"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Que se passe-t-il lorsqu'un auteur, qui a beaucoup écrit sur l'enfance, remonte le fil d'argent de sa propre enfance ?
Le Plus Court Chemin est un hommage aux proches et la tentative de revisiter avec les mots ce vaste monde d'avant les mots : les êtres, les lieux, les sentiments et les sensations propres à cette époque sur le point de disparaître, les années d'avant la cassure, d'avant l'accélération générale qui suivra la chute du mur de Berlin.
Raconter l'existence dans les paysages infinis de la campagne wallonne, dire l'amour et le manque. Car écrire, c'est poursuivre un dialogue avec tout ce qui a cessé d'être visible. Par-delà la nostalgie.
Après la lecture de « Mahmoud ou la montée des eaux », j’avais hâte de retrouver la plume poétique d’Antoine Wauters. « Le plus court chemin » est un recueil de souvenirs de l’auteur, avec des chapitres courts comme les pièces d’un puzzle pour comprendre d’où lui vient son besoin d’écriture. Avec une prose poétique épurée et pleine de mélancolie, il décrit son enfance dans les années 80, une enfance d’avant les réseaux sociaux, une vie plus lente et introspective.
A travers les portraits de sa famille, les souvenirs de son enfance, les réflexions sur son sentiment de différence, on voit la naissance d’un écrivain.
« L'écriture m'a beaucoup donné et elle m'a beaucoup pris. Ce qu'elle m'a donné de meilleur? Une voie parallèle. Ce qu'elle m'a pris de plus précieux? La voie principale, celle qui menait aux autres. »
C’est un récit intime, avec de belles envolées poétiques, une écriture comme le plus court chemin vers l’enfance…
J’ai lu ce livre dans le cadre du prix Roman des Etudiants France Culture @leromandesetudiants
Etant donné que j’ai repris mes études, j’ai pu m'inscrire pour participer en tant que jury où la condition est d’être étudiant.
Premier livre que je découvre et je dois dire qu’ici, je sors complètement de ma zone de confort !
L’auteur a vraiment un style hors du commun de ceux dont on a peu l’habitude de lire.
Le récit est troublant, tant par l’histoire racontée que par l’écriture.
La parole de l’auteur est aussi très intime et personnelle. Il nous raconte une partie de son enfance.
On ressent beaucoup d’amour et une certaine pudeur au travers de ses mots.
Un livre vraiment intéressant et différent que je vous invite à découvrir.
Antoine Wauters, auteur que je découvre avec plaisir, nous propose une chronique emplie de nostalgie sur l’enfance avec ses frayeurs, ses rêves et ses regrets. Il y est aussi question de l’écriture, de son exigence et de cette solitude dans l’anonymat. Il y est aussi question de lecture, passage indispensable avant l’acte d’écrire.
« Je crois que quand on vit ça jour après jour pendant longtemps, cette jouissance douloureuse de n’être personne, que quand on vit ça assez longtemps, je crois que oui, on peut écrire. »
Ce livre se feuillette comme un album de famille. A travers les évocations des parents, des grands-parents Nénène et Papou, et des oncles, et, plus proche de lui, son jumeau Charles et c’est un peu comme si on retrouvait certains membres de notre propre famille. Nos souvenirs d’enfance font écho à ceux de l’auteur. Il raconte l’insouciance des jeux.
« Quand il n’y a pas école, j’embrasse prestement mes parents, j’enfile mes vieux habits et je vais jouer. C’est une phrase magique. Tu fais quoi aujourd’hui ? Je vais jouer. »
C’est une enfance simple et ordinaire qui se déroule dans les Ardennes belges, là où on est Wallon, différent des flamands qu’on méprise un peu, il faut le dire. On ne va jamais très loin la vie s’écoule dans ce même lieu, pourtant elle est heureuse
« Aussi loin que je me souvienne, pourtant, mon enfance est un sprint heureux. »
C’est aussi un magnifique portrait de famille et Antoine Wauters pose un regard lucide et tendre sur sa famille. A commencer par la mère qui veille au bien-être de ses enfants tandis que le père, déprimé par la perte de son travail, est plus pudique dans ses sentiments.
