"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
«Ceux-là viennent de Moscou et ne savent pas où ils vont. Ils sont nombreux, plus d'une centaine, des gars jeunes, blancs, pâles même, hâves et tondus, les bras veineux le regard qui piétine, le torse encagé dans un marcel kaki, allongés sur les couchettes, laissant pendre leur ennui résigné dans le vide, plus de quarante heures qu'ils sont là, à touche-touche, coincés dans la latence du train, les conscrits.» Pendant quelques jours, le jeune appelé Aliocha et Hélène, une Française montée en gare de Krasnoïarsk, vont partager en secret le même compartiment, supporter les malentendus de cette promiscuité forcée et déjouer la traque au déserteur qui fait rage d'un bout à l'autre du Transsibérien. Les voilà condamnés à fuir vers l'est, chacun selon sa logique propre et incommunicable.
Coup de coeur pour ce court roman de Maylis de Kerangal., un véritable enchantement L'écriture très visuelle, cinématographique nous transporte dans un huis clos à bord du transsibérien , il convoie pendant des jours et des nuits des conscrits et des passagers de tous horizons vers la Sibérie .A bord, Aliocha, un appelé de 20 ans, encore puceau ne supporte pas cette conscription à laquelle échappent les jeunes gens fortunés et les futurs pères.A bord également mais en première classe Hélène, une Française, trentenaire . L'auteure fait se dérouler en parallèle deux histoires de fuite avec une parfaite maîtrise du suspense. Hélène fuit la Sibérie qu'elle ne supporte plus , elle y avait suivi son amoureux Anton nommé à la tête d'un barrage, Aliocha fuit son régiment parce qu'il refuse de devenir soldat. Les deux personnages cohabitent dans le compartiment d'Helene qui avec l'aide de l'hôtesse de bord ruse pour qu'Aliocha échappe à la traque du sergent.Le spectacle est aussi dehors , les voyageurs guettent le lever du jour et l'auteure déroule de belles descriptions.Les paysages sont le décor de la « pièce de théâtre " qui se joue dans le transsibérien.
Déjà sept ans que j'ai lu ce court roman fort!
Aliocha et Hélène sont des habitués de mon jardin mental, ils ne m'ont pas quitté.
Aliocha, ce jeune soldat sensible a tout pour me plaire, il part vers l'inconnu avec ses peurs et ses espoirs déçus.
Hélène quitte un amour impasse avec son Russe (il a peut-être trop redécouvert son propre pays)
L’exiguïté du compartiment du transsibérien et l'immensité des paysages qui défilent font bon ménage avec l'écriture précise et intime de Maylis de Kerangal.
Je n'ai pas encore pris le temps d'aller vérifier comment le lac Baikal est aussi beau que dans le roman! Promis je m'y attelle dare-dare.
Hélène, 35 ans, française, vit en Russie avec son amoureux Anton. Aliocha, 20 ans, doit quitter tout ce qu’il connaît pour la conscription et ce qu’elle promet de violence et de brutalité, à l’autre bout de la Russie.
Mais Hélène ne s’y retrouve pas dans cette nouvelle vie. Sur un coup de tête, elle déserte l’appartement et fonce vers la gare, prend un billet au hasard et monte dans le Transsibérien.
Aliocha quant à lui n’a pas eu le choix, c’est en soldat et sous bonne escorte qu’il monte dans le train, pour une caserne de Sibérie. Soumis au bizutage dans les wagons, il cherche une échappatoire.
C’est lors d’une première tentative de fuite qu’il croise Hélène. Par un hasard de circonstances, elle lui offre le refuge de son compartiment. Dans ce huis-clos, avec quelques gestes puisqu’ils ne peuvent échanger de mots, leur détresse commune les rapprochent. Aliocha s’offre un moment de répit tandis qu’Hélène s’évade en pensée, troublée par cette présence.
Arriveront-ils au bout de la ligne, au bout de leur quête ?
Ce petit roman m’a bien plu. D’une lecture facile et rapide, on pénètre dans l’intimité de deux personnages oppressés par un sentiment d’urgence et par le danger d’être rattrapés. On vit avec eux quelques moments intenses, de violence contenue, de besoin de se retrouver, de soif de liberté. Peu de mouvement dans ce livre, c’est davantage une étude des sentiments, des frustrations et des désirs qui nous est proposée par l’auteure, dans une écriture facile d’accès et pourtant révélatrice d’une grande dextérité à transmettre les émotions.
C’est cette capacité que j’avais déjà aimé à la lecture de Réparer les vivants précédemment.
https://mesmotsmeslivres.wordpress.com/2018/01/20/tangente-vers-lest-de-maylis-de-kerangal/
J’ai eu du mal à commencer ce livre tant les souvenirs remontaient des profondeurs. En effet j’ai pris plusieurs fois des trains en Sibérie (pas le transsibérien mais des trains sibériens) en passant par Krasnoiarsk où je me suis arrêtée. Presque à chaque fois j’y ai croisé des soldats avec lesquels j’étais partagé entre évitement et curiosité. La première rencontre entre l’écrivaine et le jeune conscrit ne me semble donc pas improbable mais plutôt très probable.
J’ai apprécié ce livre travaillé et sec comme un corps de soldat, les descriptions impressionnistes au plus près de la peau, des odeurs. J’y ai retrouvé l’atmosphère si particulière de ces trains au long cours, l’ennuie vodkaïsé, la violence contenue, ce flottement vaporeux entre la vraie vie et le rêve derrière la vitre écran et les étranges rencontres. La fin haletante donne un coup d’accélérateur à ce récit dense auquel il a manqué la musique des roues cher à Blaise Cendrars dans son musical poème fleuve « La prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France ».
