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Surtout connu pour son Meilleur des Mondes (1932) et ses Portes de la Perception (1954) dont la génération hippie devait s'inspirer, Aldous Huxley (1894-1963), homme de lettres anglais, installé aux Etats-Unis dès 1937, montre, tout au long de son oeuvre, un intérêt profond pour ce qu'il nomme la "situation humaine". Son ultime texte, Literature and Science (1963), en témoigne tout particulièrement.
Souvent considéré comme un auteur de science-fiction, Huxley est en réalité un érudit éclectique, curieux, sceptique. Ses analyses, d'une vertigineuse simplicité dans un mouvement subtil de métaphores, de mises en abyme et de paradoxes frappants, sont étrangement annonciatrices de notre XXIe siècle. Ses nombreux essais littéraires et philosophiques, dont De la vulgarité en littérature (1930), considéré dans le monde anglo-saxon comme un texte important, sont insuffisamment connus et cités en France.
En 1930, Huxley, qui a acquis une notoriété parfois scandaleuse, écrit, en France, De la vulgarité en littérature. C'est dans un dialogue incessant entre espaces, temps, corps et champs de la connaissance, étroitement liés à ceux de l'expérience, qu'il déroule sa réflexion, en pratiquant un jeu d'alternances et de contradictions, proposé avec sagacité à la sagacité du lecteur. Et la conclusion reste ouverte.
Méditation sur l'art, la philosophie et l'histoire, les moeurs, la morale, la culture (ou l'inculture) moderne, ce texte profondément littéraire pose la question du rôle que l'écrit peut jouer dans notre société, en particulier dans les relations que doivent entretenir la science et l'art.
La vulgarité, mot que s'approprie Madame de Staël à l'aude du XIXe siècle (1800), après la Révolution française, pour désigner une nouvelle société qui s'écarte de l'idéal des Lumières, incarne bien l'instabilité des normes : on est toujours le vulgaire de quelqu'un. Ce que montre implicitement Huxley, c'est la fragilité, la vanité de l'homme face aux cycles de la vie et aux irréversibilités du processus créatif (qui tend, par là, à l'entropie). L'homme a-t-il une action sur le monde? Le balancement incessant des états qu'il traverse peut faire l'objet d'une métaphore poétique, à condition que l'individu en accepte modestement le secret, c'est-à-dire l'impossibilité d'une connaissance totale.
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