"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Enquête policière à Cuba sur fond de quête d’une vierge noire. Aller retour entre le moyen âge et aujourd'hui.
Passionnant.
Découverte de Cuba et de la Floride aux côtés d’immigrés cubains
Dans les années 70, Iván, un jeune Cubain, sympathise sur une plage de La Havane avec un homme âgé et malade qui, au fil de leurs rencontres, lui raconte l’histoire de Ramón Mercader, l’assassin de Trotski.
Dans les années 30, Mercader est un jeune communiste espagnol, engagé dans la guerre d’Espagne contre les troupes de Franco. Il ne tarde pas à être recruté par l’URSS, et est envoyé à Moscou pour y être formé en vue d’une mission censée changer le cours de l’Histoire : l’assassinat de celui que Staline ne cesse de désigner comme l’infâme traître à la Révolution : Trotski.
En parallèle de ce récit, l’auteur retrace aussi l’histoire de ce même Trotski à travers ses différents exils à partir de 1929 jusqu’à Mexico en 1940, en passant par la Turquie, la France et la Norvège.
Enfin, un troisième fil narratif est tissé, entrelacé aux deux autres, celui du parcours d’Iván, écrivain raté, coincé entre loyauté à la Révolution castriste et vicissitudes de la vie quotidienne étriquée des Cubains.
Les vies de Trotski et Mercader sont racontées avec force minutie, entre événements historiques et questionnements existentiels sur la responsabilité, la culpabilité, le courage, la loyauté, la lâcheté, la persévérance et l’utilité de continuer à dénoncer les crimes de Staline d’une part, et d’autre part d’investir autant de moyens pour abattre un Trotski dont on se demande quel danger réel il représente encore.
Quant aux déboires d’Iván, ils occupent moins de place mais témoignent bien de l’atmosphère délétère et étouffante régnant à Cuba dans les années 60.
Ces trois personnages ont en commun d’avoir connu (et commis) trahisons, mensonges, manipulations, violences et drames, et de s’interroger sur le sens de leur vie : cela en valait-il la peine ? Aurait-on pu/dû agir autrement ?
Leonardo Padura a accompli un gigantesque travail d’enquête et de documentation pour reconstituer les faits et la vie quotidienne (forcément romancée faute de certitudes) de ces deux personnages historiques.
Avec cette somme, il veut dénoncer la propagande et l’idéologie communistes qui ont coûté la liberté et la vie de millions de gens à travers le monde. Il raconte aussi la révolte, l’écœurement ou la résignation de ceux qui y croyaient vraiment et qui ont fini par comprendre que leur idéal avait été dévoyé par les monstrueux appétits de pouvoir de quelques-uns. Un terrible gâchis sur la fin d’une utopie et la perte des illusions, qui prend ici la forme d’un suspense même si on en connaît la fin.
J’ai trouvé cependant que la tension du récit se relâchait par moments à cause de longueurs et de répétitions, et s’encombrait d’une foule de détails où je me suis parfois perdue (les différentes factions communistes, la succession de purges staliniennes), ainsi que de réflexions psychologiques à la limite du romantico-larmoyant.
2016. La Havane reçoit Barack Obama, les Rolling Stones et un défilé Chanel. L’effervescence dans l’île est à son comble. Les touristes arrivent en masse. Mario Conde, ancien flic devenu bouquiniste, toujours sceptique et ironique, pense que, comme tous les ouragans tropicaux qui traversent l’île, celui-ci aussi va s’en aller sans que rien n’ait changé.
La police débordée fait appel à lui pour mener une enquête sur le meurtre d’un haut fonctionnaire de la culture de la Révolution, censeur impitoyable. Tous les artistes dont il a brisé la vie sont des coupables potentiels et Conde a peur de se sentir plus proche des meurtriers que du mort…
Sur la machine à écrire de Mario Conde, un texte prend forme : en 1910, la comète de Halley menace la Terre et un autre ouragan tropical s’abat sur La Havane : une guerre entre des proxénètes français et cubains, avec à la tête de ces derniers Alberto Yarini, un fils de très bonne famille et tenancier de bordel prêt à devenir président de la toute nouvelle République de Cuba.
Le présent et le passé ont et auront toujours des liens insoupçonnés.
Thriller historique, sociologique et politique, le récit est ambitieux, plein d’humour et jubilatoire. Deux romans en un avec deux récits qui se passent dans deux périodes différentes. Une intrigue réaliste, mélancolique, pessimiste, l’auteur décrit une société fraternelle, solidaire et d’amitié, d’amours.
Un roman noir qui nous tient en haleine. Les deux narrations vont-elles se rejoindre ? Les crimes d’hier et d’aujourd’hui ont-ils un lien ?
"Quelqu’un qui jouissait de martyriser ceux qu’il pouvait martyriser, et nous avons été nombreux, les martyrs de sa croisade. Il canalisait sa médiocrité, sa haine et je crois même ses pulsions refoulées en écrasant les gens autour de lui, parce que, comme tu le sais, exercer le pouvoir sur les autres, c’est comme une décharge d’adrénaline ou un rail de coke, cela t’élève, te libère, te donne la satisfaction de te sentir supérieur."
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