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Le roman de Christophe Donner commence en 2020, quand il fait la connaissance d'un oligarque russe, Otto Zorn, magnat du numérique et grand collectionneur d'art conceptuel qui lui achète l'ensemble des fichiers vidéo du roman qu'il est en train d'écrire. Ces milliers d'heures d'enregistrement, capturées par un des logiciels de son ordinateur, contiennent ainsi l'intégralité du processus de création de l'écrivain. L'oligarque et l'écrivain viennent de créer le plus gros NFT (Non-funginble token) littéraire de la jeune histoire du métavers.
Ce livre n'est autre qu'une suite de La France goy pendant l'entre-deux guerres, avec une spirale qui tourne autour de trois axes : l'axe familial (le Dr Henri Gosset, arrière-grand-père de l'auteur), l'axe Léon Daudet et son fils Philippe (dont Henri Gosset fut le médecin), l'axe Pétain/De Gaulle.
Trois histoires oedipiennes où des fils tuent des pères...
Christophe Donner nous explique ici pourquoi Léon Daudet, le fondateur de L'Action Française, leader charismatique de l'extrême droite, royaliste, antisémite, antidreyfusard incorrigible, élu député de Paris, n'est jamais devenu le Mussolini, le Franco, le Hitler qu'il ambitionnait de devenir. Il raconte comment c'est le fils de Léon Daudet, Philippe, alors âgé de 14 ans, qui va briser cette ambition. Au terme d'une fugue des plus insensée, l'adolescent décide d'aller assassiner son père Léon Daudet en criant Vive l'anarchie ! Armé d'un revolver, il renonce en chemin et se tire une balle dans la tête. Mais par ce geste sidérant, sacrificiel, Philippe aurait sauvé les Français d'un fascisme européen qui, au milieu des années 20, n'aurait rien eu à envier à celui de ses voisins.
Ce livre virtuose frappe à la porte d'une histoire de France qui n'avait jamais été racontée de cette façon. Quant à savoir ce que faisait la grand-mère maternelle, à demi-nue, sur le bureau du Général, c'est le suspens par lequel l'auteur finit de tisser son intrigue, et maintient son mécène, et ses lecteurs, en haleine.
Autour d’un titre énigmatique (il faudra patienter jusqu’aux dernières lignes pour percer son mystère), ce roman passe en souplesse d’un siècle à l’autre et tisse des liens entre des sujets a priori peu fongibles : Léon Daudet (ambitieux monarchiste des années 20), son fils chéri très perturbé, la relation à couteaux tirés entre Pétain et De Gaulle, un oligarque forcément russe féru d’art conceptuel et pionnier du métavers, une histoire familiale à tiroirs évoquée dans « La France goy » parue il y a deux ans...
Reste que ces liens s’entremêlent et se recoupent dans un récit où les fans de drames psychologiques et de tragédies familiales bien sanglantes battront des mains en vérifiant qu’il y a différentes manières de tuer le père ; les amateurs d‘Histoire découvriront, eux, et d’une façon encore jamais racontée, comment, vers la fin des années 20, le fascisme aurait pu renverser la IIIe République et s’installer aux commandes de la France mais a raté son coup.
Pas sûr que ce récit jubilatoire relève de la vérité historique mais il est aussi effrayant qu’ébouriffant et réussit à tenir en haleine jusqu’au bout.
Sans compter que tout un chacun apprendra tout et le reste sur les cryptomonnaies, bien mieux que dans un manuel dédié !
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