Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Devine qui a zwanzé Le Soir … Faire sourire, provoquer l’hilarité de leurs compatriotes au détriment de l’occupant, des rexistes et autres collabos, l’humour, telle est l’arme utilisée par une poignée de résistants bruxellois en cet automne 43. Comment ? Ni plus ni moins qu’en éditant et diffusant un faux exemplaire du Soir, un des plus célèbres quotidiens de l’époque pour célébrer le 11 novembre en pastichant l’original et maniant avec dextérité la zwanze, cet humour typiquement bruxellois afin de tourner en dérision occupants et autres consorts. C’est cet exploit entré dans la légende outre-Quiévrain mais peu voire pas connu chez nous qui est relaté dans l’album au titre évocateur Le Faux soir paru - fort judicieusement - en novembre dernier chez Futuropolis. Denis Lapière et Daniel Couvreur sont au scénario, Christian Durieux au dessin et Sébastien Gnaedig à l’édition.
Du Soir volé au faux Soir
Bruxelles, 9 novembre 1943. Mais qu’est-ce qui fait sourire et rend si joyeux les Bruxellois plongés dans la lecture du journal Le Soir qu’ils viennent d’acquérir à l’aubette du coin ? Le Soir, c’est ce grand quotidien qui tirait à plus de 250 000 exemplaires, que les Allemands se sont empressés de mettre sous leur coupe dès 1940, entraînant la démission et le passage dans la clandestinité de son propriétaire la famille Rossel ainsi que des plumes de la rédaction qui, refusant de travailler pour l’occupant, seront remplacées par d’autres plus accommodantes … Le journal sera dès lors qualifié par la population de Soir « volé » ou encore Soir « emboché », épithète on ne peut plus évocateur.
Cette date du 9 novembre n’a pas été choisie par hasard : Il s’agissait, suivant les préconisations du F.I (Front de l’Indépendance, mouvement de résistance belge), de mener une action afin de commémorer le 25ème anniversaire de l’armistice, symbole de la défaite allemande. Pourquoi le 9 et pas le 11, me direz-vous ? Affaire résolue dans l’album ! Et qui a eu cette idée folle ? C’est Marc Aubrion, alias Yvon, responsable de la presse clandestine « un grand échalas nerveux et enthousiaste » dixit Jean (René Noël de son vrai nom), le responsable du F.I pour le Brabant et le Hainaut. Le projet validé par Jean, d’autres vont rejoindre cette aventure hors du commun. Alors bien sûr, cela va demander une sacrée organisation. Il va falloir trouver en moins de 20 jours un imprimeur, du papier, un moyen de distribuer le journal et bien évidemment de l’argent. Ce 9 novembre donc, mission accomplie ! Les Allemands, à la recherche des coupables, vont pendant longtemps faire chou blanc jusqu’à ce qu’un jour ... un petit détail …
Lapière, Couvreur, Durieux, Gnaedig, les mousquetaires de l’investigation
La couverture est l’illustration parfaite de la structure du récit. Tout au long de l’album, 2 fils narratifs, vont s’entrelacer pour non seulement nous raconter l’histoire de ce fameux faux Soir mais également nous faire partager les recherches des quatre hommes à l’origine de l’ouvrage. Tagada, tagada, les voilà en haut de la couverture devant l’immeuble du journal. Prenons-les dans l’ordre: Denis Lapière, le scénariste avec lequel le dessinateur avait déjà collaboré lors de son incursion dans l’univers jeunesse avec la série Oscar, le journaliste Daniel Couvreur, chef du service culture du quotidien Le Soir, le dessinateur Christian Durieux et enfin Sébastien Gnaedig, l’éditeur de Futuropolis. Nous allons donc assister à leurs réunions de travail enthousiastes et les retrouver dans divers épisodes au Musée de la Résistance, à la rédaction du journal Le Soir, devant les locaux de l’imprimerie aujourd’hui disparue, sur l’emblématique place de la Bourse … Ce procédé d’inclusion du présent dans le récit historique rompant la distanciation qu’on pourrait avoir avec une approche purement documentaire, rend le récit plus vivant, introduit du suspense et fait jaillir l’émotion. Un autre élément vient renforcer ce choix scénaristique : le traitement graphique.