Il y a cette phrase que je trouve magnifique « Nous ne sommes pas nés heureux, nous avons appris à l'être » car oui, le bonheur, ça ne tombe pas tout cuit dans la bouche, encore faut-il s’exercer à être heureux pour le devenir.,
En regardant grandir cet enfant à la fois inquiet, coléreux et curieux de tout, on découvre l’écrivain qu’il deviendra car, très vite, l’écriture est là comme une évidence, l’écriture qui autorise une certaine solitude, ce qui convient bien à l’enfant devenu l’adulte qui se pose en marge du monde.
« Je sais qu’écrire, c’est se traverser de part en part en acceptant tout ce que l’on croisera, tout ce que l’on touchera du doigt et que l’on entendra. Même ce qu’il y a de plus terrible. »
« Le plus court chemin », c’est une écriture qui va à l’essentiel, une poésie du quotidien, le tout condensé en paragraphes brefs, ce qui rend la lecture facile et fluide. Mais ne vous y trompez pas, malgré la brièveté des chapitres, le sujet est profond et universel, c’est pour cela qu’il nous touche autant.
Rentrée littéraire 2023.
Avec Le plus court chemin, véritable ode à l’écriture, Antoine Wauters, ne plonge pas dans la vie d’un vieil homme pour relater l’histoire de la Syrie dans les soixante dernières années, comme il l’avait fait dans le magnifique Mahmoud ou la montée des eaux mais dans sa propre vie intérieure, en nous relatant des fragments de son enfance.
Une démarche en fait, quasiment similaire comme il le dit lui-même.
Il nous raconte son enfance, du début à la fin des années quatre-vingts, dans un petit village des Ardennes belges, jusqu’à la chute du Mur qui fut pour lui une onde de choc, une fracture.
Comme des bulles qui remonteraient dans son esprit, Antoine Wauters en se promenant dans le passé, nous livre de courtes séquences où il note ce qui lui revient, un mélange de mémoire et d’oubli.
Il évoque cette enfance auprès de ceux qui l’ont tendrement aimé, dans ce coin de campagne wallonne presque coupé de tout.
Pour faire revivre ce quotidien, il parle des arbres, de la nature immense, il nomme les lieux, raconte son père banquier, sa mère enseignante, son frère Charles et plus tard sa sœur Lorraine, Nénène et Papou ses grands-parents, Parrain Jacques et ses oncles flamands, autant de personnes qui, chacune à leur manière ont eu une importance dans sa vie, une influence dans ce qu’il est, l’ont nourri physiquement et intellectuellement.
Le début des années quatre-vingt-dix sera pour lui l’endroit de la cassure et jouer ne sera désormais plus pareil.
Il confie qu’il n’a pas toujours aimé ces lieux et qu’il en est même parti, mais s’aperçoit que les voix des gens du coin ne l’ont jamais quitté, qu’elles sont toujours là et qu’il les écrit...
L’écriture est pour Antoine Wauters le plus court chemin pour rapporter ces fragments d’enfance qui ne sont plus visibles mais tellement importants.
Ce roman qui s’apparente à une autobiographie est un récit très personnel qui engendre d’immenses émotions. Pourtant, il peut être considéré comme universel, tant le fait que pour chacun d’entre nous, nos vies sont nourries par la voix de nos ancêtres, notre passé.
En contant cette époque, l’auteur nous fait revisiter une époque sur le point de disparaître, le virtuel devenant plus réel que tout : « Un espace de douceur et de cruauté, avant les ordinateurs, avant le règne du porno et des jeux vidéo immersifs, avant que tout se mette à trembler et à aller très vite. Avant que les gens tombent amoureux d’eux-mêmes, abîmés dans leurs téléphones. »
Le plus court chemin m’a fait rêver, rappelé de nombreux souvenirs d’enfance oubliés, m’a évidemment rendue nostalgique de ces temps où comme le dit si bien l’auteur, la vie était placée sous le signe de ce bienheureux ennui...
Tendresse, mélancolie, sensibilité, délicatesse et poésie traversent ce récit intime et universel.
