Le dernier roman de Caroline de Mulder, La pouponnière d’Himmler se déroule principalement dans la maternité Hochland à Steinhöring, en Bavière, à la fin de la guerre.
Ce roman historique et roman choral, véritable plongée dans ce Heim Hochland, premier foyer du Lebensborn, première usine à...
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Le dernier roman de Caroline de Mulder, La pouponnière d’Himmler se déroule principalement dans la maternité Hochland à Steinhöring, en Bavière, à la fin de la guerre.
Ce roman historique et roman choral, véritable plongée dans ce Heim Hochland, premier foyer du Lebensborn, première usine à fabriquer des bébés parfaits, ouvert et inauguré par Heinrich Himmler en 1936 et également le dernier à tomber entre les mains des Alliés, en raconte les neuf derniers mois d’existence par le biais de trois voix, celles de trois personnages dont les destins se croisent.
Celle de Renée, une jeune française abandonnée des siens après une relation avec un soldat SS, qui, enceinte, doit fuir et trouve refuge dans ce Heim.
Helga, elle, est une jeune infirmière nazie très consciencieuse et attentionnée qui veille sur les femmes enceintes et les nourrissons.
Et puis, il y a Marek ce prisonnier politique polonais qui vient du camp de concentration de Dachau, et est intégré dans l’équipe chargée d’entretenir et d’agrandir le domaine, ce, dans des conditions éprouvantes, complètement inhumaines.
Le Lebensborn, c’était une quarantaine de foyers en Europe, 20 000 enfants nés de mères allemandes et étrangères, 200 000 enlevés et germanisés de force. On accueillait dans ces foyers, ces Heime, des femmes sélectionnées, le plus souvent enceintes de SS.
C’était une association de l’Allemagne nationale-socialiste dont le programme conçu par Himmler consistait à accélérer le développement d’une race aryenne parfaitement pure et dominante, le but étant de faire perdurer la race supérieure par la procréation d’enfants de pure race aryenne et de fabriquer les futurs seigneurs de guerre, et, au fur et à mesure qu’on avance dans la guerre, les pertes en jeunes gens étant de plus en plus nombreuses, de pouvoir les remplacer.
Il est terrifiant de voir comment étaient évincés les enfants qui ne correspondaient pas aux critères exigés et comment était traitée alors la douleur de leurs mères.
C’est une plongée saisissante dans l’Allemagne nazie envisagée du point de vue des femmes que livre Caroline de Mulder et une plongée dans la banalité du mal.
Il est particulièrement intéressant de voir, tout au long du roman, l’évolution des pensées des deux personnages féminins principaux, notamment celles d’Helga, comment peu à peu les doutes vont s’insinuer dans son esprit et comment cette prise de conscience va être difficile à assumer.
Comment, d’autre part, ne pas être chamboulé par ces deux êtres Renée et Marek qui auront été un temps « deux solitudes au même endroit, au même instant ».
Les conditions de vie dantesques des prisonniers la faim, le froid, le travail, les coups font d’autant plus ressortir les conditions de vie confortables à l’intérieur du Heim, l’abondance de nourriture, la propreté, le repos, sans pour autant gommer les tensions existantes entre les femmes.
J’ai trouvé la reconstitution historique de cet inquiétant gynécée, affreusement bouleversante.
En lisant cet ouvrage, je n’ai pu m’empêcher de penser à Max de Sarah Cohen-Scali, témoignage fictif d’un enfant né dans le programme Lebensborn. J’y ai retrouvé notamment ces ahurissantes Namensgebung ou cérémonies du nom lors desquelles le nouveau-né auquel on donnait un nom et un parrain était intégré dans la communauté SS…
Le roman se termine par l’arrivée des soldats américains et laisse le lecteur sur cette fin ouverte : Que deviendront ces enfants et quel choix leur restera-t-il ?
Un roman à lire pour ne pas oublier !
Chronique illustrée à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/-96