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IMMENSE EST LEUR TALENT
« Rouge est mon coeur
Au duvet de ta gorge »
Déclencher une émotion avec des vers et un dessin est chose ardue. Pourtant, elles l’ont fait. Elles s’appellent Murielle Szac et Nathalie Novi et arrivent avec magie à créer une nébuleuse poétique qui harponne le lecteur. Quant à eux Hala et Haïssam, les deux enfants syriens que Murielle Szac met en poésie, ils me paraissent si proches. À travers leur parcours où le fil rouge sépare les pages, on hume l’odeur de la miche. En jouant sur la temporalité brutale d’un avant-après, on se construit avec ces enfants. Ils sont syriens, connaissent déjà les affres du monde et de l’être humain alors que leur vie ne fait que débuter.
Déjà blessés, déjà meurtris, déjà accablés par le poids d’un monde abscons qu’on aimerait voir plus lumineux partout sur le globe. Ils rêvent de chevaucher un dragon, de conquérir le ciel comme beaucoup d’autres, ils rêvent d’avoir des ailes. Le grand frère protège ou tente de le faire, n’y arrive pas toujours. Une fois de plus chez Bruno Doucey Éditions, la poésie creuse son sillon dans l’humain. Dans le poétique concret. Car les bombes pleuvent sur Damas. On ne les compte plus. On ne les compte pas. Mieux vaut ne pas entendre le bruit du métal. Murielle Szac agite ses mots avec silence, avec parcimonie et beauté. Elle avance ses pions sans jamais sauter une case. Elle prend le temps. S’assoit. Regarde. Et nous éclaire. Hala et Haïssam se sont serrés fort et ont « dévoré l’obscur ». L’école n’est plus, alors on rêve de s’envoler très vite, loin d’ici et du tumulte absurde environnant. Reste le goût des bonbons d’avant bombardement…
Les dessins somptueux (le mot est faible) de Nathalie Novi incarnent et exhaussent les mots de Murielle Szac. L’un ne pourrait aller sans l’autre. Ce fil rouge perpétue la lignée de ces enfants que l’illustratrice ne souhaite pas oublier. Les mains sur les oreilles, regard noir de misère ou de détresse, ils hanteront sûrement vos esprits. Si je le pouvais, je souhaiterais que mon appartement soit décoré de dessins de Nathalie Novi. Dans le sombre, elle y glisse toujours cet espoir qui jaillit, cette main tendue qui ne reste pas vide. À ceux qui « vivent a voix basse sur la pointe des pieds pour ne pas déranger », gardez espoir
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