L’auteur de BD, peintre et réalisateur raconte son énigmatique « Nu avec Picasso »
Quelle est cette main inconnue et surpuissante qui attrape Enki Bilal au beau milieu de la nuit et le projette sur un lit de camp ?
Quel est ce lieu mystérieux et hanté dans lequel il a atterri ?
Qui sont ces créatures, minotaure, cheval ou humains déformés, que l'artiste rencontre en essayant de trouver son chemin dans ce labyrinthe sombre et inquiétant ?
Que lui veulent-elles ? Et dans quel état sortira-t-il de cette incroyable nuit ?
Dans une déambulation hallucinée, Enki Bilal croise tant les personnages de Picasso, ses muses, ses modèles, que le grand maître lui-même et Goya, son idole. Son errance dans les couloirs du Musée Picasso prend la forme d'une rêverie éveillée qui nous fait toucher du doigt l'oeuvre du peintre espagnol d'une façon sensorielle et envoûtante, pour aboutir en épiphanie à la présentation de Guernica, la grande toile du maître.
L’auteur de BD, peintre et réalisateur raconte son énigmatique « Nu avec Picasso »
Ma nuit au musée propose à un écrivain une expérience unique, seul dans un musée, la nuit. Après Kamel Daoud, Lydie Salvayre, Adel Abdessemed avec Christophe Ono-dit-Biot, Santiago Amigorena mais aussi Lénonor de Récondo, c’est Enki Bilal qui a tenté et réussi l’expérience. Depuis, Bernard Chambaz, Leila Slimani, Zoé Valdès et Jakuta Alikazovic ont pris le relais.
Immense auteur d’albums de bande dessinée mais aussi scénariste et cinéaste, Enki Bilal nous avait présenté cette expérience en ouverture des Correspondances de Manosque 2020. J’avais laissé son livre dédicacé de côté et je m’y suis enfin plongé pour ressentir toute l’originalité d’un vécu, à l’intérieur du Musée Picasso, à Paris.
Au moment où cela se passe, le musée est en pleine thématique Guernica. Un simple lit de camp est installé pour permettre à Enki Bilal de prendre un peu de repos mais ce lit se transforme vite en baignoire de Marat assassiné par Charlotte Corday : Le Meurtre (1934).
Cette nuit, le nu est de rigueur : l’auteur est nu, Picasso, Dora Maar, Goya, les femmes et le bébé venant poser pour Guernica sont nus aussi.
Nu avec Picasso, Enki Bilal, après avoir été happé par une main invisible, marche dans le noir, dans le silence et pense aux prisons franquistes. La première œuvre qui prend vie devant lui, c’est La femme au vase (1933), bronze impressionnant de Picasso. Alors que l’odeur de la mine de plomb s’impose, odeur qu’il aime bien, Enki Bilal voir La femme qui pleure (1937). C’est Dora Maar, grande artiste, qui est là aussi, avec son appareil photo, et l’accompagne. Bien sûr, l’auteur de Bug dessine et illustre superbement ce petit livre. Il dessine même Hitler à la manière de Picasso, ce que ce dernier n’a jamais fait.
Enfin, avec l’arrivée d’Akilino et du Minotaure, c’est Guernica qui s’impose alors que Goya passe par là car Pablo Picasso aurait été très inspiré par El tres de mayo (1808) pour son tableau dénonçant la meurtrière alliance entre Franco, Hitler et Mussolini. Si Goya ne connaît pas ces personnages de sinistre mémoire, Dora Maar intervient et lui glisse que c’est un peu comme Napoléon pour lui.
Entre temps, Enki Bilal a dessiné Marx, Lénine, Staline et Mao et parle d’autres dictateurs. Le bruit des stukas s’amplifie, celui des bombes aussi. L’auteur s’identifie à un modèle devant tenir une pose impossible pour le peintre qui fait poser aussi ces trois femmes, ce bébé, le Minotaure, Akilino, pour un tableau voulant alerter le monde sur un désastre à venir encore plus terrible.
La tension est à son comble. Il faut sortir, se retrouver dans la rue, en jean, et terminer cet écrit très original, mêlant imaginaire, réalité, art, le dehors et le dedans des artistes.
Nu avec Picasso est une belle petite réussite pour Ma nuit au Musée (Stock), réussite bonifiée par les dessins signés Enki Bilal, le tout motivant un retour devant les œuvres ayant particulièrement impressionné l’auteur puisqu’elles ont repris vie devant lui.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
La collection Ma nuit au musée, aux éditions Stock, dirigée par Alina Gurdiel permet d’allier deux passions, l’art et la littérature.
