"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dans les années 1960-1970, enfant puis adolescent, je vivais en Charente et Charente-Maritime. Un de mes oncles habitait près de Bellac, en Haute-Vienne. Chaque fois que nous allions lui rendre visite, nous faisions une halte à Oradour-sur-Glane et/ou au Mémorial de la Résistance à Chasseneuil (*). Vous comprendrez pourquoi, quand j'ai découvert que cet ouvrage était en préparation, je l'ai commandé avant même sa sortie.
Je n'ai pas été déçu. Comme dans "Après la rafle", avec Joseph Weismann, Delalande et Bidot mettent leur art au service de la parole et du souvenir. Le dessin est simple et colorée, les textes concis, précis, sans ostentation. On sent que l'objectif est d'enregistrer, d'illustrer, la mémoire, pas de l'enjoliver ou de l'assombrir ; les faits relatés, la mémoire des survivants, se suffisent à eux-mêmes.
Un bouquin à mettre entre toutes les mains, dès 10 ans et plus, car narration et illustration privilégient la retenue et l'émotion, pas le sensationnel et la barbarie.
(*) une anecdote personnelle : à l'époque (années 1960), le Mémorial de la Résistance de Chasseneuil regorgeait de massifs de cotonéasters rampants. Un jour, mon père en fit une bouture qu'il planta dans son jardin, où la plante se développa à merveille. Près de quarante ans plus tard, quand j'ai acheté mon pavillon, j'ai reproduit l'opération. Mon épouse ne trouve pas la plante très gracieuse et voudrait s'en débarrasser ; mais j'ai beau la tailler le plus court possible, tous les ans elle fait de nouvelles pousses. Résistante !
Chronique illustrée : http://michelgiraud.fr/2024/06/09/le-dernier-temoin-doradour-sur-glane-da-delalande-et-l-bidot-avec-a-hebras-chez-harper-collins-bd-devoir-de-memoire/
Les auteurs commencent par nous rappeler que l'homme a toujours été, depuis la préhistoire, un escaladeur : pour échapper à ses prédateurs en grimpant aux arbres ou pour construire un habitat sécurisé au milieu de falaises. Les archéologues ont en retrouvé de multiples traces.
Ce n'est que dans la seconde moitié du XIXème siècle que l'escalade devient un loisir sportif. Encore une fois, ce sont les britanniques qui tirent les premiers : lassés d'atteindre les sommets par les voies les plus faciles, ils décident de le faire en s'attaquant aux plus difficiles. Ainsi naquit l'escalade moderne.
Le grand intérêt de cette bande dessinée est de montrer l'évolution des pratiques tout au long d'un siècle et demi. Il y a bien sûr la modernisation des équipements (cordages, piolets, crampons, pitons...), mais également les nouveaux défis que se lancent les pratiquants (cordées, pratique libre, en solo, à l'assaut de parois de plus en plus difficiles...). Et puis, bien sûr, l'apparition des murs artificielles où l'on peut créer une addition de difficultés que l'on ne rencontre pas en milieu naturel. Enfin, on y découvre nombre de personnages qui ont participé à la création de (et, pour les plus jeunes, continuent d'alimenter) la légende de l'escalade (ou de la varappe).
On sent que Catherine Destivelle et David Chambre maîtrisent le sujet et ont travaillé le scénario. On retrouve la qualité du dessin de Laurent Bidot, assisté de Clémence Jollois pour les couleurs. Le résultat, plus qu'une BD, est un "beau livre", avec une couverture originale au toucher "rocheux", que l'on a plaisir à feuilleter et que j'aurai plaisir à offrir.
Chronique illustrée : http://michelgiraud.fr/2023/12/19/il-etait-une-fois-lescalade-de-c-destivelle-d-chambre-et-l-bidot-aux-editions-du-mont-blancles-arenes-bd-tres-bel-historique-en-bd/
Ce roman graphique est un livre témoignage. Celui de Joseph Weismann qui fut raflé à Paris le 16 juillet 1942. Après cinq jours interminables , parqués au Vél’ d’Hiv, il fut envoyé avec ses parents et ses deux sœurs au camp de Beaune la Rolande. Avec un autre garçon de son âge, Joseph Koganovitch, ils décident de s’évader et y réussissent. Ils partent ensuite chacun de leur côté.
L’histoire commence quand Jo Weismannn reçoit un coup de fil du cousin de Jo Koganovitch et qu’ils se retrouvent aux Etats Unis où vit ce dernier. Leurs retrouvailles donnent lieu à de nombreux flash-back qui racontent leur parcours de vie de leur évasion à ce jour. Puis c’est Joseph Weismann qui poursuit son récit et parle de sa rencontre décisive avec Simone Weil en 1996 qui l’exhorte à raconter son histoire au plus grand nombre par devoir de mémoire. Il va alors sillonner la France, de collèges en lycées afin de témoigner, « de faire entendre les voix du souvenir ».
En 2009, il sera consultant pour le film « La rafle » inspiré de son témoignage et en 2011 avec la collaboration de Caroline Andrieu, il sort un livre « Après la rafle » adapté ici en BD.
Joseph Weismann termine régulièrement ses conférences par ces mots « Mon nom est Jo Weismann. Et je vous en prie mes enfants, n’acceptez pas l’inacceptable »
Ce roman graphique nous raconte « la guerre d’un enfant de 11 ans , abandonné parmi d’autres dans un camp d’orphelins. Enfants perdus dans une guerre d’adultes qui tentaient de survivre, encadrés de soldats complices d’un régime de haine. Il raconte une vie d’évadé et d’exil à lui-même C’est l’histoire d’un enfant qui finalement a réussi à survivre pour les siens ».
Cet album a pour but la transmission de la mémoire d’une des pages les plus sombres de notre histoire afin que cette tragédie ne se reproduise jamais. Il est à destination des jeunes comme des adultes
C’est un album qui, une fois refermé, résonne encore longtemps en nous .
L'Histoire, on la connaît. Mais pas cette histoire en particulier. Le courage d'un p'tit garçon qui va fuire son camp à la recherche de sa famille. En plus du courage, il lui faudra beaucoup de chance et trouver des personnes prêtent à l'aider.
La première partie de la bd "survole" la rafle mais est suffisamment détaillée pour être très émouvante. Ensuite arrive l'aventure, l'évasion. Le ton est plus léger même si le contexte est tout aussi horrible. En parallèle nous voyons les retrouvailles des deux Jo et nous passons d'une époque à une autre au fil des événements racontés. Enfin nous rattrapons le présent avec Mr Weismann, 90 ans, survivant de la Shoah, et qui joue ici son rôle de passeur de témoin.
Ce n'est pas une bd facile, mais indispensable qui remplit parfaitement son devoir de mémoire. Car comme le dit Joseph, "n'acceptez pas l'inacceptable".
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