Christian Durieux, le troisième homme
Rappelons tout d’abord que Christian Durieux, Bruxellois installé dans le Bordelais depuis 2008 est un véritable caméléon de l’illustration qui a toujours eu à cœur d’adapter son style à son propos. Le ton où plus exactement les tons sont donnés dès la couverture qui prend en compte les 2 temporalités de l’album et le traitement graphique dédié à chacun. Le dessinateur a fait le choix de la couleur, de bichromies pour être exacte, et d’un trait simplifié pour illustrer les différents épisodes des recherches menées par nos quatre enquêteurs. Quant à la partie relatant l’épopée du faux soir, elle est réalisée dans un somptueux noir et blanc qui rappelle la technique utilisée dans le magnifique dyptique « Geisha ou le jeu du shamisen » scénarisé par Christian Perrissin, technique que le dessinateur affectionne particulièrement et dans laquelle il excelle à mettre en valeur les ambiances nocturnes notamment grâce au réalisme des décors, l’accentuation de l’effet des ombres et de la lumière et un aspect charbonneux qui font ressortir la tension et retranscrivent parfaitement l’atmosphère oppressante de l’époque. Il y a quelque chose de Carol Reed dans Christian Durieux d’autant plus que le découpage cinémascope en trois bandes confère au récit une fluidité et une continuité spatio-temporelle très 7ème art.
Zwanze contre les loups
Le fac-similé de cette édition mythique joint à l’album est non seulement une façon de renforcer l’hommage rendu aux auteurs de ce canular héroïque mais nous permet également de découvrir et savourer la zwanze ainsi que les qualités littéraires des rubriques truffées d’allusions non voilées à d’anciens membres du gouvernement belge et collaborateurs connus. Je ne peux résister à l’envie de vous en citer deux : « Le mystère de la chambre brune », feuilleton de G. Stapo dans lequel on apprend que le code du coffre d’Hitler qui contient ses plans d’attaque secrets n’est autre que Z.O.O.T (qui signifie fou en Bruxellois) et une petite annonce : « PEAU DE L’U.R.S.S, vendue trop tôt , toujours disponible chez A. Hitler, Blietzkriegsallee, Berchtesgaden ». Parcourir ce feuillet légendaire à la suite de l’album est un véritable régal !
Bravo à Yvon, Jean, Charles et les autres pour leur courage et leur détermination ! L’humour comme arme de résistance, quelle merveilleuse idée ! Malheureusement, la facture fut lourde et les conséquences terribles car ceux d’en face ne l’avaient pas, eux, le sens de l’humour. Merci à Denis, Daniel, Christian et Sébastien d’avoir conjugué leurs talents afin de diffuser leur histoire, leur donnant ainsi une seconde vie et la place qu’ils méritent dans nos mémoires.
Pacific Palace aux éditions Dupuis est le dix-septième opus de la série « Le Spirou de ...». Cette fois-ci, c’est Christian Durieux qui s’y colle et nous entraîne pour trois jours et trois nuits dans un envoûtant huis-clos ayant pour cadre un hôtel de luxe situé au bord d’un lac tandis que le temps semble suspendu et que dehors les éléments se déchaînent. Un dictateur en fuite, des tractations secrètes, tous les ingrédients sont là pour nous embarquer dans une captivante intrigue politico-policière. Ajoutons que pour corser le tout, le despote n’arrive pas seul, mais accompagné de sa femme et de sa ravissante fille …Politique et amour feront-ils bon ménage ?
Ce n’est plus au Moustic Hôtel mais au Pacific Palace que Spirou officie. Il n’est pas le seul à avoir coiffé le calot puisqu’il a réussi à faire embaucher Fantasio, alors sans emploi, en tant que groom. Cet établissement prestigieux niché entre lac et montagne a été réquisitionné, vidé de tous ses clients et, outre nos deux lascars, le staff « trié sur le volet », réduit au minimum : Le directeur M. Paul, Julia la femme de chambre et le cuisinier M. Reynold. Le parc cependant accueille un important dispositif de sécurité constitué de gendarmes et de tireurs d’élite. Il faut dire qu’on attend la venue d’Iliex Korda alias « Le boucher », dictateur déchu d’un petit pays des Balkans, le Karajan, venu trouver refuge en France et devant rencontrer secrètement un personnage important. Rien ne doit fuiter ! Une bonne raison de tout boucler afin d’éviter toute incursion des journalistes. Seccotine en est réduite à faire le pied de grue devant les grilles fermées. Le tyran arrive, accompagné de ses imposants gardes du corps, sa femme et …de la fascinante Elena, leur fille. Spirou, subjugué, va plonger dans les yeux verts de la belle, s’y noyer, bref, en tomber immédiatement amoureux… Coups de vent à l’extérieur, coup de foudre à l’intérieur! Coupés de tout, ce petit monde va vivre des journées en apparence banales baignant dans une ambiance feutrée quoiqu’un peu mystérieuse jusqu’au troisième soir – Ah! la sublime scène de la piscine, élément central de l’album – à partir duquel tout va basculer et les évènements se bousculer ...
