En 2024, ces auteurs et autrices nous émerveillent plus que jamais !
« Sa voix était miel et poison, sang et lait. Joseph l'aurait reconnue parmi des millions. Il savait que si Anima, un jour, lui demandait quelque chose avec cette voix - si elle lui demandait quoi que ce soit -, il serait incapable de refuser. »
À la mort de son père, tombé au champ d'honneur, Joseph Portedor emménage avec sa mère sur l'île de Tounis, à Toulouse. Le garçon est d'une sensibilité extrême. D'une pression de la main, il peut deviner une grossesse, un coeur qui s'épuise, la composition d'un objet, son histoire. On se passe le mot. Il consulte le samedi dans un bordel où sa mère fait le ménage.
Et il y a sa voisine du dessous : Anima Halbron, une juive. Elle a des oreilles de lutin et une langue venimeuse.
Son père lui a appris à jouer Schumann. Quand Joseph la rencontre, il a beau n'être qu'un enfant, sa vie bascule.
Il la protégera coûte que coûte.
Dans cette fresque baroque qui nous entraîne de la Première à la Seconde Guerre mondiale, Guillaume Sire nous conte avec générosité et tendresse une histoire d'amour impossible entre un homme que tout blesse et une femme que rien n'atteint.
En 2024, ces auteurs et autrices nous émerveillent plus que jamais !
Guillaume Sire est de retour pour cette rentrée littéraire 2024 avec un récit initiatique, il nous fait voyager au coeur de l'entre deux guerres. Une belle écriture addictive, touchante, l'intrigue aborde l'amitié, l'amour, la quête de soi et l'accomplissement. On retrouve une galerie de personnages plus ou moins étranges et fantasques. C'est aussi une grande histoire d'amour sublime et contrariée. Un récit fluide et poètique.
"Chaque livre, c'est quelqu'un. Souvent, il en ouvre un au hasard. Son métier consiste à ordonner la cosmogonie des étagères, de façon à protéger des trésors qui autrement tomberaient aux mains de Dieu seul sait qui pour devenir Dieu seul sait quoi. Il passe des jours et des nuits plongé dans la chrysalide du répertoire; des semaines en compagnie d'Homère, Eschyle, Shakespeare, Malherbe, Racine, Verlaine et Dostoievski. Les Iivres ont une vie. Joseph traverse leurs nervures, leur goitre d'écaille, leur vélin, leurs onglets. Il observe comment l'encre de certaines lettres rondes (b, c, d, o, p) a aplati le relief de la page. Il devine aussi les provenances : cuir français, enluminure de Hollande, diastole surmontée d'un accent aigu typique des imprimeries anglaises, oeillet espagnol, queue-de-page à la mode bourguignonne, sang-dragon italien, aquatinte normande, grainage helvète."
Cette histoire épique et rocambolesque qui vire au fantasque avec une galerie de personnages farfelus qui suivent leur instinct, débute lors de la guerre de 14-18 et nous fait traverser la seconde guerre mondiale. Elle prend naissance à Toulouse, là où Joseph voit le jour. Son père ne revient pas de la guerre, laissant l'enfant désemparé. L'entre-deux entre deux guerres n'est pas une période facile pour le peuple et, dès les années vingt, l'antisémitisme est partout.
J'ai beaucoup aimé cette traversée de ma ville alors que le clocher de la Dalbade était encore debout (on assistera, dans le roman, à son effondrement.
