Comme en écho au Jardin des Finzi-Conti, une oeuvre poignante sur la chute brutale de ces intellectuels politiquement naïfs, dont le destin a été balayé par le régime nazi.
La vie du Dr Isidor Geller est un modèle de réussite. Homme d'affaires respecté, conseiller du gouvernement, multimillionnaire, amateur d'opéra, collectionneur d'art et, après deux mariages ratés, en couple avec une ravissante chanteuse, il a fait du chemin depuis son shtetl de Galicie autrichienne. Certes, dans la Vienne des années 1930 bruissent les échos d'un ordre politique nouveau, mais Isidor en est sûr, rien ni personne ne peut l'atteindre - et sûrement pas ces vulgaires nationaux-socialistes.
Mais, en 1938, c'est l'Anschluss et tout bascule.
Près de quatre-vingts ans plus tard, son arrière-petite-nièce Shelly Kupferberg expose la blessure familiale. S'appuyant sur des documents officiels, des lettres ou encore le journal de son grand-père, lui-même parti sur les traces de cet oncle à l'histoire tragique, elle raconte le parcours d'un homme qui souhaitait faire de sa vie une oeuvre d'art et n'a pas su voir la haine et la violence qui couvaient sous les ors des appartements de ses plus proches amis...
Shelly Kupferberg m’a offert une lecture à la fois bouleversante et essentielle. Ce récit, profondément ancré dans l’histoire familiale de l’autrice, m’a transportée au cœur de la Vienne des années 1930, où j’ai découvert la vie fascinante d’Isidor Geller, son arrière-grand-oncle. Homme d’affaires accompli, collectionneur d’art et conseiller gouvernemental, Isidor représentait tout ce que la réussite pouvait offrir à cette époque. Mais en 1938, l’Anschluss a tout détruit : sa fortune, ses relations, sa dignité. Ce que j’ai trouvé particulièrement poignant, c’est la naïveté d’Isidor face à la montée de la haine et de la violence. Il ne pouvait simplement pas croire que tout ce qu’il avait bâti puisse disparaître, trahi jusque dans sa propre maison.
Shelly Kupferberg utilise des lettres, des documents anciens retrouvés dans le grenier familial ainsi que des photos pour reconstituer cette histoire avec chaleur et empathie. Elle ne se contente pas de raconter la vie d'Isidor, mais aussi celle de son grand-père Walter, témoin indirect de ce drame dans le contexte tumultueux de l'époque. Ces archives, miraculeusement conservées, m’ont impressionnée par leur richesse et leur pouvoir évocateur. Elles donnent une profondeur incroyable à cette quête de mémoire.
Ce livre parvient à rendre perceptibles les heures les plus sombres de l’histoire à travers le destin singulier d’un individu. L’autrice tisse une fresque biographique qui dévoile avec finesse le quotidien de l’époque, d’une manière plus vivante et saisissante que bien des ouvrages historiques. Ce récit émouvant rend hommage à Isidor et aux innombrables vies juives anéanties sous le joug nazi. Bien au-delà d’un simple témoignage, il s’impose comme un appel vibrant à préserver la mémoire et à célébrer ces destins brisés, souvent oubliés.
Ce premier ouvrage, profondément touchant et d’une grande portée, mêle intimement mémoire familiale et Histoire universelle. À lire pour comprendre, se souvenir et honorer ceux dont les vies ont été effacées. Bonne lecture.
https://latelierdelitote.canalblog.com/2024/09/isidor-une-vie-juive.html
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