La dimension politique
Cet album est la concrétisation d’un projet imaginé par Christian Durieux en 1993. Que ferait la France si un dictateur avec qui elle a entretenu des liens étroits venait se réfugier chez nous après sa destitution ? Voilà la question que s’est posée l’auteur suite à la chute du mur et des dictatures d’Europe de l’Est.
Le pitch d’alors? Un huis-clos dans un hôtel, un dictateur déchu, un membre du personnel qui tomberait amoureux de la fille du tyran, une météo épouvantable, des négociations en catimini … Mais cela ne fonctionnait pas jusqu’à ce que lui vienne l’idée de faire de Spirou et son acolyte Fantasio deux héros complémentaires, deux grooms qui seraient « les deux faces d’une même pièce », Fantasio en deuxième groom mal embouché, ses démêlés avec Spirou, M. Paul et les gardes du corps servant le ressort humoristique de l’histoire. Quant à Iliex Korda, s’il a les traits de Nicolae Ceausescu, dictateur roumain déchu en 1989, on ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec Jean-Claude Duvalier alias Bébé Doc, tyran haïtien, venu se réfugier dans un hôtel de luxe sur les bords du lac d’Annecy en 1986.
Romance contrariée et tragédie classique
Elena est la « dose de romantisme nécessaire à tout bon récit » On a ici affaire à un Spirou plus adulte qui, amoureux, se perd dans ses rêveries mélancoliques et c’est Fantasio qui, tout en se posant en rival, passe à l’action en tentant de découvrir la vérité en vue du scoop qui lui remettrait le pied à l’étrier dans le milieu journalistique.
Une tragédie classique : Tout comme dans Un enchantement, (Futuropolis- Louvre Editions), on retrouve l’unité de lieu : l’hôtel (le musée), l’unité de temps : 3 jours (une nuit) et l’unité d’action :une histoire d’amour dans un contexte politique trouble.
Un coloriste hors-pair
Christian Durieux, Bruxellois installé dans le Bordelais depuis 2008 est un véritable caméléon de l’illustration qui a toujours eu à cœur d’adapter son style à son propos. S’il a collaboré avec différents scénaristes dont, pour ne citer qu’eux, Jean-Pierre Gibrat pour Les gens honnêtes et Denis Lapière pour son incursion dans l’univers jeunesse avec Oscar, il est ici seul aux manettes tout comme il l’avait été pour Un pont, Un enchantement et Benito Mambo. Son découpage cinématographique, ses cadrages léchés, son utilisation de la lumière notamment dans les scènes nocturnes mettent tour à tour en valeur le côté envoûtant du récit et la tension qui règne. Adepte de la couleur directe, sculpteur d’ambiances, il confirme ici son immense talent de coloriste. Les ocres mystérieux et les bleus profonds de cet opus ainsi que les pages muettes sont de toute beauté et illustrent à merveille les différentes atmosphères. En témoignent les deux magnifiques couvertures : la version classique dans les tons bleus évoquant la fameuse scène de la piscine, et la version spéciale dans les tons orangés sur laquelle Spirou et Elena semblent rejouer la scène du balcon de Roméo et Juliette dans les jardins de l’hôtel qui ne sont autres que ceux de « L’année dernière à Marienbad » d’Alain Resnais. L’hôtel lui-même fait référence à des lieux bien réels : sa façade est celle de l’hôtel de l’Esplanade de Zagreb, et son intérieur art déco, notamment la réception, rappelle l’hôtel Métropole de Bruxelles.
