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Canardo est en mission pour le compte du député-maire, en pleine campagne pour sa réélection. Le candidat a confié au détective le soin d'enquêter sur sa femme, qu'il soupçonne d'adultère - un écart de conduite qu'il ne peut pas se permettre à ce stade délicat de sa carrière politique. Bref, tout serait parfaitement normal dans un monde parfaitement ennuyeux si une série de meurtres n'ensanglantait soudain la ville. Toutes les victimes, tuées d'une balle dans le dos, semblent avoir un lien avec l'industrie du cinéma pornographique. Enfin un peu d'action pour Canardo, appelé à la rescousse sur cette difficile enquête par son vieux complice le commissaire Garenni...
En collaboration avec Pascal Regnauld, Benoît Sokal nous offre, avec cette dix-septième aventure de Canardo, une véritable intrigue de polar, avec son serial killer, ses victimes pas si innocentes que cela et ses fausses pistes. Pour une fois, le détective Canardo enquête avec la police officielle, en alternance avec des filatures dans une histoire d’adultère. Il est toujours aussi désabusé, alcoolique et gagne-petit mais avec des principes moraux (plutôt élastiques, il est vrai). Mais, à la différence de l’inspecteur Colombo (dont il est une pâle copie, dans son vieil imper râpé), il lui faut un certain temps avant de comprendre qui est le coupable.
L’anthropomorphisme de cette bande dessinée (Canardo est un col-vert, Garenn, un lapin, les Dubonot, des chiens) est très éloigné de celui de Walt Disney car, ici, tous les bons sentiments ont été définitivement bannis de ce monde. Ce sont plutôt manipulation, chantage, prostitution, pornographie, corruption électorale et violence gratuite qui sont au rendez-vous pour un festival digne d’un roman glauque de … Georges Simenon. Personne pour racheter les autres, même pas Canardo. Malgré son inoxydable humour noir, il ne résiste pas aux tristes sirènes de la chair.
Bref, comme à son habitude, Sokal nous dépeint une société où règnent en maîtres le cynisme et le mépris. Rien de bien étrange à cela, l’intrigue a pour toile de fond la campagne de Dubonot, candidat à sa propre succession à la tête de la ville. Issu de la petite bourgeoisie, il a pour adversaire une écologiste qui dénonce toutes les malversations et les pratiques douteuses de l’ancien maire. Mais pour Sokal, visiblement, personne n’arrive à un tel niveau de pouvoir les mains propres et le scénariste renvoie dos à dos, les bourgeois et le peuple, les progressistes et les réactionnaires, la gauche et la droite. Et, au passage, il égratigne Nicolas Sarkozy (p.20) et tous les démagogues élevés au rang de seigneurs/saigneurs.
Une des dimensions les plus séduisantes de cet album est son découpage : avec des scènes de filatures, de voiture en pleine vitesse, de vues urbaines. Sinon, l’ensemble est d’une facture plutôt classique pour la série. Ce qui fait que je ne suis plus surpris par cet univers mais pas déçu pour autant.
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