Le Club des Explorateurs permet chaque semaine à deux lecteurs de lire un même titre que nous avons sélectionné pour eux et de confronter ainsi leur point de vue.
Cette semaine, nos deux explorateurs ont lu Je mourrai une autre fois de Isabelle Alonso (Editions Héloïse d’Ormesson)
L’avis de Francine Poitevin :
Ce roman nous raconte l'histoire d'un jeune garçon né dans les années 20 et qui, après une enfance heureuse et confortable, va être confronté à la guerre d'Espagne. C'est sa vision de cette terrible guerre dans laquelle il va s'engager aux côtés des républicains. On y voit ses espoirs et ses désillusions.
Ce livre m'a beaucoup plu car son écriture est dynamique, vive. Isabelle Alonso sait amener de la légèreté, même de l'humour dans ce récit de la défaite des républicains. Cela n'enlève rien au tragique de la situation, mais permet d'imaginer la vision de Gélin, qui a 15 ans au moment de son engagement.
Et puis il y a les expressions telles : " l'incertitude laisse une toute petite chance à l'espoir" ou encore " il se met à pleuvoir doucement. Pas la peine de pleurer, le ciel s'en charge." C'est vraiment beau.
Les personnages sont tous bien marqués : le tonton jeune flambeur, puis militaire malhonnête, et les copains républicains, ceux qui échangent apprentissage de la lecture contre connaissance de la vie. Tous n'aspirent qu'à chasser les fascistes et rentrer chez eux. Chacun passe par espoirs et désillusion, ils sont attachants. L'écriture d'Isabelle Alonso est telle que le film de cette histoire se déroule à la lecture du roman.
Il y a également dans ce roman ce qui semble être un règlement de compte avec la France. Plusieurs passages relatent la lâcheté de l'état français qui n'a rien fait pour sauver la république espagnole, qui a fermé sa frontière quand son aide aurait été utile, et au final qui n'a su que parquer ces pauvres réfugiés espagnols dans des conditions épouvantables. On sent ici la fibre espagnole de l'auteur.
© Francine Poitevin
L’avis de Marie-Christine :
Je mourrai une autre fois est une ode à la liberté, à la résistance et à la force de l’engagement.
Isabelle ALONSO nous ramène à cette période des années 30 en Espagne, chargée d’espoir avec l’élection du Front Populaire (Frente Popular), où la démocratie va rapidement être mise à mal avec la montée du fascisme.
Plus qu’un hommage à son père, réfugié politique espagnol aujourd’hui disparu, bien plus que sa propre histoire familiale, elle nous immerge dans la grande Histoire avec un style où humour et émotion sont présents au fil des pages.
Isabelle ALONSO nous offre à vivre de l’intérieur les évènements clés qui vont marquer l’Espagne jusqu’à l’avènement du franquisme. Nous les parcourons, à travers le regard de Angel, le double du père de l’auteur.
Il va s’engager à quinze ans dans le camp des républicains et combattre contre les forces nationalistes menées par le général Franco.
J’ai aimé cette saga familiale et historique, qui nous conduit de la proclamation de la république en 1931 à la défaite des républicains et à l’exode d’un grand nombre d’entre eux vers la France. Elle est racontée à la première personne dans un style très agréable et concis.
J’ai été séduite par la fantaisie des personnages, la soif de liberté, de connaissances de cette famille, ses engagements. Mention spéciale à Nena la mère d’Angel, femme libre.
Outre le pur plaisir de lecture, il est troublant de constater à quel point ce roman entre en résonnance avec le contexte géopolitique actuel. A lire absolument !