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Il existait autrefois dans les trains de nuit en Inde , des compartiments réservés aux femmes.
Autour de Akhila, 46 ans, « rigide et réservée » qui a toujours vécu comme le prolongement de quelqu'un « vieille fille, sœur aînée, ,autrefois soutien de famille, et encore aujourd'hui vache à lait », et qui cherche comment devenir enfin une personne à part entière, elles sont six femmes de condition et d'âges différents qui, le temps d'un trajet se racontent, se livrent hors de tout regard et de tout jugement masculin .
Des inconnues qui spontanément, sans réserve se confient sur leur enfance, leur couple , leur intimité : cette situation peut paraître quelque peu artificielle mais elle est pour le lecteur un témoignage précieux sur la condition de la femme en Inde, sur son rapport à l'homme, à la famille , à la belle-famille ,sur le poids de la tradition et de la caste à laquelle on appartient.. C'est aussi ,bien sûr, un document fort intéressant sur la vie quotidienne dans ce pays.
Je continue mon tour du monde des polars avec une auteure indienne: Anita Nair, écrivaine, poétesse et nouvelliste originaire du Kerala. Une poétesse qui se tourne vers le roman policier , c’était surprenant.
Dés le début de l’intrigue , les chapitres faisant parler l’assassin puis l’enquêteur alternent. Toutefois parmi tous les personnages évoqués on ne connaît pas véritablement l’identité de l’assassin. On se pique au jeu de deviner de qui il s’agit.
Le second attrait de ce polar réside dans la description de la société indienne contemporaine avec ses castes, officiellement disparues ... ses non-dits, ses tabous.
Ce polar m’a beaucoup touchée et Anita Nair est une véritable découverte pour moi.
Auteur vilipendée en Inde pour avoir directement évoqué la sensualité féminine dans ses romans, Sreelakshmi se suicide en 1965. Quelque cinquante ans plus tard, la découverte fortuite d’un fragment de ses os, conservé comme une relique par son amant, réveille le fantôme de la jeune femme : au fur et à mesure que l’osselet passe de main en main, la disparue se retrouve à même d’observer et de commenter l’existence de plusieurs femmes dans l’Inde d’aujourd’hui.
En entrecroisant le destin de ces femmes séparées par un demi-siècle, le récit dessine peu à peu un motif qui se répète inlassablement au fil du temps : celui des drames de la condition féminine en Inde. Car, si la tentative d'émancipation de Sreelakshmi dans les années soixante peut paraître en avance sur son temps, force est de constater que les histoires des autres femmes et filles du roman jusqu'à nos jours ne sont que les multiples répliques d'un scenario quasi immuable. Discrimination à la naissance, difficulté d’accès à l’éducation et à la vie professionnelle, harcèlement et violences le plus souvent impunis continuent à marquer une société fortement attachée à des traditions et des conventions qui accordent aux hommes tout pouvoir sur les femmes.
Sur la base d'un parti-pris narratif parfaitement maîtrisé et au fil d'une narration fluide au style agréable qui sait tenir le lecteur en haleine tout en suscitant son émotion, Anita Nair dresse ainsi le triste constat d'une sorte de fatalité qui semble peser en Inde. Malgré tous les progrès de l'ère moderne, la condition féminine y demeure catastrophique. A l'instar des personnages de ce roman, quantité de femmes indiennes en paient le prix tous les jours.
Admirable. Bouleversant, j'ai trouvé.
L'auteur traduit tellement bien le ressenti féminin.
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