"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un jour, j'eus l'idée d'ouvrir à nouveau mon agenda. Nous étions le mercredi 10 septembre 2008. à la date du mercredi 10 septembre 1980, je vis : « Istoub, 20 heures, le Fourneau. » C'était un restaurant réputé où seuls, en principe, les autochtones pouvaient dîner. Je voulus tout de même y aller. Pour l'occasion, j'achetai une robe et des escarpins rouges. Le maître d'hôtel ne fit pas de difficultés pour me laisser entrer. Il m'installa à une table, contre le mur du fond, ce qui me permit de voir l'ensemble de la salle. Il n'y avait pas grand monde et personne ne faisait attention à moi. Les spécialités culinaires ne m'étaient plus étrangères. Je pris plaisir à mon repas, mais d'Istoub, point. Je réglai la note assez épicée, pris en souvenir la carte que me tendait le maître d'hôtel et sortis. En passant devant la statue du guerrier Gémor, j'eus l'idée de regarder le rectangle de bristol. Sous l'adresse du restaurant, on avait griffonné quelques mots au crayon noir : « Allez demain rue des Fleurs, au 151, à 18 heures. Istoub. » La Distraction des gares est un fantastique recueil de nouvelles fantastiques. On y visite une foire aux seins et on s'y débarrasse de ses tics. On y croise des trains, une fabrique, une péniche, une esthéticienne, des boucs émissaires, on y déguste un navarin d'agneau et une poule. Mais l'apparente banalité de ces réalités ordinaires est trompeuse. Au détour d'un mot, on est déjà ailleurs. Les repères anciens ne fonctionnent plus, attention, territoires inconnus.
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