Nous avons fait un beau voyage….. ce n’est pas ce que pourrait chanter Aliocha.
Aliocha conscrits parmi les conscrits est mort de trouille dans le train qui l’emmène jusqu’à son casernement où il subira le bizutage odieux, les mauvaises (le mot est faible) conditions d’incorporation, la guerre… Hélas, orphelin désargenté, il ne peut payer les pots de vin ni trouver la donzelle qui accepterait de se retrouver enceinte pour échapper à ce maudit service militaire. Son seul échappatoire : se sauver fuir…. Oui mais voilà, les militaires veillent !!!
Il sera sauvé par Hélène, une jeune française qui fuit l’amour vers la Sibérie. Elle le cachera dans sa cabine. Ce qui ne devait durer que quelques heures durera jusqu’au terminus
Ce petit livre est dense comme l’atmosphère qui règne dans ce train, tout va vite mais lentement. Maylis de Kerangal, par son écriture dense et descriptive pose les personnages dans une atmosphère close alors que le paysage s’éclate derrière les vitres des wagons. L’huis-clos de ce livre donne de la densité à Aliocha et Hélène. Ils veulent prendre la tangente, partir, fuir pour repartir, pour écrire une nouvelle page de leurs livres.
Ce petit livre dense ne vous tombe pas des mains, il faut aller jusqu’au bout, jusqu’a Vladivostok. Je suis devenue la complice d’Hélène, je suis la provodnitsa qui coince son balai pour ne pas que les troufions entre dans la cachette où se terre Aliocha.
Je les quitte au bord de l’océan de tous les espoirs. Maylis de Kerangal m’avait enthousiasmée avec « naissance d’un pont », un gros pavé et elle réitère avec ce court roman.
« Tangente vers l’Est », le petit récit de Maylis de KERANGAL fait partie de ces livres dont il est difficile de dire pourquoi on les a aimés tant il y a de raisons.
Est-ce l’improbable rencontre, comme une attraction des contraires, d’Hélène et d’Aliocha ? Hélène la Française fuyant son amant russe et Aliocha, jeune appelé qui tente d’échapper au service militaire et surtout au bizutage, qui se cherchent et s’évitent ?
Est-ce le rythme lent, lancinant parfois, traduit par des phrases longues, sinueuses, ou courtes et claquantes comme le roulis du train ?
Est-ce la Russie fascinante d’Anton, l’amant, Russie décrite à la manière d’un inventaire à la Prévert ? Ou celle plus réelle des paysages qui défilent…
Ou encore l’écriture, dense, travaillée, ciselée, sans mots inutiles ?
C’est sans doute tout cela à la fois qui m’a, en quelques heures seulement, propulsée jusqu’à la fin du livre, petit bijou de concision, essoufflée mais émerveillée.
Une épopée ferroviaire à l'issue incertaine...
Parce-qu'il n'a pas de femme enceinte de 6 mois ou suffisamment d'argent qui pourraient le faire échapper à la conscription, Aliocha se retrouve coincé dans un wagon de 3ème classe du transsibérien en partance pour une destination inconnue mais lointaine et condamné à subir le supplice du bizutage et du service militaire ; seul échappatoire, fuir ou se cacher... Hélène, une française, a aussi pris la direction de la Sibérie pour des raisons différentes et la rencontre entre ces deux là, si improbable qu'elle soit pour cause d'incommunicabilité, revêt un aspect insolite et romantique avec la taïga en toile de fond.
J'ai beaucoup aimé ce petit roman dans lequel j'ai retrouvé la plume si particulière de Maylis de Kerangal qui m'avait enchantée dans "Naissance d'un pont" : une écriture qui "rentre dedans", puissante et très rythmée ; en trois mots, elle croque une trogne de russe ou l'atmosphère d'un wagon rempli de corps de conscrits, qui sait aussi décrire sans emphase la beauté de la forêt russe. Une démonstration d'écriture éblouissante !
Maylis de Kerangal, c'est une originalité et un style délicat. Ses romans traitent, dans un contexte inhabituel, des relations humaines entre des êtres très différents qui se croisent inopinément. Ici, c'est la rencontre dans le transsibérien d'un futur soldat et d'une jeune française.
Aliocha, 20 ans, vient d'être enrôlé dans l'armée et part avec ses futurs camarades vers l'est sibérien. Dans ce train commencent déjà la vulgarité et la violence qui l'attendent à l'armée. Aliocha possède à la fois la fragilité et le romantisme de sa jeunesse et la force d'un futur soldat. L'armée fait peur à ces jeunes gens qui tentent par tous les moyens d'y échapper.
Hélène retourne en France, déçue de son amant russe qui s'intègre si bien dans ce pays qu'il découvre après son exil français.
C'est donc la rencontre de deux êtres pressés de fuir l'est sibérien qui, réunis dans un regard vont tenter de se comprendre sans parler la même langue.
L'auteur nous berce au rythme de ce voyage en train de longues et riches descriptions, tant sur le visage et l'attitude des personnages que sur le paysage. Et sa description du lac Baïkal vous donne vraiment envie d'aller découvrir ce lieu magique.
Le récit est court et pourtant l'auteur parvient à construire une histoire complète qui allie suspense et émotion, une belle rencontre où se mélangent l'étroitesse et l'austérité de ce train avec la grandeur et la beauté des paysages.
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