Yamen Manai, Prix Orange du Livre en Afrique 2022, partage avec nous sa bibliothèque idéale
Un jeune homme s'adresse tour à tour à son avocat et à un psychiatre venus lui rendre visite en prison. Avec une ironie mordante, le narrateur prend à parti ses interlocuteurs. Les charges qui pèsent sur lui sont sérieuses, mais il affirme ne rien regretter. Se dévoilent les raisons qui l'ont poussé au crime : un père qui l'a toujours humilié ; une société gouvernée par les apparences ; la domination des plus forts sans partage ;
La pauvreté, la saleté, le mépris des animaux et de l'environnement. Les seuls élans d'affection que le jeune homme a connus ont été ceux de Bella, le chiot qu'il a recueilli. Mais dans ce pays, on tue les chiens « pour que la rage ne se propage pas dans le peuple ». Pourtant la rage est déjà là. Alors quand Bella a été tuée, il a fallu la venger.
Yamen Manai, Prix Orange du Livre en Afrique 2022, partage avec nous sa bibliothèque idéale
Le choix des comités de lecture en Afrique et du jury international s’est porté sur "Bel abîme", éditions Elyzad (Tunisie)
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Comment accepter l'inacceptable, comment vivre avec des sauvages qui ne respectent pas les êtres ? Alors quand on brise notre bonheur pour soit disant notre bien, quand on pense à notre place, alors peut surgir notre face cachée qui sommeillait en nous.
Écrire, c’est transformer les abîmes
Le barrage est rompu, l’eau envahit tout, entraine tout sur son passage et vous emporte, vous, lecteur de ce livre magnifique.
C’est un flot qui jaillit, les mots de cet adolescent face à l’avocat commis d’office et au psychiatre qui doit l’évaluer.
Il dit son pays en déliquescence la Tunisie, qui n’a rien de commun avec une carte postale.
Il dit l’invisibilité de ceux au bas de l’échelle et cela commence par les enfants qui subissent la violence familiale et institutionnelle, ils sont niés, même pas considérés comme des hommes en devenir.
Une société gangrenée où le savoir et les sentiments ne sont pas une valeur mais plutôt une faiblesse à ne pas montrer.
Obéir, entrer dans le rang de la masse, laisser les adultes se noyer dans une surenchère d’apparences.
« Comment m’est venue cette passion pour les livres ? On en avait à la maison, alors j’ai fini par mettre le nez dedans. Ne pensez pas que c’est mon père qui m’y incitait, de ce point de vue-là, il ne s’est jamais intéressé à moi, il ne m’a jamais rien appris. Ne pensez pas non plus qu’il a lu l’intégralité de sa bibliothèque ! S’il y avait des livres à gogo et de tout horizon, c’était pour impressionner la galerie, pour s’acheter auprès de ses collègues docteurs une réputation d’intellectuel. »
Il, est un adolescent qui depuis trois ans vit une histoire d’amour avec Bella, amour fou qui l’a fait grandir, lui le petit invisible qui doit pousser sans amour, sans mots face à cette conscience qui s’éveille.
Il a beaucoup supporté mais il ne fallait pas s’attaquer à son amour, Bella, toujours là, avec amour, confiance et partage. Elle a fait éclore en lui une multitude de sentiments, l’a révélée à lui-même. Elle l’a fait différent de ce qu’il aurait été sans elle.
Il a relevé la tête, alors qu’importe ce qu’il a acquis restera pour toujours, ce qu’il énonce clairement dans ce flot aux accents d’un râle douloureux et rageux, c’est le constat d’un jeune homme au regard décillé par une sagesse de vieillard.
C’est un cri d’espoir pour un monde où il faut endiguer les tabous et rompre les chaînes.
Assez de ressasser les différences, ce qui divise, soyons créatifs.
La beauté de cette écriture est indéniable, elle charrie poésie et réalisme, en un rythme qui emporte tout sur son passage, et lorsque le lecteur est échoué sur le rivage il est en proie à une belle réflexion.
Multi primé cet opus est un feu qui n’est pas près de s’éteindre.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/01/06/bel-abime/
Un monologue comme un long cri, jeté à la face du lecteur.
Celle d’un jeune tunisien, arrêté pour un crime et qui s’exprime face à son avocat et au médecin chargé de l’examiner.
Un monologue pour expliquer la violence et la solitude, le trou qui se creuse dans le cœur dès les plus jeunes années.
La seule lumière de cette existence faite de violence et de silence : l’amour de Bella.
L’amour qui réchauffe et qui donne un sens, qui façonne et permet de vivre, responsable d’un autre qui nous devient plus précieux que la vie.
Mais la fin est déjà écrite et malheureusement, le happy end n’est pas au programme…
Énorme coup de cœur pour ce bref roman. J’avais beaucoup aimé « Le cœur ardent » de cet auteur, autant dire que j’attendais ce nouveau roman avec impatience et je n’ai pas été déçue.
Dans un style puissant, tout en dureté là où « le cœur ardent » était en rondeur. Les deux romans dénoncent, cependant, la même chose : le vol par les élites des rêves du peuple mais aussi la pauvreté et l’absence d’espoir.
C’est à Tunis, ça pourrait être la France. Les rêves brisés n’ont pas de frontières.
C’est magnifique et émouvant. Fort et intemporel.
Grand merci lecteurs.com pour ce témoignage d'une profonde intensité. cet amour pour Bella est fusionnel sans limité ,inconditionnel , vital
pas besoin d'écrire des centaines de pages pour bouleverser quelqu'un. Bel abîme de Yamen Manai ce lit très vite et en quelques pages ,décris parfaitement la folie des hommes au nom de tout et surtout n'importe quoi.