Chronique à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/12/antoine-wauters-le-plus-court-chemin.html
« J’écris ce livre sans réfléchir, comme quelqu’un qui ferait un puzzle sans savoir combien de pièces il compte, ni ce qu’il doit former. […] Je note ce qui revient, et ce qui revient, c’est un mélange de mémoire et d’oubli, de sorte que s’il finit un jour, par former quelque chose, mon puzzle, ne représentera peut-être presque rien, ou seulement la figure de l’absence. »
Ce livre est en effet un puzzle de l’absence . Un promenade de l’auteur dans les recoins des ses souvenirs où il nous dit ses proches, Papou et Nénène, ses oncles flamands, ses institutrices ou ses voisins, où il nous décrit la quiétude de la campagne wallonne et la douceur banale du quotidien. Dans de courts chapitres comme posés au hasard, par fragments, il remonte le fil de son enfance au gré des réminiscences de sensations, de lieux, de mots ou d’odeurs. Une enfance faite de plaisirs simples, préservée, pas si lointaine et pourtant dans un monde « presque disparu », et il nous la raconte avec une douce nostalgie mais sans mélancolie.
On pourrait trouver le propos facile, teinté de « c’était mieux avant », mais ce n’est pas ce qui ressort des mots d’Antoine Wauters. A travers ses réflexions il nous plonge à sa suite dans notre propre enfance, et en se retournant, comme lui on a l’impression « que la partie la plus moelleuse de notre vie nous a été reprise ».
Un livre que j’ai savouré, où j’ai aimé me perdre dans les mots de l’auteur, et où j’ai compris combien l’écriture peut être un refuge.
Un retour aux sources sincère et tendre. Très doux et très beau.
Le plus court chemin nous emmène vers les souvenirs de l'auteur, une autobiographie de l'écrivain décrivant ses souvenirs d'enfance, ses parents, les lieux, son mal être. Le texte est court, bref et nous livre des fragments de sa mémoire. il nous décrit son lien à l'écriture et ce besoin de revenir à la nature. Lecture plaisante qui ressemble aussi à des souvenirs que je conserve.
"L'écriture comme un raccourci. oui. L'écriture comme le plus court chemin"
C'est un livre très personnel que nous propose Antoine Wauters qui revient sur son enfance mais il est tout autant universel en nous ramenant à la nôtre, à ce qui est perdu, ce qui a été, ce qui nous constitue mais n'existe plus qu'en souvenir.
Antoine se souvient de son enfance dans un petit village des Ardennes belges, il nous parle de ses terrains de jeux avec son frère Charles, de la ferme, de la connexion très forte à la nature qui le nourrit.
C'était rigueur et sobriété, amour mais aussi silences, silence du grand-père, silence du père , silence qui lui ressemble.
Il nous parle d'amour, de manque, de ses doutes, de sa nostalgie , de la recherche du bonheur par l'écriture qui le lie à la vie.
Il décrit sa peur viscérale de la mort de sa maman mais aussi son mal être qui l'en approchait, de ce qui l'a tenu en vie, ce fil ténu qui est l'écriture. L'écriture est le plus court chemin qui mène aux autres, celui qui permet depuis tout petit, d'être "plusieurs dans sa tête", de le relier à son enfance, à ce qui n'est pas mort de l'enfance. Le pouvoir de l'écriture qui lui permet de dépasser ce mal-être, à ne pas être soi et l'être à la fois avec certains personnages.
Ces souvenirs, comme des polaroïds de l'époque nous ramènent avec nostalgie à ce qui n'est plus, à une ère révolue, aux années 80.
Avec beaucoup de sensibilité, une écriture poétique, magnifique, on retrouve avec bonheur ces temps oubliés, ce qu'il a été, ce qui l'a construit et fait ce qu'il est aujourd'hui.
A découvrir !
Ma note : 9.5/10
Les jolies phrases
Questions : poursuit-on par nos propres silences des silences entamés plus tôt ? Y a-t-il une communication invisible des silences ? Dans quelle mesure sommes-nous, ou non, l'amplification des fatigues, blessures et "noeuds" de nos ancêtres ?
En écrivant ces lignes, je ne fais que poursuivre cette création-là, comme un funambule sur le fil de ces voix emmêlées remontant du passé, à moitié effacées et pourtant toujours là. L'écriture est ce fil posé sur l'oubli. Et le risque, je crois, est peut-être moins de chuter dans l'oubli que dans la mémoire. De ne plus en revenir. Ce serait alors une autre forme d'oubli. Echouer dans le souvenir par refus d'oublier. Descendre dans l'écriture sans pouvoir en remonter. Être piégé.