« Lorsque la nuit tombe sur le quartier de la Dalbade on entend des murmures près des portes. Des chouettes tournoient autour du clocher. Des ombres aux épaules larges arpentent les rues. Des portes s'ouvrent au milieu des étincelles. On emmène parfois un homme, chiffon gras sur la tête, personne ne sait ni pourquoi, ni où. »
Amateurs d'Histoire avec un grand H, passez votre chemin, car ce roman n'est qu'un prétexte à traverser une période troublée où le héros, ce garçon étrange et hypersensible qu'est Joseph, va faire feu de tout bois en jouant le rôle du chevalier à la rose. Amoureux d'Amina, sa voisine juive qui est pianiste, il n'aura de cesse de vouloir la protéger alors même qu'elle aura épousé un nazi. Des personnages truculents parsèment l'histoire, à commencer par Thérèse, veuve inconsolée et mère inquiète de Joseph, ou encore la Cardinale, mère maquerelle rebelle et généreuse, aussi le prêtre communiste et résistant ou encore Michel, survivant à l'effondrement du clocher de la Dalbade.
Des péripéties plus folles les unes que les autres permettent à Joseph de retrouver Anima devenue mère de famille germanique.
« Joseph a reconnu l'homme de la photo. Derrière l'officier SS, il entrevoit le père de famille fou d'amour, amoureux d'une pianiste juive. »
Cette histoire d'amour dans une Europe en guerre entre deux êtres si dissemblables nous entraine dans des aventures débridées. L'amour peut soulever des montagnes dit le dicton, et Joseph va traverser la guerre et ses mésaventures avec panache et une dose d'inconscience, toujours poussé par cette passion débridée et sans retour pour l'impitoyable Anima.
On aura droit à un petit tour à l'hôtel Lutetia où sont accueillis les survivants des camps, dans un décor d'une autre époque, et Guillaume Sire s'en donne à coeur joie à décrire le contraste entre deux mondes.
« ...tout cela au milieu des vitraux d'or gris, des lustres de Lalique, des stucs, des peintures à fresco, des parquets de chêne en points de Hongrie, des couverts Christofle, des décanteurs Baccarat, de la porcelaine Haviland et des salamandres Chaboche. »
L'écriture flamboyante, élégamment ornée, cherche à enjôler le lecteur dans sa démesure. On s'en gausse, on sourit et frissonne tour à tour. Mais, parfois, l'excès peut éblouir et finir par lasser.
Un bon moment de lecture pour ce roman baroque qui n'aura pas ma préférence parmi les œuvres de Guillaume Sire.
Je ne pensais pas que j'allais apprécier autant ce roman. J'avais lu des retours assez mitigés de lecteurs n'ayant pas adhéré au style de l'auteur, d'autres enthousiastes ... sans trop deviner de quel côté la balance allait pencher pour moi. Et bien j'ai été emportée par le destin rocambolesque de Joseph Portedor dont le nom est promesse d'aventures. Promesse tenue car le héros va en vivre, de sacrées aventures !
Joseph naît à Toulouse au début du XXème siècle. Son père meurt durant la Grande guerre et sa mère, pour subvenir à leurs besoins, est obligée de travailler dans un bordel. C'est un enfant à l'hypersensibilité totale. Comme une éponge, il ressent tout d'une personne au point de pouvoir déterminer si elle est malade, enceinte, va mourir avant même l'arrivée des premiers symptômes. Presque un super pouvoir qui lui permet de lire l'épaisseur d'un sang, l'acidité d'une odeur ou la dilatation des pores d'une peau.
« Une silhouette s'esquissa sur le bois rouge. Les angles dans la gorge de Joseph fondirent. La fille était là : sa peau blanche, son duvet sur le bord des lèvres. Son sourire lui dessinaient des couteaux sous les mâchoires. Des pupilles ovales accentuaient l'aspect oriental de son visage et donnaient à son regard une signature virile, presque une forme de vieillesse, contrebalancée par le cuivre des cheveux, la pointe elfique des oreilles, la porcelaine des joues. (...) Joseph sentit dans son cerveau une secousse, puis des crépitements. Tout à coup, il voulait être avec cette fille. Il voulait la serrer dans ses bras. Rien d'autre. Il voulait la suivre partout. Fondre en elle. Devenir sa peau. Devenir son ventre. Une vague brûlante le submergea, et il perdit connaissance. »
Un jour, il tombe fou amoureux de sa voisine Anima, aussi vindicative, acerbe et dure que lui est doux. Il décide de l'aimer malgré elle, malgré ce qu'elle pense, et quoi qu'il arrive de la protéger. Anima est juive et les périls sont grands en cette période. C'est cette histoire d'amour singulière qui nous est contée en deux sections, années 20 et Deuxième guerre mondiale.
