Aliénor Mauvignier de la librairie Ombres Blanches à Toulouse, vous présente ses coups de coeur du moment.
Tout commence avec l'innocente Marie Granville, servante d'une riche ferme du Cotentin. L'admirable portrait de cette ingénue ouvre un roman gigogne qui se déploie de chapitre en chapitre. C'est ainsi qu'on découvre les Vuillard et les Lamaury, le procureur Darban, l'avocat Laribière et ses réceptions tristes sous l'Occupation. Au gré des folies de l'adolescence, du jeu sans fin des fiançailles, des petits et grands désastres du mariage bourgeois, on ressort bouleversé par les figures de femmes qui habitent ce roman limpide, construit par bonds et retours fulgurants, comme pour tout saisir de l'appel désespéré du désir, tandis que le bonheur se dérobe comme un rêve d'enfance.
Fresques aux abords feutrés, soudain déchirante, Mai en automne restitue avec une incroyable acuité romanesque l'éclat brut des passions, cette pure énergie qui ébranle les êtres jusque-là suspendus au simple égarement de la vie qui passe.
Dans cette ville du Cotentin, Chantal Creusot met en scène plusieurs habitants issus de milieux sociaux et d’âges différents. Fille de ferme, médecin, libraire, avocat, femme au foyer, étudiants… tous les destins de ces personnages s’entremêlent.
Ce roman, véritable fresque sociale, s’étire sur trois générations et nous entraine dans la vie des différents personnages qui possèdent tous un lien avec les autres qu’il soit familial, amical, professionnel ou simplement de voisinage. Chacun d’entre eux devient tour à tour le personnage principal du récit et l’auteur nous fait partager leurs espoirs, leurs doutes, leurs amours, leurs désillusions.
A travers ces portraits, Chantal Creusot nous raconte une époque, une vie en province mais aussi l’évolution des mœurs entre la seconde guerre mondiale et les années 50. Elle nous plonge au cœur de relations familiales, amoureuses, lorsque celles-ci s’enflamment ou se désagrègent. L’auteur s’intéresse particulièrement aux portraits des femmes qui peuplent son récit. Victimes ou combatives, jeunes ou plus âgées, en couple ou célibataire, chacune d’entre elles semble être une pièce d’un puzzle qui finit par construire un récit sensible et puissant.
Ce récit a parfois des proximités avec ceux de François Mauriac dans les descriptions qu’il fait de la vie bourgeoise et provinciale et dans le caractère des personnages. De quoi le ranger parmi les classiques de la littérature.
Chantal Creusot n’a malheureusement écrit que cet unique roman avant de succomber à une hémorragie cérébrale qui l’a plongée dans le coma de longues années avant son décès en 2009. Et on ne peut que le déplorer, tant son univers tout en sensibilité, à la fois doux et nostalgique est enthousiasmant.
Ce roman se passe pendant et après la deuxième guerre mondiale dans le Cotentin. De beaux portraits de femmes, de femmes amoureuses, volontaires ou non, dépendantes des maris ou des pères….Marie fait partie de ces belles femmes qu’on aime dès les premières pages, elle est rêveuse, vit dans son monde fait de craintes et de silence, elle se laissera séduire sans s’en rendre compte et sera tondue à la libération. Solange amoureuse mais rapidement déçue après son mariage, elle se retrouvera veuve de guerre et continuera sa vie à petits pas, dans le souvenir des jours heureux. Et puis Marianne que j’ai adoré, tant de souffrance, d’envie d’être aimé, qui brûle ses ailes et sa vie avec des aventures sans lendemain. Les hommes sont présents aussi, ils n’ont pas toujours le meilleur rôle, Camille qui laisse Marie aux mains des hommes et des femmes qui vont la tondre car il n’a pas assez de courage pour la sauver….Et tant d’autres. Un très beau livre, une écriture remarquable, vivante, pleine de tendresse, humaine. Une pépite
Ce très joli roman décortique les mystères de l'état amoureux avec une écriture qui fait penser aux romans de Flaubert.
Livre empreint de nostalgie.Seul ouvrage de l'auteur décédée en 2009.
