"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un album qui parle de la vie et du temps qui passe. Nous suivons un personnage féminin de la naissance à la mort. Au fil de sa vie, elle va grandir, mûrir et vieillir.
Cette personne va changer, physiquement, bien sûr, mais les traits de sa personnalité vont évoluer. Ce personnage était souple puis le sera moins. Elle apprenait mais va transmettre avec persévérance. Elle était curieuse puis, avec le temps, va devenir exigeante. Elle était insouciante mais va devenir utile. Elle doutait d'elle et va savourer d'être elle-même.
Le texte de Laëtitia Bourget se veut réaliste. Il n'enjolive pas la vieillesse. Elle aborde la solitude, la tristesse, le sentiment de ne plus être utile. Son texte n'est pas sombre non plus, il montre qu'avec le temps notre rôle change, évolue.
Les dessins d'Emmanuelle Houdart sont magnifiques, d'une imagination débordante. Son univers est très singulier. La relation entre l'homme et la nature est omniprésente. L'homme est entouré d'arbres, de fleurs, de plantes, d'insectes, d'animaux. Le vert est d'ailleurs une couleur très présente dans ses illustrations.
J'aime l'originalité, les couleurs vives, les motifs sur les vêtements des personnages, les petits détails qu'il faut bien regarder. Cet album à quatre mains aborde les étapes de la vie avec beaucoup de finesse et délicatesse.
Une mention spéciale à l'objet livre très soigné et à l'originalité du bandeau de couverture qui permet de jouer sur le visage du personnage féminin.
Le titre de l'album est si simple que l'on serait tenté de ne pas lui prêter attention, et pourtant...
"Ma mère" n'est pas toutes les mères, elle n'est pas un fantasme de la maternité, elle n'est pas ce que l'on voudrait que soient les mères. C'est une mère unique et saisie dans ce qui la distingue.
"Ma mère" n'existe que dans ce lien qui l'unit à moi, que dans cette histoire que je bâtis pour nous et à laquelle le père participe pleinement. Cela est tellement vrai que chaque lecteur rencontre dans cet album une mère différente. Elle est bipolaire pour les uns ("Ma mère a le cœur entre soleil et nuit"), abandonnique pour les autres ("Je ne peux m'empêcher de penser qu'elle ne reviendra peut-être jamais"), voire borderline ("Un tout petit rien qui fait son rire sauvage").
"Ma mère" n'est pas le portrait d'une femme mais d'une mère, et cela change tout. Il ne s'agit pas d'une biographie mais de ce qui se noue et se dénoue dans le maternage. Une mère refuge ("entre ses pattes bien au chaud je me blottis"), qui sait être source d'angoisses et de réassurance tout à la fois :
"Le chemin vers toi
Jamais je ne pourrai l'oublier"
Cet album est une formidable surface de projection. Rien n'y est imposé, le lecteur y trouvera un espace grand ouvert.
Un album qui attire le regard par son grand format puis par sa couverture si finement illustrée.
Les dessins pleine page que l'on retrouve tout au long de ces portraits mis en mots par Marie Desplechin, captent notre attention et nous pourrions passer des heures à les décortiquer, les observer, les admirer.
Puis il y a ces textes peut être un peu trop denses dans leur présentation qui étouffent le tout mais qui nous racontent des personnages fascinants, souvent blessés. Le fil conducteur, le narrateur, qui les a tous connus nous les présentent un à un sans tabous.
Un album à la fois fascinant et dérangeant.
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