Le narrateur omniscient est très présent dans le récit afin de guider le lecteur dans les expériences de Joseph. L'écriture est travaillée à l'extrême, bien loin de chercher le naturel, mais est totalement au service de cette histoire épique. Elle fonctionne par analogie, par un choix précis et abondant d'adjectifs voire de mots précieux. On sent la méticulosité ( et la gourmandise ) qu'a eu Guillaume Sire à choisir ses mots et à les agencer. Cela peut déplaire si on s'attarde sur le côté chargé, mais moi, cette flamboyance littéraire m'a charmée avec son feu d'artifices de sensations, textures, grains et saveurs.
Et puis, son lyrisme sert tellement bien cette histoire d'amour folle tordue par la grande Histoire. Joseph se prend pour le chevalier à la rose et accordera toutes ses actions, y compris sa participation à la Résistance, pour servir cette Anima qui certes, ne l'aime pas en retour dans l'immédiat, qui peut-être l'aimera un jour, mais qui en tout cas à bouleversé sa vie. C'est un magnifique Orphée prêt à tout pour retrouver son Eurydice encore vivante quitte à braver l'enfer nazi.
C'est vrai que j'ai eu un petit coup de mou à mi parcours sous cette avalanche d'émotions et de personnages tous plus truculents les uns que les autres ( inoubliables personnages de la reine maquerelle La Cardinale ou du prêtre communiste ). J'ai également apprécié le pas de côté d'un auteur qui ne cherche pas à témoigner d'une époque mais juste à déployer une histoire d'amour presque conte.
Oui, il y a peut-être un excès de romanesque mais le contexte historique ( Première guerre mondiale, montée de l'antisémitisme, guerre d'Espagne, Deuxième guerre mondiale ) est tellement dramatique qu'il permet justement ces débordements romanesques. Et puis cela fait du bien de lire un roman aussi généreux et surtout libre d'aller dans les directions qu'il veut. Sans morale, ni thèse, ni leçon, juste un existentialisme solaire qui se révolte contre la finitude humaine pour attester de la force de la vie.
PS : le très beau titre vient d'un poète roumain juif assassiné à Auschwitz, Benjamin Fondane. Je suis allée chercher sur le Net son oeuvre, c'est juste sublime !
Pas mal du tout de tout sa qui sont tellement différends l un de l autre ,une decouverte intéressante et comment va t il finir avec elle , surtout très touchant un très bon moment de lecture à découvrir
Ce roman d'amour est étrange et dérangeant. C'est l'histoire d'un petit garçon bizarre et d'une petite fille zarbie qui vivent très jeunes une relation hors norme. Une éponge que tout blesse offre pour toujours son cœur à un hérisson caparaçonnée. La fille, Anima, a perdu son frère et joue du piano coachée par un père virtuose ostracicé car juif à une époque oú les chefs d'état organisent leur extermination. Le gars, Joseph, a laissé son père mourir dans les tranchées de la 1ere guerre mondiale et vit en toute bonhomie dans un bordel avec sa mère alcoolique. Le petit mec a le pressentiment que son amoureuse va un jour mourir dans d'atroces conditions. Il invente un mantra pour contrer le mauvais sort. Oui mais, qui écoute un enfant ?
Ce roman est épique et vous entraîne à la rencontre de prostituées courageuses, d'une mère tondue pour aimer trop son fils, d'un nazi amoureux qui cache à un colonel en colère deux français échappés d'une prison, d'un curé communiste chef de la Résistance toulousaine, d'une meute de chiens allemands stoppés net par un seul geste, d'un sculpteur bon vivant qui fait sauter un câble électrique sous-marin et ramène à la nage son ami éventré...
