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Mitteleuropa, Deuxième Guerre mondiale, fuite au Brésil :Willibald est la reconsitition d'une histoire familiale toxique et pleine de trous dans une écriture à l'os, limpide et précise.
Depuis l'adolescence Mara est habitée par un tableau suspendu dans le salon de son H.L.M. Willibald, qui a acheté cette toile dans les années 1920, la hante tout autant. Lorsqu'il fuit Vienne en 1938, il n'emporte que ce Sacrifice d'Abraham, soigneusement plié dans sa valise. Entrepreneur et collectionneur juif, il refait sa vie au Brésil, loin des siens. Lors d'un séjour en Toscane chez sa mère Antonia, Mara déchiffre les lettres de Willibald qu'elle retrouve dans un hangar. Elle observe les photos, assaille de questions Antonia, « qui sait mais ne sait pas ».
Avec un style photographique épuré, Gabriella Zalapi nous fait suivre Mara sur les pas de son arrière-grand-père juif d’origine austro-hongroise en fuite de Vienne à l’époque de l’Anschluss de 1938, au Brésil en passant par l’Italie, la Suisse, le Portugal, l’Angleterre et la France.
Cet aïeul, Willibald, au-delà d’être à Vienne, à la tête d’une fabrique de feutre héritée de son père, est avant tout un collectionneur de tableaux et objets rares qu’il dut soit abandonner, soit mettre à l’abri, soit vendre, dans l’espoir incertain de les retrouver après la guerre lancée par les Nazis.
Il ne garda qu’une toile, le Sacrifice d’Abraham, qu’il décloua de son cadre et plia dans sa valise. Mara en héritera puis finira par la vendre aux enchères mais elle restera taraudée par l’idée de savoir pourquoi Willibald a conservé cette toile spécifiquement, quand, somme toute, elle était loin des valeurs artistiques et financières du reste de la collection prestigieuse du mécène.
A la cinquantaine, Mara ira chez sa mère en Toscane et entreprendra la fouille des malles du passé emplies de courriers et de photos tout en cherchant des explications auprès de sa mère qu’elle assaille de questions en vain.
C’est en essayant de comprendre qui était Willibald, que la narratrice se cherche elle-même tout en nous entrainant sur un des nombreux chemins de la grande Histoire des Juifs d’Europe de l’Est face au nazisme et en nous livrant parallèlement l’histoire du Sacrifice d’Abraham et le destin des œuvres perdues et parfois retrouvées.
Le style d’écriture fait de phrases brèves et paragraphes courts, donne un effet photographique singulier et insuffle un rythme vif à l’instar de la vie d’errance turbulente et déracinée que fut celle de Willibald.
Quelques vieilles photos en noir et blanc peu lisibles s’ajoutent au flou de ce destin que même les très proches déchiffrent mal en sachant sans savoir à coups de ‘peut-être’ et de silences.
En fin de livre, l’arbre généalogique sur 6 générations, tente de mettre de l’ordre à la mémoire d’une famille ébranlée par l’intranquillité soudaine due à une haine politique dévastatrice mais aussi par la passion dévorante d’un homme.
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