Florence Cestac raconte sa grande évasion du patriarcat : une BD aussi caustique que sensible
« Si je me suis marié, c'est pour me faire servir ! » Ainsi commence avec fracas cette nouvelle bande dessinée de Florence Cestac. Avec sa faconde habituelle, elle y raconte son père, homme d'une époque (avant 68...), d'un milieu (la petite bourgeoisie de province), et leurs relations tumultueuses. Entre une fille déjà artiste et rebelle à toute forme d'autorité, et un père colérique, pour qui dire « je t'aime » est un signe de faiblesse, la vie n'a pas été un long fleuve tranquille.
Florence Cestac raconte sa grande évasion du patriarcat : une BD aussi caustique que sensible
Le 8 mars, attention aux impairs et contresens !
Présidente du jury du Prix BD Lecteurs.com, l'autrice et illustratrice revient sur l'évolution de la bande dessinée et évoque ses projets personnels
Florence Cestac naît après-guerre dans une famille de la bourgeoisie normande. Papa, Jacques, belle situation et maman, Camille, fille de fermier, reste à la maison, s'occupe des trois enfants et du mari qui pouvait s'exclamer "Si je me suis marié, c'est pour me faire servir !" (p.5)
Les trois enfants ne manquent de rien, comme on dit couramment, sauf de reconnaissance et d'amour de leur père trop occupé à briller en société et à diriger la maison parce que "C'est moi le chef de famille et je m'occupe de tout ! Je rapporte l'argent donc c'est moi qui commande ! Normal !" (p.5) Et les remarques, plus vicieuses que des coups sur l'absence de talent, le physique... Heureusement, les moments avec la mère sont différents : de la complicité, de l'amour, du partage et Camille laisse de la liberté aux enfants, notamment pendant les vacances au Cap-Ferret, lorsque le père est remonté à Rouen travailler.
Avec beaucoup de tendresse, d'émotion et bien sûr d'humour autant dans les textes que dans les dessins, Florence Cestac narre son enfance, dessine sa famille avec son trait caractéristique et reconnaissable, les fameux gros nez. En 52 pages, elle en dit davantage que certains en un gros bouquin. Son humour, son décalage, son pas de côté permettent de ne pas trop charger tout en racontant fidèlement son éducation et, plus largement l'époque et la génération de ses parents.
J'apprécie beaucoup les BD de Florence Cestac concernant les Déblok que j'avais découvert à l'époque dans les pages du "journal de Mickey". Ils sont irrésistibles (chien inclus) avec leurs gros nez et leurs aventures sont toujours passionnantes et drôles.
Cet album sur le patriarcat est très réussi. Le comique se mêle à l'humour et à l'émotion.
Le lecture de cet album m'a fait un bien fou, un remède efficace contre la morosité ambiante due à la crise sanitaire
Un vrai COUP DE CŒUR !
Une famille formidable ! la sienne !! Celle de Florence Cestac.
Au travers de cette BD, elle se raconte et raconte sa famille.
50 ans en 50 pages, à peu de chose près.
Ses parents sont décédés depuis 20 et 10 ans, il est temps pour elle d’accoucher de cet ouvrage.
Elle y fait un portrait peu flatteur de ses parents et plus particulièrement de son père.
Papa est un Gadzart, ce dont il se vante. Il est macho, tyrannique, et peu affectueux.
Sa première intervention, qui d’ailleurs est la première de l’ouvrage, donne le ton : « Si je me suis marié, c'est pour me faire servir ! »
Face à ce tyran, sa mère fait ce qu’elle peut tout en étant dévouée et soumise.
Ainsi, si au niveau matériel, Florence, son frère et sa sœur, ne manquent de rien, il n’en n’est pas de même au niveau affectif.
Elle nous raconte ses manques affectifs, ses souffrances.
Finalement, ce manque d’affection est le fil conducteur de cet ouvrage.
Elle nous partage les souvenirs les plus représentatifs de son enfance au travers de phrases qui semblent gravées dans son esprit.
