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Finaliste du prix Landerneau polar 2020 C'est de ces cultures nourricières qu'avaient jailli la jalousie, la rancoeur, la malveillance et l'intolérance. À l'instar des hommes, elles s'étaient lentement desséchées, craquelées, pour devenir arides et infécondes. C'étaient ces terres brûlées qui avaient fini par dévorer les coeurs et les âmes. Le commissariat de Nancy subit une inspection générale. Andreani et son partenaire Couturier héritent du dossier Rémi Fournier, simple en apparence : retrouvé asphyxié, l'homme aurait succombé à une crise cardiaque lors de l'incendie de son pavillon. Les plus hautes instances policières les somment de clore cette affaire, et vite. Mais pour quelles raisons ? L'instinct d'Andreani le pousse une nouvelle fois à mener sa propre enquête. Commence alors un voyage dans le temps où il devra fouiller dans les souvenirs purulents laissés par les deux guerres mondiales, notamment en Moselle. Manipulation, délation, nationalisme et antisémitisme : Andreani et Couturier pourraient bien faire face à l'enquête la plus complexe de leur carrière. Après Un travail à finir, qui avait pour cadre la guerre d'Algérie, le duo qui se dissimule derrière le pseudonyme d'Eric Todenne continue de se pencher sur les liens et l'impact que peut avoir l'histoire collective sur les destins personnels.
Il se lit très facilement. Un cadavre découvert brûlé et l'enquête remonte dans le temps et nous mène dans un village frontalier qui a changé de nationalité après chaque guerre. Dans ce village, une famille juive pendant la deuxième guerre mondiale. On a un échantillon de toutes les horreurs qui se sont déroulées durant cette période. La paire de policiers va dérouler la pelote de laine.
Nous voici repartis à Nancy avec le duo qui se cache derrière le pseudo d'Eric Todenne : le vosgien Eric Damien et l'espagnole Teresa Todenhoefer qui vivent en Allemagne.
Avec ce nouveau polar, Terres brûlées, on retrouve la recette du précédent épisode : le flic à l'ancienne Andreani, amateur de jazz, désabusé et un peu alcoolisé, plus vraiment de son époque, qui a la mauvaise habitude d'enquêter hors des clous, remuant d'anciennes pages sombres de notre passé.
Après l'Algérie, il sera question cette fois d'Alsace et de Lorraine lorsque les frontières passaient au beau milieu des villages de Moselle, faisant d'anciens voisins de nouveaux ennemis.
[...] Bon, la limite, c’était la rivière. Rive gauche, la France, rive droite, l’Allemagne.
— Une frontière, au beau milieu du village ?
— Oui, c’était comme ça par chez nous. "
[...] Et c’est reparti comme en 1914, nez à nez avec leurs voisins d’en face. Parfois même des cousins. Alors j’vous raconte pas, après la guerre, ça pas été joli, joli."
[...] On essayait de ne plus trop y penser, à cette foutue guerre. Les boches avaient disparu, la douleur s’estompait lentement, mais les cicatrices ne voulaient pas se refermer."
À l'occasion d'un incendie d'apparence anodine, l'inspecteur Andreani va rouvrir d'anciennes blessures mal refermées ...
On retrouve avec autant de plaisir le flic solitaire et ses compagnons : la psy, son collègue "geek" et bien sûr le bistrotier lettré du Grand Sérieux, un bar qui existe pour de vrai à Nancy.
Une enquête sans esbrouffe ni tapage, qui prend son temps, c'est assez rare dans le polar d'aujourd'hui.
Pour celles et ceux qui aiment l'Histoire.
J'ai d'abord cru que j'allais avoir affaire à une histoire de cow-boys sur un vaste domaine agricole dans l'Iowa. Eh bien pas du tout… Comme quoi certaines couv' sont trompeuses… Nous sommes à Nancy en novembre 2016 et le lieutenant Andreani a le moral en berne : d'abord parce qu'il rentre de quelques jours de vacances en Corse, qu'il va devoir retourner au taf, réentendre les gueulantes du commissaire Berthaud - sous pression depuis qu'il sait qu'une visite des bœufs-carottes, autrement dit de l'IGPN - est plus qu'imminente…
Évidemment, il pourrait aussi s'arranger avec son Sig Sauer et appuyer gentiment sur la détente en ayant pris soin au préalable de s'le coincer dans la bouche… Autre possibilité...
