Mark O’Dugain (il s’agit donc d’une fiction !), professeur canadien d’histoire contemporaine, n’a jamais digéré la mort de ses parents, un double suicide début 1968, à quelques semaines d’intervalles. Il n’avait pas 15 ans lorsque sa mère se tire une balle dans la tête. Quelques semaines...
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Mark O’Dugain (il s’agit donc d’une fiction !), professeur canadien d’histoire contemporaine, n’a jamais digéré la mort de ses parents, un double suicide début 1968, à quelques semaines d’intervalles. Il n’avait pas 15 ans lorsque sa mère se tire une balle dans la tête. Quelques semaines ensuite, son père précipite son véhicule du haut d’une falaise. Ce suicide là, précisément, à fait naitre une idée dans son esprit, une idée qui frise l’obsession : l’accident de son père a eu lieu le même jour que l’attentat qui a couté la vie à Robert Kennedy à LA. Il sent que la mort de ses parents à un lien avec cet événement et décide de consacrer sa thèse à la vie des Kennedy, comptant bien sur ce travail d’historien pour élucider le mystère du double suicide. Le roman de Marc Dugain est double, un chapitre sur deux, c’est l’histoire de sa famille qui est longuement décortiquée. Toute cette partie là met un certain temps avant de devenir intéressante, une bonne dizaine de chapitres au moins. Les digressions familiales semblent tourner à vide pendant une bonne dizaine de chapitres, sans rapport avec le cœur du sujet. Il faut être patient car quand il commence à évoquer les travaux de son père, éminent psychiatre et spécialiste de l’hypnose, cela devient pour le coup très intéressant et drôlement plus pertinent. Les autres chapitres racontent les 5 dernières années de la vie de Robert Kennedy. Ces chapitres là, qui vont de l’attentat de Dallas à celui de Los Angeles (racontés plus ou moins chronologiquement), sont passionnants d’entrée, surtout si comme moi on aime l’Histoire, et l’Histoire Contemporaine. Dugain y décrit un Robert Kennedy n’ayant jamais vraiment surmonté la mort de son frère ainé, un Robert Kennedy plus idéaliste, plus torturé que son frère aussi. Le Robert Kennedy raconté par Dugain est un Kennedy plus à gauche que JFK, assassiné alors (ou plutôt parce) qu’il était quasi assuré d’accéder à la Maison Blanche. Je pense depuis longtemps que de tous les Kennedy, c’était Robert le plus intéressant politiquement, et que l’aura de son frère l’aura éclipsé toute sa vie alors qu’il était politiquement plus affuté. C’est pratique la fiction, pour mettre par écrit ce que l’on pense de ces deux attentats, tout en se préservant d’une accusation de complotisme . Concernant la mort de JFK, la théorie du livre épouse celle de Jim Garrison et elle est désormais bien connue. La mort de RFK est elle aussi percluse d’éléments troublants. Je ne sais quel crédit il faut accorder aux propos de Dugain sur l’attentat de LA, mais son travail à l’air terriblement documenté et Dugain est terriblement convaincant. Les deux histoires, celles des parents O’Dugain et celle des Kennedy se rejoignent dans une fin que l’on a vu venir d’assez loin, quand même. Les dernier chapitres sont une sorte d’alibi pour dédouaner l’auteur de tous soupçon de complotisme, d’autres explications plus « rationnels » sont exposées, finalement, c’est au lecteur de choisir sa fin. J’ajoute pour finir que c’est très bien écrit, avec parfois des formules qui sonnent comme des petits uppercuts, on est même tenté de relire certains paragraphes particulièrement bien troussés. On peut même trouver quelques petites pointes d’humour ça et là et quelques vacheries bien senties sur Le père Bush (et le fils aussi, à qui « il manque ¼ d’heure de cuisson » !), sur Mitterrand et surtout sur Johnson, qui sort du roman de Marc Dugain dans un piteux état !