Fin alternative et bande son
La fin est ouverte mais, pour ceux qui désireraient prolonger encore un peu la magie du récit, le journal Spirou a publié un épilogue inédit « Souvenirs du Pacific Palace » dans le numéro 4317 du 6 janvier.
Autre bonus : Une bande-son inspirée par l’incontournable scène de la piscine (Eh oui, encore elle !) a été composée spécialement pour l’album par Cocoon, un groupe français. Elena et Spirou nous donnent chacun leur vision de leur amour a priori impossible : Elena dans « Blue Night » et Spirou dans « Sweet Lena ».
Un Spirou inspiré. Une atmosphère envoûtante, une intrigue pleine de rebondissements, Spirou touché par Cupidon, des magouilles politiques et un beau jeu de dupes dans un somptueux cadre fin de siècle empreint de mélancolie … autant d’éléments qui font de Pacific Palace un album à part dans l’univers du célèbre groom à savourer sans modération.
Bien réussi.
Je ne connaissais pas ce dessinateur.
Son spirou est de très bonne facture avec une ambiance particulière pour cette petite histoire bien conduite.
Parce qu’il appartient à la maison d’édition Dupuis et non aux ayants droits de son créateur (Rob-Vel en 1938), le personnage de Spirou passe d’un dessinateur à l’autre dans sa série mère « Spirou et Fantasio » et surtout dans la collection de one-shots « le Spirou de » dont « Pacific Palace » est la 17e déclinaison. Christian Durieux qui nous avait déjà envoûtés avec « Geisha, le jeu du Shamisen » ou « Un enchantement » en est l’auteur ; une association qui a priori ne coule pas de source et pourtant ...
Dans un hôtel de luxe, au bord d’un lac alpin, Spirou regrette d’avoir fait engager à ses côtés Fantasio limogé du « Moustic » car l’ex-journaliste n’a vraiment pas la vocation de groom et multiplie les impairs, faisant enrager M. Paul le directeur de l‘établissement. Mais ce dernier est condamné à faire avec car l’hôtel a été réquisitionné et vidé de sa clientèle pour accueillir discrètement un hôte encombrant : Iliex Korda, dictateur déchu du Karajan accompagné de sa garde rapprochée, sa femme et sa fille Elena aux envoûtants yeux verts…
« Le petit théâtre de Spirou »
Durieux déclare que la Bd est souvent comparée au cinéma mais qu’il « la conçoi[t] différemment. Elle a en effet plus à voir avec le théâtre. Chaque case est une petite scène ». Or, on peut voir dans « Pacific palace » une construction et des thématiques qui l’apparentent à ce genre littéraire.
D’abord dans l’élément humoristique (ADN de la série) qui est introduit grâce au personnage de Fantasio. On rit souvent de ses impairs, de sa naïveté et même du duo qu’il forme avec Spirou et qui n’est pas sans rappeler Laurel et Hardy ; mais plus encore ce caractère virevoltant, vibrionnant, un peu pleutre aussi rappelle le valet de comédie (et donne ainsi un nouveau lustre au costume de groom) tandis que la rivalité amoureuse ou les quiproquos évoquent, eux, le vaudeville.
