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Un seul mot : dé-ce-vant ! L'idée de retrouver Freud et Jung en visite aux USA en même temps qu'une série d'agressions sur des jeunes filles me séduisait... mais la sauce ne prend guère, les deux psychanalystes faisant plus de la figuration qu'autre chose. Et quand l'intrigue se noue, enfin, elle retombe très vite comme un soufflé raté... Un incroyable échec !
29 août 1909 : Freud, accompagné de ses disciples Jung et Ferenczi, arrive à New York pour une série de conférences. Mais la puritaine Amérique est-elle prête à accepter une théorie aussi sulfureuse que la psychanalyse ? Le soir même, une jeune fille est assassinée dans un grand hôtel particulier de New York ; et le lendemain une autre jeune fille, Nora Acton, échappe de peu au même destin, mais elle a perdu l'usage de la parole et le souvenir de son agresseur. Une analyse, conduite par le jeune Stratham Younger sur les conseils de son maître Freud, saura-t-elle lui rendre la mémoire ? Et le fringant inspecteur Littlemore parviendra-t-il à démêler ce macabre écheveau ?
Le risque était grand d'étouffer la fiction policière sous une documentation encombrante. Jed Rubenfeld évite l'écueil brillamment ! Du début à la fin, L'Interprétation des meurtres demeure un thriller haletant, et livre son lot de rebondissements, de fausses pistes et de suspense. Et en même temps, ce moment-clé de l'histoire de la psychanalyse est traité avec sérieux et profondeur. À la fois lumineux et complexe, le personnage de Freud domine ce roman foisonnant. Sans schématiser ni ennuyer le profane, Rubenfeld nous éclaire sur ses dissensions avec Jung, et rend compte des réticences de cette encore jeune nation américaine, sûre de détenir la vérité, pour une théorie qui fait la part belle au doute. Mais la plus grande réussite de ce roman, c'est sans conteste son décor : un New York en pleine mutation où les automobiles supplantent peu à peu les voitures à chevaux, et où les pompes fastueuses de Gramercy Park côtoient la misère des quartiers ouvriers et les bas-fonds de Chinatown.
Un décor en quelque sorte structuré selon la topique de Freud. Dans les orgueilleux gratte-ciels qui surgissent du sol comme des champignons - naïfs symboles phalliques d'une civilisation conquérante - des craquements sinistres se font entendre, des passages secrets permettent aux assassins de s'enfuir et aux désirs les plus inavouables de s'accomplir. Et la vérité finira par surgir des profondeurs : de ce caisson étanche immergé sous l'Hudson pour permettre la construction du pont de Manhattan (claustrophobes, attention ! La scène est hallucinante de réalisme !) «L'Amérique, je le crains, n'est qu'une erreur. Gigantesque, certes, mais ce n'en est pas moins une erreur» dira le personnage de Freud à la fin du livre. Il n'est pas si courant qu'un roman policier interroge l'histoire des idées, et l'Histoire tout court, avec autant de force !
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