"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
En 2022, l’assassinat de la jeune Iranienne Mahsa Amini, tuée par la police des moeurs pour un voile mal ajusté, déclenchait des manifestations dans tout le pays au nom du mouvement Femme, Vie, Liberté. La journaliste franco-iranienne Delphine Minoui raconte ce formidable élan contre le sort des femmes sous l’écrasant pouvoir des mollahs au travers d’une adolescente de seize ans, personnage romanesque incarnant toute une génération en révolte.
Elle s’appelle Zahra pour la connotation très religieuse de ce prénom, mais échappée par manque d’argent à l’avortement auquel son sexe la condamnait selon la volonté de son père et de son grand-père, elle se reconnaît bien plus volontiers dans Badjens, le surnom que, parmi les minuscules gestes anti-patriarcaux que sa mère ose furtivement, cette dernière lui donne dans le secret de leur complicité de femmes. Dans la langue quotidienne « effrontée », Badjens signifie mot à mot « mauvais genre », un qualificatif que les filles de la génération Z s’octroient ironiquement entre elles, une façon de traduire l’esprit de désobéissance revendiqué désormais par le sexe considéré faible et toxique par le pouvoir religieux iranien.
Ce que sa mère dans son vase clos continue à subir sans plus de révolte que dans le secret de son âme, Badjens, comme bien d’autres de son âge connectées aux réseaux sociaux malgré la censure et reliées à des filles du monde entier, ne le supporte plus. « J’ai compris le rôle qui m’était assigné. Jusqu’ici, je n’étais qu’une erreur. Désormais je serais celle qui s’écrase, se tait. Celle qui regarde par terre. Qui ne hausse pas trop la voix. Qui ne se plaint pas, ni ne se fait remarquer. Celle qui écoute ses cousins, ses oncles, son père, son grand-père, mais qu’on n’entend jamais. À part pour Maman, je ne compte pas. Je suis invisible. »
Sortir de l’invisibilité, c’est s’exposer au harcèlement et à la violence. « À compter de ce jour, chaque fois que je sortirai dans la rue, je plaquerai assidûment mon maghnaé sur la tête. (...) Je me suis reprogrammée. Il y aura un dedans et un dehors. La vie imposée et la mienne. À l’école et dans la rue, je serai celle qu’on veut que je sois. À la maison, celle que je veux être. Pas étonnant qu’on soit un peuple de schizos. C’est la seule voie pour s’en sortir. » « Parfois, je me fais peur : à force de mettre des masques, la vraie « moi » finira-t-elle par se dissoudre dans le néant ? »
Alors, quand la vague de protestation se met à enfler, Badjens est très vite de celles qui s’élancent dans la rue pour brûler leur foulard, bravant la répression violente et les tirs policiers dans la foule. Si sa grand-mère, imbibée du culte des martyrs de la Révolution islamique, tremble de terreur à l’idée de ces vandales prétendant arracher le voile pour lequel elle a en son temps combattu, si sa mère ne parvient pas tout à fait à en croire ses yeux devant une audace dont elle n’aurait jamais osé rêver, Badjens et ses semblables, cisaillées entre la propagande du régime et les flux d’informations captés sur les réseaux sociaux, ont pris la tête d’une contestation qui n’a plus rien à perdre - « Je suis morte le jour où je suis née » - et qui se renforce de chaque sacrifice - « Sur le tombeau de Mahsa Amini, ses parents ont écrit : Tu n’es pas morte. Ton nom est devenu un mot de passe. »
Rédigé à hauteur d’adolescente dans une langue vive et orale, le texte dont la simplicité apparente, à première vue peut-être décevante, se nourrit en réalité de nombreux détails fidèlement retranscrits, n’a sans doute pas l’envergure d’une grande œuvre littéraire. Il n’en incarne pas moins avec efficacité, pour une lecture choc et très grand public, le témoignage d’une jeune génération iranienne parvenue au point de rupture.
Badjens est bien plus qu’un simple roman ; c’est un cri de liberté, un hommage à la révolte et à l’émancipation des femmes, particulièrement celles qui luttent dans des sociétés oppressives pour leur droit à la liberté.
À travers l’histoire de Badjens, également appelée Zahra, une adolescente iranienne de 16 ans, l’autrice nous plonge dans un quotidien marqué par la violence et la répression d’un pays où les femmes sont invisibilisées.
Badjens grandit dans une famille où son père, fervent défenseur de la Charia, impose une discipline rigide et répressive. Depuis son plus jeune âge, elle se trouve en guerre contre l’autorité patriarcale de son père, tout en étant victime de l’oppression de son statut de femme.
Toutefois, sa mère, plus libérale, joue un rôle clé en allégeant parfois le poids de cette condition, lui offrant la confiance et la force nécessaires pour résister. C’est grâce à elle que Badjens trouve le courage de se révolter et de défier les normes qui l’étouffent.
Le récit de Delphine Minoui ne se contente pas de dépeindre l’oppression subie par les femmes ; il met également en lumière leur résilience et la résistance de cette jeunesse qui, malgré les obstacles, trouve la force de se lever, de dénoncer et de se battre pour sa liberté. À travers le regard de la jeune fille, elle nous livre un témoignage poignant de la lutte des femmes dans un environnement où la répression et la violence sont omniprésentes.
Un texte fort et essentiel.
Ce roman est un témoignage sur la résilience des femmes et leur lutte pour leurs droits fondamentaux. Il nous rappelle avec force que la liberté n’est jamais acquise.
Une lecture qui s’inscrit dans la lignée du mouvement « Femme, Vie, Liberté », du roman graphique et du reportage.
Aujourd’hui, avec l’histoire de l’étudiante Bahou Daryaei, qui devient un nouveau symbole de ce mouvement en Iran, il est crucial de lire et d’informer un large public. Chaque ouvrage compte, apportant peut-être une nouvelle pierre pour aider ces femmes à se libérer un jour de cette oppression qui leur prive de leurs droits fondamentaux.
L’histoire de cette jeune iranienne, Zahra , de 16 ans , dont nous suivons l’enfance puis l’adolescence.
Un père injuste , qui la regarde à peine , lui préférant son jeune frère. Il est des pays où il vaut mieux naitre garçon que fille.
Un mère aimante , complice et solidaire
Vivant dans un pays sous chappe de plomb . Malgré tout, de rares moments de liberté ( avec la complicité de sa mère). Des amies , l’envie de vivre comme les jeunes occidentales. Malgré les privations , la dictature des ayatollahs, le silence imposé , le voile…
Et puis le 16 septembre 2022 , la mort de Mahsa Amini , battue à mort par la police. Des manifestations, la mort d’un proche.
Partagée entre la crainte de son père , et sa mère qui se tait depuis trop longtemps, Badjens ( surnom donné par sa mère à Zarah et qui veut dire effronté) saura choisir .
Ce roman d’une émancipation devrait être lu par notre jeunesse. L’histoire de cette jeune fille « mort-née d’un pays qui l’a fantomisé ». Révoltée et courageuse dans un pays qui n’hésite pas à tuer sa jeunesse .
Lu dans le cadre du prix Landerneau des lecteurs 2024
« Badjens » est un livre court, percutant, réaliste qui ne laisse pas indifférent. Le cri de révolte d’une jeune iranienne qui ne peut plus se taire sur ce que subissent les femmes de son pays. Leur infériorité par rapport aux hommes qui sont des privilégiés.
Un livre incontournable de la rentrée littéraire d'automne 2024.
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