"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« - Tes allers-retours entre la vie et la mort tu vas les faire encore longtemps ?
- Le temps qu'il faudra. Pourquoi ? Tu te fais du souci pour moi ?
- Tu es juive, n'est-ce pas ? C'est insensé, tu sais ce qu'ils te feront s'ils te prennent ?
- Je n'ai pas peur. À Copenhague, je suis chez moi. Ce sont eux les envahisseurs ».
Danemark 1943, Niels Rasmussen rencontre Sarah à la rousse chevelure. Il rejoint alors la Résistance et devient le saboteur de génie qui remodèle la ville occupée à coups d'explosifs. Quand le conflit mondial s'achève, Sarah attend un enfant et les héros sont prêts à recueillir leurs lauriers. Pourtant, une page du Parisien Libéré glissée dans un courrier anonyme va infléchir le destin. Dans la rubrique «Épuration» Niels lit :
C'est le 7 mai que le dramaturge Jean-François Canonnier, actuellement détenu à Fresnes, passera devant la Cour de justice de la Seine. Il sera défendu par maître Bianchi.
Éperdu d'incompréhension et pour sauver son « frère de coeur », il entreprend une odyssée qui fera vaciller toutes ses certitudes quant à l'héroïsme, la lâcheté, la Résistance et la collaboration.
Roman d'aventures, enquête introspective, Niels fait fi des genres littéraires et nous soumet à la question : Et vous, qu'auriez-vous fait ?
Niels Rasmussen est danois. Il est résistant et fait sauter des trains pour lutter contre le nazisme. Sa compagne, la rousse Sarah l’a séduit et converti lors de leur rencontre dans un cinéma, où elle sauvait régulièrement des familles juives. Nous sommes en 1945, la fin de la guerre est imminente et Sarah sur le point de donner naissance à leur enfant …
Pourtant Niels va partir du jour au lendemain rejoindre la France, pays maternel, lorsqu’il lira sur un journal que son ami de jeunesse, Jean-François Canonnier, avec qui il a monté des pièces de théâtre à Paris, se trouve à Fresnes. Son “alter égo” qu’il n’a pas vu depuis plusieurs années, va être jugé pour collaboration et dénonciation … Le choc est tel que Niels n’a pas vraiment envie d’y croire … Il veut absolument en savoir plus et assister à son procès.
Ce qu’il apprendra finalement de la bouche même de son ancien ami, plusieurs années après la libération de prison de ce dernier, sera pire que tout …
Un bon roman bien ficelé et d’une construction très “visuelle”. Toutefois le “mélange des genres” (à savoir littérature mêlée de parenthèses théâtrales) m’a un peu déstabilisée en cours de lecture, jusqu’à me faire perdre - par moment - le fil des évènements …
Alexis Ragougneau avait été une de mes bonnes surprises de l’année 2016 avec son deuxième polar «Evangile pour un gueux ». J’avais beaucoup aimé cette enquête policière qui tournait autour d’une des passions de l’auteur, Notre Dame de Paris. J’étais donc impatient de découvrir ce que cet auteur allait nous concocter en s’attaquant à un roman « classique » sur une autre de ses passions, le Théâtre !
Il y a quelques années, j’avais déjà rencontré cette ambiance seconde guerre mondiale, collabos,juifs, théâtre, Louis Jouvet, dans le très réussi « Bérénice 34-44 » de Isabelle Stibbe. Les deux histoires se rapprochent dans les thèmes mais là où Isabelle Stibbe racontait les prémices et le début du conflit, Alexis Ragougneau implante son aventure à la fin des hostilités…quand un certain nombre de français doit rendre des comptes.
Le lecteur suit les investigations parisiennes de Niels. Celui-ci cherche à comprendre pourquoi il est porté des accusations sur un ancien ami. Au fil de ses rencontres, le dossier se rempli et les éléments s’accumulent jusqu’au dénouement. A travers cette intrigue, le récit met en lumière les différents comportements du Paris d’après-guerre. Les vrais héros ne sont pas forcément ceux que l’on croit. Beaucoup retournent leur veste avec le rapport de force. Chacun joue finalement pour son propre compte, pour sa survie, avec les cartes qu’il a en mains. C’est peut-être ce qu’il faut retenir de ce sombre roman : On ne peut pas juger les décisions de quelqu’un sans être véritablement à sa place.
L’auteur, dont la plume est une nouvelle fois remarquable, nous raconte l’atmosphère suffocante de la libération. Il dévoile en même temps la face obscure de cette période. Pour l’Histoire et pour son suspense bien mené, je vous conseille chaudement ce texte qui ne nous épargne pas avec du sentimentalisme et préfère nous heurter avec la froideur de la réalité ! Alexis Ragougneau confirme qu’il est un grand écrivain à suivre !
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