Dans un petit village du Cotentin, Marie fille de ferme taiseuse et simplette, élève seule son petit Eric, fruit d'une étreinte champêtre avec un soldat pendant la guerre. Non loin de là, dans une maisonnette plus confortable que sa simple masure, se terre Solange qui elle aussi élève seule son fils Julien. Retirée à la campagne, Solange rumine feu son amour pour Simon, un avocat tombé amoureux d'elle en regardant une photo que lui montrait sa sœur Michelle, une compagne de résistance. Elle reçoit peu, se laisse aller. Ses parents et ses beaux-parents tentent le dimanche de la sortir de sa léthargie et Marianne, son amie d'enfance passe de temps en temps, assagie depuis que son père est mourant, elle qui passait son temps à multiplier les frasques pour le défier. Dans la ville proche, leurs parents, notables bon teint, s'arrangent avec une vie plus conforme aux apparences qu'à leurs espérances. Lucile, la mère de Marianne, se fane dans un mariage malheureux pendant que son mari, condamné, n'a jamais oublié son amour pour Hélène, l'épouse du procureur, libre, libérée, jouisseuse assumée.
Les destins croisés de provinciaux issus de toutes les couches sociales, de l'avocat à la fille de ferme, du médecin à la libraire. Tous ont en commun de vivre dans une société corsetée par les convenances où les sentiments ont peu de place, on se fréquente et on se marie entre gens du même monde. L'amour existe bien sûr mais ceux qui se laissent guidés par lui s'exposent aux pires déconvenues, parce qu'il ne dure qu'un temps et laisse alors la place à l'amertume et à la frustration. En ces années d'après-guerre, la femme occupe encore une place secondaire. A la campagne, elle travaille bien sûr, amis en ville, dans la bourgeoisie bien installée, elle se morfond dans sa maison trop grande où elle ne sait que faire puisque les domestiques veillent à tout. Si les plus jeunes font des études, ce n'est que pour occuper une position subalterne, en attendant le bon parti qui fera d'elles une épouse accomplie. Celles qui sortent du carcan imposé sont montrées du doigt, détestées de leurs semblables.
Chroniques douces-amères et surannées d'un monde qui n'est plus, ce Mai en automne est une fresque sociale écrite de main de maître par une Chantal CREUSOT inspirée par les auteurs du passé. Psychologie des personnages finement analysée, désirs, déceptions, colères, frustrations disséquées presque cliniquement, peu d'action mais une pelote de destins, qui connaissent leur lot de drames, de passions, qui se déroule sur trois générations et laisse un goût amer pour ces êtres ballottés par leurs contradictions et leurs lâchetés. Un très grand roman.
"Au début des années cinquante, sur les côtes du Cotentin, vivaient à la lisière d'un bois, dans une sombre maison délabrée, une femme et son enfant."
Ce livre commence ainsi, tel un conte, et d'emblée j'ai eu envie d'en savoir plus. Les personnes qu'évoquent cette phrase sont Marie et Julien, deux des nombreux personnages dont nous découvrons le destin.
De façon réaliste, autant par les thèmes abordés que par sa prose, Chantal Creusot nous entraîne dans cette fresque provinciale et partage avec nous l'histoire de plusieurs familles.
Il y a donc Marie, jeune fille simplette au service de la Veuve Laloy, une fermière de poigne, attendrie toutefois par sa bonne à tout faire. Puis la famille Vuillard, dont le fils devient docteur et éminente figure de cette société. Viennent ensuite les Laribière, avocats de renom, puis les Lamaury, libraires.
La vie s'écoule donc, les destins se croisent, certains s'épousent, d'autres s'ignorent, des enfants naissent. Ces enfants qui, justement, essaient d'aller "plus haut" que leurs grands-parents et parents, ont un autre idéal, cherchent le bonheur, essaient de vivre leurs passions et n'entendent pas se marier par arrangement...
Les femmes sont très présentes dans ce roman, beaucoup sont effacées, bourgeoises sages et fidèles au service de leur mari, ou s'accommodant de leur condition en n'espérant plus rien de la vie.
La nouvelle génération en promet aussi, avec Marianne, la fille du Docteur Vuillard, qui ne supporte aucune autorité et vit comme elle l'entend, ou Michelle Lamaury, militante communiste.
Celle qui règne sur ce petit monde, c'est Hélène Darban, l'épouse du procureur, belle, volage, d'une assurance incroyable, que tous les hommes désirent et que toutes les femmes jalousent...
Mais la vie et son lot de surprises toucheront chacune et chacun, riches, pauvres, jeunes, vieux, et on se rend compte que le destin frappe où il veut, sans aucune considération.
Nous découvrons ces vies, un repère généalogique est proposé en premières pages, lequel est bien utile parfois pour ne pas se perdre, surtout en début de lecture. Mais au fil des pages on s'en passe, tant nous sommes imprégnés de ces personnages parfaitement présentés et de leurs relations croisées.
Une jolie découverte que ce premier et dernier roman, Chantal Creusot étant décédée peu de temps après l'avoir écrit.
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