Ce n'était surement pas facile, le romancier a rendu ce récit cohérent et onirique. Il pique, il caresse, il réchauffe et glace. C'est une expérience sensible. J'ai lu avec la tête, avec mes tripes, avec ma sensibilité.
L'amour ne sauve pas le monde mais l'Amour malgré tout
L'avez-vous lu ?
Au début du vingtième siècle, alors que le nazisme commence à empoisonner l’Europe, Joseph est un drôle de petit bonhomme qui sent les choses, qui prédit le malheur. A tel point que lorsque sa mère se retrouve veuve de guerre et que pour pouvoir subsister (et s’acheter de l’alcool) elle fait le ménage dans un bordel, le don de Joseph est exploité par ces dames. L’arrivée d’une impertinente voisine qui joue du piano va modifier le sens de sa vie.
Traversant la période des deux guerres, le roman met en page un personnage très étrange mais déterminé, jusqu’à l’obsession. C’est une façon originale de traiter des tourments de cette époque, avec la verve et la précision lexicale pointue de Guillaume Sire. Il est recommandé de se munir d’un dictionnaire si l’on veut enrichir son vocabulaire.
J’ai pris beaucoup de plaisir à suivre les aventures de Joseph, dans ce roman haut en couleur et non dénué d’humour.
350 pages Calmann-Lévy 21 aout
Lu pour les Talents Cultura
De très nombreux personnages se croisent et se recroisent, on tente de les suivre dans cette époque terrible entre deux guerres, on cherche à s'identifier à certains, on aimerait les aimer. Ce n'est pas toujours aisé, ce n'est pas une lecture facile, il faut se concentrer pour ne pas perdre de vue les personnages marquants et les secondaires, qui viennent poser leur pierre à l'édifice. Et, il y a cette histoire d'amour, Joseph vulnérable, Anima parfois trop intrépide. Guillaume Sire est enthousiaste et il veut nous entraîner avec lui dans ce tourbillon, il y parvient souvent, mais au fil des 360 pages, il perd son lecteur obligé de revenir en arrière pour savoir qui est qui.
Joseph n’est pas un enfant comme les autres. Atteint d’hyperesthésie, il a le don de deviner, de prévoir et même, à l’âge adulte, de faire stopper une meute de chiens enragés. Inconsolable à la mort de son père durant la Première guerre mondiale, il se promet de venger son père. Sa mère, seule avec son enfant est secouru par un curé communiste qui lui trouve une place comme femme de ménage dans une maison close dirigée par une espagnole appelée La Cardinale.
Quand Joseph et sa mère déménagent, leurs voisins du dessous sont juifs. Une petite fille Anima semble étrange mais à l’opposé de Joseph, rien ne semble l’atteindre. Joseph en tombe amoureux et est prêt à tout pour la séduire et…la sauver. Pianiste virtuose, elle part à Paris sans laisser d’adresse. Puis la Seconde guerre mondiale éclate. Entre la France et l’Allemagne, l’épopée de Joseph n’est pas terminée.
Une fresque surprenante où l’érudition s’entrecroise avec la simplicité. Une kyrielle de personnages s’entrechoquent, disparaissent, reviennent sans jamais laisser le lecteur dans l’impasse. Guillaume Sire, à l’instar d’un peintre avec des petites touches, glisse avec virtuosité quelques éléments historiques – le clocher de Notre-Dame de la Dalbade à Toulouse, la guerre civile espagnole, les faux revenants à l’hôtel Lutetia – dans un océan de rebondissements frisant parfois le burlesque, un peu à la Pierre Lemaitre.
Guillaume Sire a cette valeur qui fait la différence dans la littérature : il n’hésite pas à prendre des risques pour sans cesse se renouveler, créer la surprise en refusant la monotonie de la facilité.
Blog Le domaine de Squirelito ==> https://squirelito.blogspot.com/2024/08/noisette-singuliere-les-grandes-patries.html
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