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Il existe plusieurs monographies consacrées à Jeff Wall (né en 1946), un photographe canadien à la réputation mondiale. Depuis ses études à l’University of British Columbia dans les années 1970, Jeff Wall a gardé en tête les différents aspects baudelairiens de « la peinture de la vie moderne » (1863 -69) et a tenté par son travail de les moderniser. Partant de là, avec une telle ambition, il en est venu à s’interroger longuement sur la place et le rôle de la photographie à la fin du dernier millénaire. Nous le savons bien : Jeff Wall est l’auteur d’une thèse sur le dadaïsme (Berlin Dada and the Notion of Context) et d’essais sur de nombreux artistes contemporains (Dan Graham, Rodney Graham, Roy Arden, Ken Lum, Stephan Balkenhol, On Kawara) ; il a enseigné l’histoire de l’art pendant quelques années ; il a sollicité à plusieurs reprises des références picturales telles Eugène Delacroix, Diego Velázquez, Hokusai ou Édouard Manet ; il a également convoqué des modèles littéraires (Franz Kafka, Yukio Mishima ou Ralph Ellison) et cinématographiques. Puis, à partir de 1979, il a commencé à exposer des caissons lumineux qui suscitent encore aujourd’hui bien des commentaires et des interprétations. Si bien que ce recueil des propos de l’artiste même, publiés sous le titre de « Essais et entretiens (1984-2001) » par l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts (ENSBA) de Paris, tombe à point nommé. Il reste une des meilleures sources de renseignements pour comprendre l’œuvre de ce photographe. La plupart des essais étaient inédits en français et nous y retrouvons ces liens entre Jeff Wall d’une part et les artistes contemporains cités ci-dessus. Dans ces textes, il pointe du doigt avec une incroyable lucidité les impasses et les utopies de l’art conceptuel des années 1970. Mais la révélation vient très probablement lors de la lecture des entretiens. Pour ma part, je pense que ceux menés avec panache par Jean-François Chevrier (par ailleurs, auteur d’une monographie sur Jeff Wall) sont les plus limpides : le photographe canadien tente de définir quelle est la position idéale pour un artiste à ce monde contemporain, paradoxal, violent, pervers et passionnant, tout à la fois. Eclairantes et intelligentes, les réflexions de Jeff Wall sont autant de leçons d’histoire de l’art de ces dernières décennies. Souvent, il n’est guère tendre dans ses critiques véhémentes tout en revenant aux sources de la modernité (le peintre Edouard Manet et les impressionnistes) ainsi que d’autres grandes figures historiques du XIXe siècle. Pour cette raison, et encore bien d’autres, il se doit de lire avec attention et esprit critique les écrits de cet homme, présent à la Tate ou au MOMA, devenu un artiste incontournable de la photographie plasticienne. En effet, les grands formats et les compositions élaborées par Wall sont souvent cités comme une des influences du groupe de Düsseldorf, conduit par Andreas Gursky, Thomas Struth, Thomas Ruff, et Candida Höfer.
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