J'ai longtemps vécu, et vis encore, avec le sentiment que les mots sont la seule vraie présence en moi. (...) C'est un pays, un lieu qui me devance et vers lequel je tends. Le seul endroit où l'on peut me trouver - et le seul où je me trouve. Partout ailleurs, je n'y suis pas. Je n'ai lieu que là.
On marche pour entendre de qu'il y a avant soi.
L'art se pratique au dos du monde, toujours. Et que l'envers est l'endroit le plus précieux.
Nous ne sommes pas nés heureux, nous avons appris à l'être.
L'écriture m'a beaucoup donné et elle m'a beaucoup pris. Ce qu'elle m'a donné de meilleur ? Une voie parallèle. Ce qu'elle m'a pris de plus précieux ? La voie principale, celle qui menait aux autres.
Parfois, j'en veux aussi à mes livres, au fait que, une fois imprimés, je deviens otage de ce qui devait me rendre si libre, otage de la parole, alors que je tente seulement de cultiver un peu de silence.
L'idée folle de tout type qui écrit ? Être heureux sans le secours des mots.
Je sais qu'écrire, c'est se traverser de part en part en acceptant tout ce que l'on croisera, tout ce que l'on touchera du doigt et que l'on entendra. Même ce qu'il y a de plus terrible. Car cela, il faudra parvenir à l'aimer.
Avant d'être un acte d'expression, écrire est un acte d'écoute. Il faut longtemps se taire et apprendre à entendre, puis seulement parler.
Je regarde le mur, je respire la glycine et je comprends, à cette seule impossibilité de me détruire, que je suis tenu à moi comme un chien à une laisse, et que cette servitude s'appelle vivre. J'ai cessé d'être un enfant ce jour-là.
https://nathavh49.blogspot.com/2023/08/le-plus-court-chemin-antoine-wauters.html
Le vertige des glycines
Antoine Wauters nous livre des fragments de vie, ceux de l’enfance vus par l’adulte devenu, mais aussi de ce lien à l’écriture.
Ce sont des éclats poétiques ou tempétueux, car tout n’est pas que douceur.
La certitude qui l’habite c’est le terreau dont il est issu à la fois force et faille.
« On vivait la vie que les gens vivaient alors, une vie où s’il y avait bien une chose qui n’existait pas, c’était l’envie de se mettre en avant. »
En effet ce sont les années avant les réseaux sociaux et leur grand déballage.
L’intime au plus près de ce qu’est l’auteur, adossé aux traditions, à la rusticité, l’authenticité, la campagne wallonne donnant le « la » du vrai.
Ce sont des éclats lumineux comme le soleil se reflétant sur l’eau et les tempêtes d’un hypersensible, écartelé par les années qui passent et qui doivent plier vers l’âge adulte.
C’est aussi une vie de famille, toutes générations confondues.
L’auteur est loin du cliché du conquérant se présentant devant ses lecteurs avec des certitudes.
C’est au contraire l’enfant multiple qui est toujours là, il a accepté les errances, la fragilité, il fait l’éloge de la simplicité.
Puis au fil de ces parcelles qui nous sont offertes, le lien avec l’écriture se fait, comme une évidence.
Il dit aussi la chance d’avoir des parents présents, attentifs, la lettre du papa page 236, pour ses vingt ans est le point d’orgue. La beauté dans la simplicité, des mots qui sont l’essence d’un père à son fils.
Ces mots disent l’importance des racines et combien il est important de les poser pour lutter contre l’oubli.
J’aime le style Antoine Wauters, la forme qui nous emmène loin et nous fait revenir à nous, car il y a de l’universel dans ce terreau.
Lyrique sans ostentation, c’est un mélange de réserve et de sauvagerie, celle qui fait oser.
C’est une langue singulière que j’apprécie davantage à chaque opus.
Son secret, en plus du terreau, celui des origines, il y a les livres, avec cette phrase qui résonne très fort en moi :
« Lire, c’est une armure de sens. »
Alors vous dire combien je continuerai à lire cet écrivain…
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/09/19/le-plus-court-chemin/
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