Spirou est ici beaucoup plus témoin et spectateur qu’habituellement ; il n’y a pas d’actions bondissantes avec un « super-groom » mais un huis clos qui se déroule sur un peu plus de trois jours et trois nuits. On a une unité de lieu, une unité d’action et un traitement du temps en trois phases qui rappelle celle du drame romantique : exposition (jour 1), le nœud (jour 2) et la catastrophe (jour 3). D’ailleurs l’auteur met des indications de date pour signaler ces trois étapes un peu comme le ferait un dramaturge avec des didascalies. Ensuite, comme l’indique la couverture réservée à l’édition limitée dans laquelle Spirou et Elena semblent interpréter la scène du balcon de « Roméo et Juliette, Durieux reprend la thématique du drame shakespearien de l’amour impossible et celle du drame hugolien de l’amour entravé par la raison d’état. Enfin, il met en scène grâce à cette composition et également à l’aide d’une mise en abyme du « jeu », les faux-semblants qui règnent dans la société et plus particulièrement sur la « scène » politique internationale …
Une fable politique
Nous voilà donc bien éloigné des aventures ludiques de Spirou ! L’album permet alors une réflexion politique à la manière des « Spirou » d’Emile Bravo. Christian Durieux portait ce projet depuis … 1993 quand les dictatures d’Europe de l’Est tombaient en cascade après la chute du Mur. Il se demandait ce que ferait la France si un dictateur avec lequel elle aurait entretenu des liens étroits s’y réfugiait une fois destitué. Mais Si c’est Ceausescu, le dictateur roumain surnommé le « Génie des Carpates » ou « le Danube de la pensée » qui a servi de modèle à Durieux pour Korda, l’auteur ne dote pas son personnage de la destinée du sanglant dirigeant qui finit devant un peloton d’exécution en compagnie de sa femme. Non, il lui donne plutôt celle de « Bébé doc », Jean-Claude Duvalier, tyran haïtien, qui fut accueilli en France, tiens tiens, dans un palace au bord du lac d’Annecy en 1986. Durieux fait donc de son album une fable politique sur les compromissions du pouvoir et cet aspect caustique ne s’applique pas qu’à la seule figure du potentat déchu…
Tout cela est subtilement amené. Le décor devient ainsi personnage à part entière ; l’auteur en soigne les détails en s’inspirant de lieux réels ce qui nous donne des clés de lecture. Son bijou architectural Art déco est ainsi un mix du Crillon et du Métropole tandis que la piscine est empruntée au Résidence Palace. Ce n’est sans doute pas un hasard que ces deux derniers établissements soient un fleuron de l’hôtellerie de Bruxelles … capitale européenne ! Le lieu fonctionne alors comme une métonymie mais aussi comme une métaphore : ses couloirs, et ses pièces vides et les jardins déserts contribuent à créer une atmosphère oppressante de fin de règne. Ceci est amplifié par le déchaînement météorologique.
« Un enchantement »
Le dessinateur ne cherche nullement à se départir de sa patte originale pour coller au style de la série. On reconnaît les personnages de l’œuvre, Spirou, Fantasio et Seccotine mais loin de faire du « Marcinelle », il est beaucoup plus dans l’esprit ligne claire. Il dessine des personnages à la Hergé avec des points à la place des yeux et des sourcils à géométrie variable mais ceux-ci sont toujours très expressifs. On a comme une quintessence de tous les styles différents de Durieux dans cet album. Les personnages sont parfois réalistes, parfois ronds ou élastiques. Ils peuvent même être cartoonesques et sauter à la manière d’un personnage de Tex Avery !
Et puis bien sûr il y a ses couleurs qui sautent aux yeux. Le dessinateur n’a pas son pareil pour créer des ambiances différentes grâce à ses couleurs directes. Le livre s’ouvre sur une ambiance bleue qui annonce la scène centrale (et inoubliable) de la piscine, puis des camaïeux d’ocre et d’orangé qui créent une ambiance feutrée pour le palace et ses jardins et enfin se clôt sur le jaune-vert de la tempête. Tout cela est mis en valeur par des cadrages variés et un découpage ciselé. L’auteur joue des cases, s’en affranchit parfois, crée des médaillons qui sont autant de tête de chapitres, multiplie les vignettes strips, les cases verticales et les grandes vignettes; il joue en virtuose de la page et variant ainsi le rythme du récit surprend sans cesse le lecteur.
Christian Durieux signe un « Spirou » extrêmement personnel, un récit bien plus adulte qui permet de drainer un nouveau lectorat (dont moi !). A la lecture de la fin alternative qu’il fit paraitre dans le premier numéro de l’année du journal, on mesure la différence de tonalité avec les productions habituelles. Cet épilogue inédit est bien davantage dans la « ligne du parti » : joyeux, optimiste, léger, digne d’une comédie sentimentale à la Capra. Dans « Pacific Palace », le ton est nettement plus désabusé, à la Renoir … Au début de l’album, Durieux dresse la playlist des chansons qu’il a écoutées lors de la composition de « Pacific Palace » dont les titres du groupe Cocoon de Marc Daumail . Je me permettrai, à mon tour, de vous donner des conseils de morceaux à écouter pour décupler votre plaisir de lecture : « Sweet Lena » et « Blue Night » composés spécialement par Cocoon. Vous y retrouverez des bribes de dialogues et la délicieuse petite musique mélancolique de « Pacific Palace ». L’ensemble vous trottera longtemps dans la tête.
#Netgalley France #Pacific Palace
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