"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« Je suis né dans une famille shakespearienne. Entre un père courtisan du roi pendant quarante ans et un frère banni dans une geôle du sud. Il faut imaginer un palais royal effrayant et fascinant, où le favori peut être châtié pour rien, où les jalousies s'attisent quand la nuit tombe.
Un conteur d'histoires sait que le pouvoir est d'un côté de la porte, et la liberté de l'autre. Car, pour rester au service de Sa Majesté, mon père a renoncé à sa femme et ses enfants. Il a abandonné mon frère à ses fantômes. Son fils, mon frère, dont l'absence a hanté vingt ans ma famille. Quelles sont les raisons du « fou » et celles du père ?
Destin terriblement solitaire, esclavage consenti...
Tout est-il dérisoire en ce bas monde ? Mon père avait un étrange goût de la vie. Cela fait des années que je cherche à le raconter. Cette histoire, je vous la soumets, elle a la fantaisie du conte lointain et la gravité d'un drame humain. »
On dit souvent que l’humour est la politesse du désespoir et rien ne le vérifie plus que ce conte moderne aux allures des sensuelles 1001 nuits.
Et qu’est-ce que l’humour si ce n’est de faire l’amour aux mots, les caresser, les titiller pour au final faire jouir son public ?
C’est précisément de ce talent dont est doté Mohamed, le personnage principal du roman de Mahi Binebine. Un don qui porte en lui sa part de tragédie et lui offrira autant qu’il le privera.
Repéré pour sa mémoire exceptionnelle et ses talents littéraires, il rejoindra le cercle des intimes du roi s’extrayant de la misère de la médina de Marrakech pour le confort d’une vie de courtisan. Mais cette baraka soudaine le contraindra aussi à observer une servilité de corps et d’esprit.
Au service de sa majesté, il devra naviguer entre conseils éclairés et ridicule assumé pour agréer à un souverain à l’humeur imprevisible et aux colères homériques. Comme tous les autres courtisans il devra caler le pas de sa vie sur ceux de son Sidi, suivant aveuglément, asservi infiniment, inféodé intimement.
Pourtant une vie, Mohamed en a une en dehors des murs protecteurs du Palais, une existence où à son tour il est maitre en sa demeure. Il y règne en époux qui jamais ne faillira à ses devoirs mais en père qui s’effacera jusqu’au reniement quand son fils participera à une tentative d’assassinat du souverain. Ce dernier sera alors exilé au bagne de Tazmamart où il sera oublié de presque tous et surtout d’un père atteint du syndrome de Stockholm qui continuera à aimer ce roi qui lui a pourtant pris son premier né.
C’est ce tiraillement intime, cette déchirure familiale que rapporte avec brio Mahi Binebine. Conte autobiographique ? Roman historique ? Nul ne sait si ce n’est l’auteur mais comme disait Boris Vian « Cette histoire est vraie puisque je l’ai inventée ». Quoi qu’il en soit ce fut pour moi un tel coup de cœur que je l’ai dévoré en une seule soirée. Un superbe roman rédigé dans une langue fluide et subtile offrant une réflexion nourrie sur la condition humaine.
Fou du Roi peut-être mais Roi de l’écriture à n’en pas douter !
"Fantaisie du conte lointain et gravité d'un drame humain", en effet, ce roman s'apparente à un conte des mille et une nuits. L'auteur raconte la vie de son père Mohamed, fou du Roi, une vie faite d'abnégation et de renoncement, mais vie privilégiée dans un milieu hors du commun. Belle écriture pleine de poésie, on suit avec délice les humeurs d'un Roi tout puissant, non dépourvu d'humanisme.
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