Pour faire diversion et penser à autre chose, il peut fort heureusement s'échapper de l'épais marasme quotidien en allant manger un bout « Au Grand Sérieux » (où le patron se prend pour le Gaffiot et parle le plus velouté des latins de cuisine), s'offrir de jolis millésimes chez Rodrigo l'épicier espagnol, s'approvisionner en délicieux desserts chez Armorino et surtout, écouter du bon jazz, de la soul ou du rhythm and blues en lançant sur la platine un p'tit Charles Bradley, à moins que vous ne préfériez Curtis Mayfield ou Gerry Mulligan (le titre « Terres brûlées » serait d'ailleurs repris de « Burned Lands » de Charlie Mingus). Il peut aussi compter sur sa fille Lisa pour le secouer un peu et tenter de le recaser (avec la psy du service, Francesca, tiens, en voilà une riche idée !)
Quant à son poto, le lieutenant Couturier, faudra pas trop compter sur lui pour rebooster le moral des troupes : il est dans de sales draps depuis qu'on lui impose de passer une visite médicale à laquelle il a toujours refusé de se soumettre, pour attester de son éventuelle forme physique (pas vraiment un adepte du lifestyle, le gars Couturier...)
Bref, en attendant, un dossier traîne et il va falloir régler ça au plus vite : un incendie domestique dans un pavillon à Laxou, rue des Chartreux… Bon, oui, il y a un cadavre : celui du proprio, un certain Rémi Fournier, un gars poli, discret dont personne ne sait rien. Pas d'effraction, pas de vol : bref, l'affaire n'intéresse personne et le dossier commence déjà à prendre gentiment la poussière. Probablement un accident, conclut l'expert. Ah… C'est le « probablement » de trop, celui qui retient l'attention d'Andreani… Ben oui, quelques zones d'ombre, oh… trois fois rien : l'homme n'a pas cherché à fuir… Et ?… pas grand-chose : juste un expert qui trouve tout ça un peu troublant mais qui ne saurait dire pourquoi... Chouette, on est bien avancé avec ça.
Basta… On classe.
Sauf que… c'est quand même étrange de trouver dans l'inventaire des biens de ce Rémi Fournier, grenouille de bénitier et généreux donateur au denier du culte, une... mezouzah ! Au cas où vous ne sauriez pas ce que c'est, il s'agit d'un étui contenant un parchemin sacré fixé au montant des portes des maisons juives.
Quel rapport ce gars pouvait-il bien avoir avec tout ça ? Et s'il fallait un peu fouiller dans le passé, mettre le nez dans des histoires aux odeurs nauséabondes d'antisémitisme, de haine, de délation, de vengeance remontant aux deux grandes guerres et même peut-être à celle de 1870 sur des terres de Moselle que l'Histoire n'a cessé de balader de force entre la France et l'Allemagne ? Ça laisse forcément des traces ces trucs-là, des pas belles et qu'on aimerait mieux oublier… Mais certains ont beau se frapper la tête contre les murs, ils ne parviennent pas à passer à autre chose… Eh oui, certains guss n'ont pas vraiment la mémoire courte… préfèrent un plat qui se mange froid, très froid même...
Évidemment, pour le duo Andreani/Couturier continuer à bosser sur cette enquête comporte des risques : l'IGPN ne va pas apprécier qu'on traîne sur un dossier vide alors que des affaires très urgentes sont à traiter …
Ils risquent gros les gars, très gros même. Mais c'est sans compter sur leur côté cabochard, rebelle et indiscipliné… Des gars bien, donc. CQFD.
Un très bon polar du duo Eric Damien/Teresa Todenhoefer : bien documenté, solidement construit, au suspense efficace et dont l'atmosphère teintée de fantaisie, d'humour et de poésie achève de nous régaler...
Un bon cru à déboucher au plus vite…
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Dernière réaction par Jean-Thomas ARA il y a 2 jours
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