Armand Patrick Gbaka-Brédé, dit Gauz, un nom venant du diminutif de Gauzomo, déclinaison ancestrale de Gbaka, est né le 22 mars 1971, à Abidjan, en Côte d’Ivoire. C’est à la fin de ce livre étonnant que l’auteur explique tout cela, révélant qu’à 4 ans, son père qui était instituteur, sa mère et...
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Armand Patrick Gbaka-Brédé, dit Gauz, un nom venant du diminutif de Gauzomo, déclinaison ancestrale de Gbaka, est né le 22 mars 1971, à Abidjan, en Côte d’Ivoire. C’est à la fin de ce livre étonnant que l’auteur explique tout cela, révélant qu’à 4 ans, son père qui était instituteur, sa mère et son petit-frère sont partis pour la France, le laissant là-bas passer de famille en famille… Ce n’est qu’en 1999 qu’il a pu venir s’inscrire à Jussieu Paris 7, d’abord comme touriste, pour trois mois, puis sans-papiers avant de devenir enfin citoyen français en deux mois, grâce à sa compagne et à sa maîtrise parfaite des lois et des circuits administratifs.
"Debout-payé" nous plonge brutalement dans une séance de recrutement de vigiles, uniquement des noirs : Congolais, Ivoiriens, Maliens, Guinéens, Béninois, Sénégalais… différenciés par la tenue vestimentaire et leurs accents en français. Pour eux, il est urgent de « sortir du chômage ou des emplois précaires. Par tous les moyens. » Les clichés ayant la vie dure, chacun sait que les noirs sont costauds… Embauchés aussitôt en CDI, ils devront : « rester debout toute la journée dans un magasin, tous les jours, jusqu’à être payé à la fin du mois. Debout-payé. »
Avec un réalisme sans concession, Gauz nous plonge dans le quotidien des logements insalubres où ces hommes peuvent essayer de prendre un peu de repos. L’humour reprend vite le dessus lorsque l’auteur nous fait vivre dans un magasin de fringues et dans un autre vendant des parfums. Le vigile n’a qu’une chose à faire : observer ce qui se passe. Il doit aussi supporter les odeurs et le fond sonore obligatoire : « Du vivant même d’Aretha Franklin, comment peut-on laisser sévir toutes ces sous-chanteuses et dire qu’elles font de la « soul » ? », soulignant un peu plus loin « le manque de talent des brailleuses à la besogne dans les enceintes acoustiques. »
Nous apprenons aussi que : « Le vigile adore les bébés. Peut-être parce que les bébés ne volent pas. » Il détaille aussi les piercings, les scarifications, les tatouages, les iphones. Quand il remarque un père aidant sa fille handicapée ou un mari qui guide sa femme aveugle en se touchant avec tendresse, il note : « Serions-nous plus doux les uns envers les autres si nous nous touchions plus souvent ? »
Son retour à ce que Gauz nomme « L’âge de bronze (1960 – 1980) », lui permet de raconter la Côte d’Ivoire sous Houphouët-Boigny et ses crises de complotite, en truffant le récit de remarques bien senties sur les relations entre l’Afrique et la France.
Suivront l’âge d’or (1990 – 2000) et l’âge de plomb, après le 11 septembre 2001 : « La planète entière vient de plonger dans l’ère de la paranoïa, le temps du tout sécuritaire », un temps qui modifie bien sûr le travail des vigiles qui restent malgré tout toujours "Debout-payé".
Chronique illustrée à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/