Les dialogues sont mordants et directs.
On reconnait sa pâte à son graphisme, à ses personnages au gros nez. Ce graphisme, si peu moderne, est de circonstance : il colle parfaitement à l’époque des trente glorieuses.
J’ai beaucoup aimé cette autobiographie, Florence Cestac nous offre une photographie très incisive de la bourgeoisie des années 50/60, directe, cash sans fioriture.
On ne s’ennuie pas. Très envie de lire ou relire d’autres ouvrages de cette auteure.
Je remercie lecteurs.com et les éditions Dargaud de m'avoir offert l’opportunité de lire cet ouvrage.
Avec ce titre à allure de slogan, Florence Cestac se rangerait-elle aux côtés des anti mariage pour tous ? Bien au contraire ! Après avoir évoqué sa séparation, sa jeunesse en internat et même sa ménopause, l’autrice publie un nouvel opus autobiographique qui s’attache désormais à ses racines. Elle y démontre que le modèle de famille patriarcale de référence n’est peut-être pas la panacée pour créer des enfants et des adultes bien dans leur peau !
Elle a attendu longtemps pour composer cet album : son père est décédé il y a vingt ans, sa mère depuis dix ans. Était-ce parce qu’elle voulait les ménager ? ménager ses proches ? ou bien parce que malgré les années la blessure était toujours là ? En tout cas, c’est un album très drôle mais aussi très émouvant avec Florence dans le rôle du clown triste qui met du rythme, des dialogues percutants et des gros nez pour créer une distanciation.
Elle avait en effet tout pour être heureuse : un papa, une maman, une sœur et un frère, une existence aisée dans un milieu bourgeois où l’on n’avait pas de soucis matériels. Son enfance s’est d’ailleurs déroulée durant les trente glorieuses et la famille a intégré à plein le concept de société de consommation… Mais son père était un véritable tyran domestique qui rabrouait sa mère, l’humiliait parfois, et ne portait aucune attention à ses enfants (et encore moins à ses filles). D’ailleurs dans l’album, un détail ne trompe pas : Cestac appelle souvent sa mère « maman » et hormis dans le titre jamais son père « papa ». Elle raconte ses manques affectifs, ses souffrances de dyslexique hyper émotive et parle même des attouchements dont son frère et elle furent les victimes mais sans jamais s’appesantir et sans pathos.
Elle réalise finalement un très beau portrait d’elle en montrant comment elle s’est construite dans l’opposition faisant tout à l’envers des préceptes paternels : elle a vécu les événements de 68 en tant que militante et même été emprisonnée, n’a pas fait pas le beau mariage pour lequel elle était conditionnée et a choisi au contraire de travailler. Elle n’a pas eu un métier acceptable en allant au beaux-arts et même conçu même un enfant dans le péché ! Elle reparle également de l’aventure Futuropolis et de son parcours d’auteur de bd qui n’acquit jamais de légitimité aux yeux paternels. Au-delà de l’autobiographie, et du titre qui se révèle antiphrastique, l’album pose alors des questions au lecteur sur la famille, la construction de soi et rencontre des échos avec les combats sociétaux d’aujourd’hui (me too, balance ton porc et la cause féministe). Un album bien plus sérieux qu’il n’y paraît !
Je remercie lecteurs.com et les éditions Dargaud de m'avoir offert la possibilité de le lire
Florence Cestac se livre et nous livre donc ici un opus personnel.
A travers cet album autobiographique mis en image avec son style graphique habituel et ses fameux gros nez, elle raconte sa famille. Sa famille oui mais, pas que...
Le point de départ : les trente glorieuses, un père dominateur, macho et peu affectueux, une mère dévouée et soumise. Au final, un recit résilient dans laquelle Florence CESTAC nous donne à voir l'évolution de la société.
Par petites touches savamment pensées, l'album aborde de nombreux thèmes non sans humour et sans tomber dans le pathos.
Un témoignage à découvrir !
