"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
4 nouvelles, autant de périodes de la vie, de « saisons » formant en arrière-plan un autoportrait précis et complet de l’auteur à travers des personnages de fiction. Passionnant et toujours moderne car toute vie humaine passe par ces moments là.
J’ai énormément aimé Âme d’enfant, souffrance et révolte d’un petit garçon « petit et nul » face au poids d’une éducation religieuse destinée à briser toute résistance. La famille de Hermann Hesse était dans la frange piétiste du protestantisme allemand, prônant une éducation extrêmement dure. Revendiquant son libre arbitre, il gardera toute sa vie une opposition farouche à l’autorité. Ce petit garçon c’est lui et un peu tous les enfants...
J’ai beaucoup aimé La scierie du marbrier. Un jeune homme dans l’« élan irrésistible vers le bonheur » voit s’ouvrir tous les possibles quand il découvre au milieu d’un vallon boisé une scierie de marbre et fait la connaissance du propriétaire et de sa fille Hélène. Il est libre et ne rêve qu’à l’amour mais Hélène cache un secret...
J’ai aimé avec curiosité Klein et Wagner, la fuite de cet homme vers l’Italie sous un faux nom – revolver en poche – après avoir détourné de l’argent à son entreprise. Rejet brutal d’une vie familiale ratée, dépression, espoir désordonné d’une nouvelle vie, d’une rencontre qui change tout...
J’ai prodigieusement aimé Le dernier été de Klingsor, reflet du grand promeneur et peintre qu’a été l’auteur. J’ai trouvé très actuelle la façon qu’à le narrateur de voyager dans des contrées extraordinaires… en fait dans la campagne et les villages environnants, par sa seule intense vie intérieure. On est loin des impératifs modernes de consommation effrénée, d’impératifs de destinations lointaines !
La nature, les saisons, les couleurs sont au cœur de récits où il explore et peint l’âme humaine. Écrits bien avant Le loup des steppe et Narcisse et Goldmund, ils sont d’une grande modernité et donnent un bel aperçu du génie de cet immense auteur. Enfin... C’est mon avis !
Siddharta, c'est un conte : une recherche de sens, une aventure à travers les sociétés et une main tendue vers les autres.
Premier livre de l'auteur pour moi, une belle découverte. J'aime ces livres spirituels avec des personnages dans l'action. J'aime aussi ces livres qui suivent un être tout au long de sa vie. C'est rassurant, le moment n'est pas le destin dans son entièreté. On peut bifurquer, se réveiller quand on le souhaite. Je sais que c'est ce qui me plait dans ces ouvrages.
Ce n'est pas le livre de l'année pour moi. C'est surtout une histoire qui me permet de penser. Comme si les effets s'activent lorsqu'on a terminé le livre, qu'on est finalement prêt à comprendre de quoi il détourne.
Je vais continuer donc de laisser se diffuser les mots dans mon esprit. Je vais continuer de réfléchir au chemin parcourus et celui qu'il me reste à faire.
Je me glisse comme je peux, où je peux. Entre les pages, entre deux mots. Je peux être encre, plume, chat, chapeau de paille, paillasson...
Voilà toute la force d'évocation d'Hermann Hesse au service des souvenirs. de l'enfance. de la nostalgie.
Et il fait ça si bien.
Narrer.
Ne pas vous laisser le choix.
Vous voici devenu son ami, l'un de ses premiers amis, souffrant, ou l'un des derniers, comme un symbole de ces belles années. Ce qu'il lui reste de vous, ce sont des lettres, parfois même moins que ça. Un parfum, une couleur, un contact. Et l'ami vit. Une page, dix pages, mais il vit !
Puis vient le père, et la silhouette ne grandit pas. C'est vous qui rétrécissez, jusqu'à loger tout entier dans la pupille d'Hesse enfant. Vous êtes la tartine abandonnée, la poussière sur la main du mendiant. de si petites choses.
Oui, pourquoi si petites ?
Parce qu'Hesse invoque des choses très fortes par de toutes petites choses. A la manière de Proust, ces souvenirs tiennent à des sensations. Et déclenchent des images, des mots à vif.
Hesse fut la découverte majeure de cette année pour moi.
Je ne comprends toujours pas comment on a pu se manquer tout ce temps, lui et moi...
Des carnets laissés par un voyageur étrange. Solitaire. Désabusé.
Des carnets ouverts par un homme à qui ils n'appartiennent pas.
Et voici le loup des steppes qui hurle. Qui appelle à être écouté. Entendu. Qui rameute. Qui gémit.
C'est plus qu'un cri, plus qu'un émerveillement, ce livre. Un uppercut.
L'histoire, ce n'est que ça.
Cet homme à la lisière de mourir. Qu'une femme retient, un soir, du bout de la manche. Une femme qui se donne pour mission de lui apprendre la fête, la griserie. La comédie simplement. Parce qu'elle fait joliment semblant aussi, cette louve.
Que ça.
Pourtant, c'est riche. D'une richesse qui pèserait plus lourd que le livre s'il fallait en faire l'autopsie.
Comme ça, en vrac, voici l'homme face à son animalité, à la frustration de celui qui va à l'encontre de sa nature. La solitude de celui qui n'écoute plus que sa nature.
La folie de son temps. Nous sommes à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, et voici que la compassion ploie sous l'indifférence, sous les machines infernales et meurtrières, faire la guerre et de l'argent, tant que la vie bat, et elle bat, mon Dieu, elle bat plus vite et plus fort que la guerre !
Et puis ce réjouissant débat, largement exposé par Camus : le suicide.
Ici, le suicide ou l'acceptation d'une époque, d'un quotidien, d'une humanité qui ne nous ressemblent plus...
J'ai traîné à l'ouvrir, il était à prendre la poussière sur mes étagères, le loup des Steppes. Pas moyen. Je passais la main dessus, de temps en temps. Aujourd'hui ? Et puis non, je reculais. Frileuse. Mais comme j'avais raison, au fond ! Comme ce livre m'a bouleversée, émue, sonnée, jusqu'à pleurer, parce que c'est beau, mais tellement beau, ces phrases qui s'engagent et s'agencent parfaitement, cette musique qui n'en finit pas de battre le bon rythme, du début à la fin. Hermann Hesse rejoint le Panthéon de mes idoles, hop là, d'un bond d'une grâce de danseuse étoile.
Bienvenu Monsieur.
Infiniment bienvenu.
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