Lisez , lisez et lisez encore tout est là
Merci Yamen Manai et très bon choix du jury pour ce prix Orange du Livre en Afrique 2022
« J'ai appelé d mon coeur mon pays et je vous ai plaints. Je lui racontais qu'on était maudits, qu'on était perdus. Je lui murmurais que l'un comme l'autre nous étions un bel abîme dans lesquels les rêves se sont échoués … »
Ce court roman est un long monologue. Celui d'un jeune tunisien de 15 ans mis en garde à vue pour avoir tiré intentionnellement sur plusieurs personnes. Il s'y adresse successivement à son avocat commis d'office et à un psychologue chargé de l'évaluer et qui, tous deux, cherchent à comprendre l'origine de ce déferlement de violence. Un long cri, cri de révolte et cri de rage qui longtemps résonnera en moi.
Ce livre est la parfaite illustration que la beauté d'un livre ne se mesure pas au nombre de ses pages. 110 pages , mais quelles pages ! D'une puissance incroyable ! J'y suis rentrée sans n'en rien savoir et j'ai pris une grande claque, tant ce livre est percutant, fort, révoltant.
Une histoire qui peut se lire telle quelle mais qui aussi un roman métaphorique qui dénonce la violence enkystée dans la société tunisienne contemporaine. L'état des lieux pessimiste d'un pays gangréné par des principes religieux absurdes, où règne l'hypocrisie et la misère, un pays où la jeunesse se voit dénier tout avenir et où le printemps arabe a oublié les plus pauvres. C'est dur, c'est brutal, c'est intransigeant et accablant mais dieu que ce texte est beau !
Plus qu'un coup de coeur, un coup de foudre ! un texte à faire lire au plus grand nombre et à mettre entre toutes les mains. La découverte d'un auteur et d'une maison d'édition à suivre.
« Mais tant qu'il y aura des souvenirs et tant qu'il y aura des livres je ferai mieux que survivre »
Juste sublime.
Un jeune tunisien se trouve dans les locaux de la police après avoir tiré sur son père.
Petit à petit, nous découvrons ce qui l’a amené à perpétrer ce geste, tout en découvrant la société tunisienne de l’intérieur.
Une société rongée par la violence, où les plus faibles se vengent sur les insectes.
J’ai aimé l’humour qui se dégage parfois de ces pages, mais aussi le regard sans concession du narrateur sur son pays.
J’ai aimé le leitmotiv de la main : un homme de main, lever la main sur son enfant.
J’ai découvert des habitants Errahma-lé : sans pitié, alors que le Prophète est lui miséricordieux.
J’ai aimé l’amour inconditionnel qu’il porte à Bella, celui qui lui a manqué à son frère et lui, son frère se réfugiant dans la nourriture.
J’ai eu de la peine pour ce jeune homme bien trop lucide.
Quelques citations :
A la vitesse à laquelle on y va (dans le mur), je ne crains pas pour le pays, je crains pour le mur. (p.19)
Je n’ai jamais reproché à mon père d’être un pauvre fils de pauvre, mais je lui en veux d’être un pauvre de coeur, de ne pas avoir compris où était la vraie richesse. Etre bon pour sa famille est plus important que la façade que l’on construit pour les autres et pour laquelle son propre sang subit la négligence, le désamour et la rancune. (p.80)
L’image que je retiendrai :
Celle du jeune homme courant tous les matins avec son chien sur des kilomètres.
https://alexmotamots.fr/bel-abime-yamen-manai/
c'est à Tunis que va être jugé un jeune adolescent pur avoir tiré sur son père, sur des policiers...Pourquoi ce geste? comment en arrive t'on là, lorsque l'on a tout juste quinze ans...
Cet enfant, nourri par la peur et la brutalité trouve sa raison de vivre dans l'amour qu'il porte à Bella..
La violence monte en lui, après sa séparation avec ce petit être qui lui est cher, habilement préparée par un père sans coeur et une mère soumise...
Des sentiments d'inégalité, de compassion, de rage et de colère monte en nous lors de la lecture de ce court récit..
Je vais commencer par reprendre ce slogan qui parlera peut-être à certains d'entre vous : "Petit mais costaud!"
Voilà, c'est exactement ça.
Ce roman, lu d'une traite, je ne suis pas prête de l'oublier.
L'histoire se déroule à Tunis, quand celle-ci débute, notre narrateur, un ado de 15 ans dont nous ne saurons pas le nom, est en prison. On comprend donc vite que quelque chose de grave s'est passé.
C'est lors d'un long monologue adressé à son avocat puis à son médecin que le jeune homme va se confier sur les raisons qui l'ont poussé à faire ce qui l'a amené en ces lieux.
Ce roman c'est son cri de rage à l'encontre de cette société post printemps arabe ou tout va de travers. Car en cette période troublée et difficile, loin des espoirs de la 1ère heure, le jeune homme subit au quotidien la violence, celle de la rue mais également celle au sein même de son foyer.
Mais heureusement, au milieu de tout cela, une rencontre, celle avec Bella. Bella qui sera pour lui son amie, celle qui lui offrira amour et réconfort. Ceux qui ont connu un tel lien savent à quel point celui-ci peut-être à la fois une force et une faiblesse...
Mais chut, je n'en dis pas plus, car trop vous en dévoiler vous gâcherai le plaisir de la découverte.
Ce roman est un diamant brut qui ne vous laissera pas indemne.
A LIRE ABSOLUMENT!
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Belle critique pour un livre magnifique que j'ai beaucoup aimé !