L'album de Florence Cestac est doux et plutôt touchant.
Je m'attendais à une poilade en continue sur 50 pages, et j'ai eu l'occasion de m'immerger dans le stéréotype de la famille française bourgeoise des années '50, et de la Révolution '68 avec l'émancipation des jeunes et la volonté de changer la société.
Mon grand-père (né en 1920) était Gadz'Art et s'en ouvrait régulièrement. À l'époque, ce n'était pas si commun et l'école d'appartenance créait de vraies communautés. Il avait des traits communs avec le père de Florence Cestac.
Le père de Florence a disparu il y a 20 ans, sa mère, il y a 10 ans. Ils sont au coeur de cet album, leur caractère est bien affirmé. Le père, bon machiste, tourné vers la réussite professionnelle quasi uniquement, la mère, femme au foyer multi-fonctions, faire valoir du père et relais (seule) des enfants dans leur petite enfance. L'amour familial (parents/enfants) et la communication semble un peu éteint, même si le trait est sûrement accentué...
Incroyable de se dire que malgré la réussite (création avec Étienne Robial de la très bonne maison d'édition Futuropolis), le père n'ait jamais prêté plus que ça attention à l'activité (futile) de sa fille !! Le 1er album édité ("la Bête est morte" d'Edmond Calvo), offert comme une fierté n'a jamais été ouvert, ni même feuilleté..., il est resté dans son sac cadeau, sous le poste de TV. Seum...
Il est également fait mention de "Balance ton porc", sur des attouchements qu'elle aurait subi d'un cousin dans sa jeune enfance, mais qu'elle ne s'est pas sentie autorisée à évoquer en famille. La communication n'était vraiment pas le fort à l'époque ? C'est un peu mieux de nos jours, même s'il reste des tabous.
La libération des moeurs a point son tarin dans les années '70, celle de la parole semble s'ouvrir 50 ans plus tard. Je suis heureux que la société évolue dans ce sens...
Je vais partager cet album avec mes parents, contemporains de Cestac.
Merci à lecteurs.com pour le partage de cet opus qui me permet de rentrer (enfin !?) dans son univers.
À la réflexion, je pense avoir déjà lu quelques strips dans Mickey dans les années '80, puis dans À Suivre un peu plus tard.
Cet album m'a donné envie de lire "la véritable histoire de Futuropolis"...
Une famille formidable celle de Florence Cestac.
Mise en scène du Patriarche dans toute la splendeur des Trente Glorieuses.
La première bulle « Si je me suis marié, c’est pour me faire servir » suffit à vous faire comprendre quelle porte vous venez de pousser pour vous immiscer dans cette famille.
La splendeur du phallocrate étalée en traits appuyés comme pour mieux enfoncer le clou, une mère effacée parce que ce n’est pas elle qui fait entrer l’argent dans la maison, donc elle est improductive et ne compte pour rien dans le bonheur familial. En fait il se marie pour avoir une bonne à demeure sans verser de salaire.
Un autoritarisme inoxydable, moins il sait, plus il est autoritaire, en dehors de la maison c’est un homme drôle, un bout en train.
Les enfants il faut en avoir, c’est mieux pour la vitrine, comme la résidence secondaire cela assied la réussite d’une vie.
Il est évident que pour sa descendance, la liberté ne pouvait passer que par la transgression.
Un choix, une vie d’artiste pour respirer.
Finalement les lecteurs découvriront une maman bien présente et pas seulement utilitaire.
Ce n’est en rien une psychanalyse ou un règlement de compte, on y découvre les manques, l’incommunicabilité, les ombres, le chemin à parcourir, ce qu’il a fallu tailler dans le vif pour exister.
Mais j’y ai trouvé beaucoup de tendresse aussi, et la question restera qui aurait été Florence Cestac sans cette famille-là ?
C’est un modèle de famille qui a l’époque a déteint sur d’autres catégories sociales.
Une plongée dans la famille Cestac entre rire et larmes !
A savourer.
©Chantal Lafon
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