dans le rôle d'observateur de l'ombre de ce manège amoureux dans lequel il nous propose de monter. Tout au long du récit, on sent un réel amour pour Gaspard et Camille, deux héros dont il restitue toute l'humanité, leur offrant des moment de grâce, mais n'hésitant pas à les malmener sans se départir toutefois d'une bienveillance appréciable.
Et on le comprend ! Comment ne pas tomber sous le charme de ce zèbre, singulier personnage, aussi irritant que lumineux, dont les frasques et l'esprit décalé donnent tout leur sel à des scènes tour à tour saugrenues, fantasques ou émouvantes ? Son âme sœur n'est pas non plus en reste et si l'on a tendance au début du roman à se placer plutôt du côté de Camille, moins exubérante et démonstratrice, difficile de dire passée la première moitié du roman de quel côté penche la folie.
Le sujet est universel, mais son traitement est original tout comme le sont les manigances du zèbre qui ne cessent de nous surprendre jusqu'au dénouement final qui fait basculer le roman dans un autre registre. Lorsqu'Alexandre Jardin a écrit ce roman, il avait à peine plus de vingt ans et pas forcément l'expérience émotionnelle pour s'attaquer à un tel sujet - Comment concilier passion et longévité dans un couple ? - et pourtant, il s'en empare comme personne, aidé en cette tâche par un humour omniprésent et une volonté de sortir des sentiers battus en misant - comme il l'explique d'ailleurs dans les annexes de mon édition (France Loisirs, 1988) - avant tout sur l'émotionnel.
L'histoire est habile, la plume nous offre régulièrement de jolies fulgurances stylistiques, quelques bons mots, mais également des réflexions d'une rare finesse psychologique sur l'amour, la passion, la société de l'époque ou les rapports humains. Bref, on se laisse prendre sans mal à ces jeux d'amour, à ces élans passionnels, à ce tango qui n'en finit plus entre deux partenaires à vie dont on ne sait si les mouvements sont semblables ou dissemblables aux nôtres.