« Le principe est simple: un auteur ou une autrice est invité.e à passer une nuit, tout.e seul.e, dans un musée. De cette aventure, insolite, mystique, angoissante, bouleversante selon les cas, naît un livre. Pas un livre d'art, un essai ou un roman, mais un texte bien souvent extrêmement singulier, tant l'expérience semble conduire les écrivain.es hors de leur zone de confort ».
Tout comme Kamal Daoud, Lydie Salvayre, Adel Abdessemed et Christophe Ono-dit-Biot ou encore Santiago H. Amigorena, avant lui, Enki Bilal a donc pu passer une nuit entière dans ce lieu. Il se verra d’ailleurs, au cours de son délire tracer son nom sur le mur à la suite de ses prédécesseurs !
Enki Bilal, dans Nu avec Picasso nous raconte donc cette expérience hors du commun, cette nuit passée au Musée national Picasso-Paris avec pour seule compagnie les œuvres du peintre, un moment hors du temps favorable au questionnement, à l’imaginaire, à la fantaisie et à l’écriture, une période propice à la création.
Au milieu des œuvres du génie espagnol, il s’est laissé emporter, écrasé par le poids de Guernica, tentant d’interpréter la nature de ces créatures que sont ce cheval, ce taureau, ces visages déformés, déambulant au milieu de ces personnages, essayant de trouver son chemin dans ce labyrinthe mystérieux et inquiétant, croisant entre autres, les muses de Pablo, telles Marie-Thérèse Walter ou celle qui était aussi photographe, Dora Maar, le grand maître lui-même et son idole Goya.
Enki Bilal, dans ce texte assez court de moins de cent pages nous offre une véritable aventure, un voyage délirant au cœur de la création, un voyage qui nous conduit dans le dedans et dans le dehors, le passé s’installant dans le présent. Il s’écarte ainsi de son domaine de prédilection qu’est la bande dessinée, croquant néanmoins quelques superbes dessins venant agrémenter de fort belle manière le récit.
Comme le conseille l’auteur en préambule, pour savourer pleinement votre lecture, il est préférable d’avoir à portée de vue plusieurs reproductions et notamment celle de Guernica.
Autre découverte pendant l’expo « Picasso et la bande dessinée », des dessins d’Enki Bilal… qui m’ont mené à ce petit livre de la collection « une nuit au musée ». Une nuit au Musée Picasso à Paris que nous raconte donc Bilal. De son lit de camp à ses promenades étranges, nu…. du « Portrait de Dora Maar » à « Guernica » en passant par « Le meurtre » et « la femme au vase ». Des rencontres nocturnes fantasmées avec Picasso lui-même, Dora Maar, Goya et le minotaure himself.
Un texte court, illustré bien sûr de dessins, certains croqués sur le vif, d’autres plus élaborés… Un voyage d’une nuit, une expérience !
J’aime beaucoup cette collection Une nuit au musée proposée par Alina Gurdiel et Stock.
A peine entré dans le musée Picasso, une main invisible propulse Enki Bilal dans les murs du musée et le jette sur le lit de camp dressé à son. Entouré des œuvres, dessins, sculptures du maitre, il rencontre la femme de bronze. Elle lui parle et le pousse à entendre ses propres pulsations, son moi intérieur, ses pensées, pour entrer en communion avec Picasso. D’autres avant lui sont passés ici, aucun n’aura vécu la même histoire, aucun n’aura senti les mêmes forces créatrices, car l’esprit du maître présent dans ses œuvres parle différemment à chacun d’entre nous.
Guernica, l’œuvre emblématique de Picasso, Guernica, ne quittera plus jamais le musée Reina Sofia à Madrid. Pourtant, cette nuit se passe pendant l’exposition Guernica du musée Picasso. Enki Bilal l’évoque longuement tout au long de cette nuit.
Ses portraits esquissés des collègues d’Hitler sont un émouvant rappel de cette période si sombre de l‘Histoire. Picasso lui-même a tenté de s’opposer à la dictature, à la guerre, même loin de son pays, par le symbole, le trait, la force de ses toiles.
Tout au long de cette nuit, ceux que Picasso a aimés viennent à la rencontre d’Enki Bilal, de Dora Maar à Goya son idole, mais aussi ses œuvres ou leur évocation, Guernica, La femme qui pleure, la femme au vase de bronze, et l’assassinat de Marat par Charlotte Corday.
J’ai aimé assister à la rencontre de ces deux artistes et profiter des nombreux dessins d’Enki Bilal qui ponctuent sa nuit au musée Picasso.
lire ma chronique complète sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2020/08/13/nu-avec-picasso-enki-bilal/
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Merci Jean Paul pour cette superbe chronique . Je regrette aujourd’hui de ne pas être férue de bandes dessinées parce que le talent de l’écriture comme du dessin se juxtaposent en un délicieux roman de ce que vous en décrivez . Belle année . Belles lectures . Prenez soin de vous